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«Les passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m’aveugler»

Dissertation : «Les passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m’aveugler». Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  4 Mars 2022  •  Dissertation  •  2 464 Mots (10 Pages)  •  1 139 Vues

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Séquence : La Princesse de Clèves

Dissertation - Corrigé

Sujet : «Les passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m’aveugler», déclare la Princesse de Clèves. Dans quelle mesure cette phrase éclaire-t-elle votre lecture du roman?

Vous répondrez à cette question en vous fondant sur votre connaissance de l’œuvre et de la séquence.

   Sous la monarchie absolue de Louis XIV, le mouvement du classicisme, basé sur le triomphe de la raison sur les passions, domine. Un des auteurs qui ont marqué cette période est Madame de Lafayette, née à Paris en 1634 dans une famille de la petite noblesse. Elle créera son propre salon littéraire et participera à la naissance des femmes de lettres. Toutes ses œuvres seront publiées anonymement. Elle publie en 1678 un récit intitulé La Princesse de Clèves, considéré comme le premier récit d’analyse psychologique. Dans ce roman, le personnage éponyme est marié par sa mère au prince de Clèves, mais est confronté à de violents sentiments passionnés pour le duc de Nemours. Lors d’une discussion avec ce dernier, elle lui confie que « [les] passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m’aveugler ». Il sera intéressant de se demander dans quelle mesure cette phrase éclaire la lecture du roman. En d’autres termes, en quoi ce roman se fait-il l’écho du combat que se livrent passion et raison ? Pour répondre à cette question, il sera utile de se demander, dans un premier temps, comment la passion peut prendre le contrôle sur la raison chez les personnages de ce roman. Ensuite il sera judicieux d’observer comment les passions peuvent être combattues, à la lumière de cette histoire. Enfin, il sera utile de resituer cette problématique dans l’époque qui l’a vue naître.

   Dans un premier temps, il va être question de se demander en quoi les passions peuvent conduire les comportements des personnages.

 Tout d’abord, ce roman est tout d’abord marqué du sceau de la passion amoureuse. Le milieu dans lequel se déroule l’action, la cour du roi Henri II, rassemble les plus belles personnes du royaume. Les premières pages insistent sur la magnificence des personnages et mettent en valeur la galanterie, art de la séduction. La Cour est le lieu par essence de la séduction, contre quoi Mme de Chartres met en garde sa fille en lui faisant souvent « des peintures de l’amour » (p.21). Car la séduction peut faire naître la passion ; et il est possible d’affirmer que l’histoire contée par Mme de Lafayette propose une succession de situations mettant en scène la passion. Ainsi, la relation entre le roi et la duchesse de Valentinois est-elle abondamment commentée par Mme de Chartres à sa fille qui lui glisse le reproche de ne lui avoir pas appris « les divers intérêts et les diverses liaisons de la Cour » (p.52) ; les nombreuses conquêtes de M. de Nemours et la double relation de Mme de Tournon avec Sancerre et d'Estouteville sont d’autres éléments d’une liste qui pourrait être très longue. Il semble que la passion soit un plaisir goûté et recherché par la Cour à cette époque.

   Qui plus est, ce sont les passions qui commandent. Bien qu’il s’en défende, l’homme peut être soumis aux passions à n’importe quel moment, dans n’importe quelle occasion. A la différence de ce qui a été présenté plus haut, et qui peut être considéré comme un jeu, la passion devient alors très sérieuse, emportant l’intégralité d’un individu. C’est ainsi que la princesse tombe amoureuse, malgré elle, du duc de Nemours. Après avoir dansé avec lui au bal, elle est amenée à la revoir souvent, par hasard, et la narration rend parfaitement compte du ravissement qui se joue en elle : « Madame de Clèves revint chez elle (…) il fit en peu de temps une grande impression dans son cœur » (p. 50-51). Par la suite, toute sa conduite est guidée par ses pensées habitées par l’homme dont elle est tombée amoureuse : être présente ou pas quand il est présent ? Faire remarquer qu’il a dérobé son portrait ? Se précipiter quand il s’est légèrement blessé au risque de faire remarquer ses sentiments… La même alchimie se produit simultanément dans les sentiments de M. de Nemours : « La passion de Monsieur de Nemours pour Madame de Clèves fut d’abord si violente qu’elle lui ôta le goût et même le souvenir de toutes les personnes qu’il avait aimées […] » (p. 58) ; il en vient même à se désintéresser de la promesse de mariage d’Elizabeth d’Angleterre et ainsi fermer la porte à un avenir des plus glorieux. Les personnages sont donc dominés par leurs sentiments et en arrivent à prendre des décisions inenvisageables en temps normal.

   Le plus remarquable est que les passions peuvent conduire même les personnes qui semblaient leur résister le mieux. Le message du roman est clair : les passions meuvent s’emparer de tout le monde. Il n’est qu’à étudier le cas de Mme de Tournon, considérée à tort, selon M. de Clèves, qui l’admirait, comme « une femme pleine de sagesse » (p. 69) mais qui, en grand secret, avait lié une liaison avec M. de Sancerre, après la disparition de son mari… et qui entretenait une seconde relation cachée avec d’Estouteville. Et que dire de M. de Clèves, qui, durant la plus grande partie du roman, apparaît comme un personnage tout en retenue, mesuré, fidèle à sa femme, suivant la raison et qui assure à sa femme : « […] la sincérité me touche d’une telle sorte que je crois que, si ma maîtresse, et même ma femme, m’avouait que quelqu’un lui plût, j’en serais affligé sans en être aigri. Je quitterais le personnage d’amant ou de mari, pour la conseiller et pour la plaindre. » Or, une fois que la princesse lui aura révélé l’infidélité de son cœur, le lecteur le verra lentement décliner, être inquiet, rongé par la jalousie et finalement mourir, terrassé pas cette passion qui l’aura étouffé. La passion touche chaque personnage du roman, à l’exception de Mme de Chartres, mais il est possible de supposer que les conseils avisés qu’elle donne à sa fille à ce sujet, sont le fruit de sa propre expérience.

   Les personnages du roman n’échappent donc pas à la tyrannie des passions. Cependant, il apparaît que certains personnages peuvent résister aux passions, ne pas se faire aveugler par elles.

   La résistance aux passions peut d’abord se faire par la crainte de la souffrance. Etymologiquement, la passion est liée à la souffrance. Les exemples de passions malheureuses sont nombreux dans le roman. A ce sujet les récits enchâssés proposent des exemples édifiants : c’est la souffrance de Sancerre trompé par Mme de Tournon avec d’Estouteville : « Je suis plus malheureux mille fois que je n’étais tantôt, et ce que je viens d’apprendre de Madame Tournon est pire que la mort », confie Sancerre à M. de Clèves. Citons aussi le cas d’Anna de Boulen, décapitée à cause de la jalousie aveugle et maladive de son mari, Henri VIII. La princesse de Clèves elle-même a connu la torture due à la passion et à la crainte d’être trompée à l’occasion de la méprise concernant la lettre féminie qu’elle croyait à tort adressée à M. de Nemours. Les exemples présentés ci-dessus sont édifiants et ont pour intention de montrer les dangers liés à la passion.

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