Lecture linéaire, Les Fleurs du mal, Le Poison, XLIX
Commentaire d'oeuvre : Lecture linéaire, Les Fleurs du mal, Le Poison, XLIX. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Mickaël Bride • 27 Juin 2022 • Commentaire d'oeuvre • 2 076 Mots (9 Pages) • 494 Vues
Lecture linéaire, Les Fleurs du mal, Le Poison, XLIX
Introduction
Charles Baudelaire (1821-1867) est un poète majeur du XIX°. Poète inclassable : romantique et parnassien, il sera aussi le précurseur du symbolisme et inspirera des générations de poètes après lui (Rimbaud, les surréalistes, Yves Bonnefoy …). Il a révolutionné la poésie par ses thèmes : c’est dans le Mal que le poète doit cueillir les fleurs nouvelles de la modernité. Trouver,au sein de la laideur du monde, une beauté nouvelle, et métamorphoser cette « boue » en or : l’alchimie poétique permettra de faire resplendir la beauté et la spiritualité perdues. C’est ce qui rend le projet baudelairien unique et sans précédent. Ce projet s’incarne dans le recueil intitulé
Les Fleurs du Mal , recueil en vers publié pour la 1° fois en 1857 qui choquera la France bien-pensante du II° Empire et fera l’objet d’un procès pour immoralité.
Dans ce recueil s’affrontent spleen et idéal, mais la structure du recueil fait apparaitre une descente de l’Idéal vers le spleen, C’est-à-dire vers l’angoisse existentielle face à l’Ennui, au temps, à la solitude, à l’impossibilité à trouver un sens…
Les « paradis artificiels » peuvent alors sembler la voie pour atteindre à l’idéal et échapper au spleen. Dans le poème XLIX intitulé Le Poison, composé de quatre quintils qui alternent alexandrins et heptasyllabes, Baudelaire énumère les poisons auxquels il recourt pour tenter d’échapper au spleen.
Notre fil directeur cherchera à montrer comment il en montre les limites
Mouvements :
1. La 1ere strophe concerne le pouvoir du vin
2. La seconde, celui de l’opium
3. Les deux dernières strophes, celui la femme aimée
[Lecture]
Analyse :
Le vin sait revêtir le plus sordide bouge
D'un luxe miraculeux,
Le premier mot du poème est « le vin » ; la place en début d’alexandrin le met en valeur ; Il est, de plus, le sujet du verbe « savoir » employé au présent de vérité générale.
Ainsi dès l’ouverture du poème, Baudelaire donne au « vin » un pouvoir, celui de métamorphoser la laideur absolue « le plus sordide bouge » -et on notera bien sûr le superlatif « le plus »-, l’adjectif « sordide » qui exprime déjà lui-même l’idée de misère extrême, et le substantif « bouge » qui caractérise un lieu sordide, un taudis infect, de les métamorphoser donc en un « luxe miraculeux ».
Ainsi le vin, tel un magicien- peut-être même doté d’un pouvoir divin -, puisqu’il sait produire à partir du sordide un luxe « miraculeux »
Néanmoins l’emploi du verbe « revêtir » est ambigu. Ce verbe signifie couvrir d’un vêtement. Ce luxe miraculeux n’est donc peut-être qu’une apparence. Et en effet l’état d’ivresse ne dure pas éternellement…
Et fait surgir plus d'un portique fabuleux
Dans l'or de sa vapeur rouge,
Néanmoins, la proposition indépendante coordonnée par « et » qui suit, lui attribue à nouveau un pouvoir magique qui est celui de « faire surgir » et il y a donc là aussi quelque chose qui suggère un pouvoir magique, comme le magicien fait surgir une colombe ou un lapin de son chapeau… le vin fait surgir « plus d’un portique fabuleux » et l’on peut voir la profusion « plus d’un »
Quant au « portique fabuleux », il n’est pas sans rappeler les temples de l’antiquité mais surtout les « vastes portiques » du 1er vers de La Vie antérieure « J'ai longtemps habité sous de vastes portiques »
Le vin serait-il celui qui peut nier le Temps ? Nous faire passer d’un monde à l’autre, d’un espace à l’autre, d’un temps à l’autre ?
Dans l'or de sa vapeur rouge,
Dans cette métaphore qui suggère toute la richesse créative du vin (de l’alcool, de ses effets) on peut reconnaitre l’exaltation du sens de la couleur « or »/ »rouge » si importante chez Baudelaire. Ainsi le vin, et d’une manière générale, « les paradis artificiels » permettent de développer les sens mais également d’établir des correspondances qui témoignent d’une unité du monde (que seule le poète peut atteindre).
Comme un soleil couchant dans un ciel nébuleux.
La comparaison ici associe le pouvoir du vin à celui de la Nature et poursuit l’image colorée qu’on avait dans le vers précédent ; néanmoins il s’agit d’un « soleil couchant » qui donc va disparaitre ; quant au « ciel nébuleux », il peut évoquer la présence d’un réel plus menaçant, de la menace du spleen lorsque l’effet du vin aura disparu
Ainsi dans cette première strophe le vin apparaît bien comme un magicien capable de transformer le réel ou du moins de nous en faire voir de toutes les richesses. Mais il reste néanmoins un paradis artificiel, dont l’effet est voué à disparaitre
La deuxième strophe est consacrée à un autre poison, l’opium.
L'opium agrandit ce qui n'a pas de bornes,
Allonge l'illimité,
Approfondit le temps, creuse la volupté,
Et de plaisirs noirs et mornes
Remplit l'âme au-delà de sa capacité.
Le pouvoir de l’opium est exprimé par une série de verbes d’action au présent de vérité générale : « agrandit », « allonge », « creuse », « remplit » qui tous suggèrent un enrichissement, un élargissement…
L'opium agrandit ce qui n'a pas de bornes,
Allonge l'illimité,
Approfondit le temps, creuse la volupté,
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