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Le Cygne, C. Baudelaire

Commentaire de texte : Le Cygne, C. Baudelaire. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  11 Octobre 2017  •  Commentaire de texte  •  2 005 Mots (9 Pages)  •  4 427 Vues

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Lecture analytique n°1 : « Le Cygne »

  1. Présentation du texte
  • Poème dédié à Victor Hugo, opposant virulent au régime de Napoléon III, qui s’est exilé sur l’île de Guernesey (1855-1870)
  • Admiration immense de Baudelaire pour Hugo
  • Dans la lettre que Baudelaire envoie à Hugo, celui-ci explique son projet : « dire […] comment la vue d’un animal souffrant pousse l’esprit vers tous les êtres que nous aimons, qui sont absents et qui souffrent, vers tous ceux qui sont privés de quelque chose d’irretrouvable ».
  • Baudelaire décrit dans ce poème les changements urbains dont Paris est victime (cf. travaux d’Haussmann). Ce spectacle lui inspire le souvenir d’Andromaque, qui avait tenté de reconstruire le paysage de Troie lors de son exil en Epire. Cet épisode lui en rappelle un autre : en mars 1864, 4 cygnes s’étaient posés sur le bassin de Tuileries. Baudelaire transforme cette anecdote en souvenir personnel et imagine un cygne qui s’évade d’un zoo, mais qui, comme l’Albatros, est inadapté au monde qui l’entoure.

Problématiques

  • En quoi le tableau urbain se charge-t-il d’une dimension allégorique ?
  • Montrez que ce poème place Baudelaire au carrefour des courants romantique et symboliste ?
  • Comment Baudelaire parvient-il à relier le thème de la ville à celui de l'exil.

  1. Du tableau parisien à l’évocation du souvenir des exilés

        1.1. Le tableau d’un univers urbain qui se métamorphose

  • Constat des bouleversements dans l’urbanisme de la capitale : « Le vieux Paris n’est plus » (v.7) repris par l’exclamation du vers 29 : « Paris change ! » => constat formulé de manière brève et condensée, souligné par la ponctuation (fait écho aux vers 7 et 8) et mis en évidence par sa position en début de vers, référence directe aux grands travaux d’Haussmann qui bouleversent le paysage urbain.
  • Réalité prosaïque[1] de la ville changeante évoquée dans les strophes 3 et 8, par des accumulations qui amènent un mvt à rebours, du neuf vers l’ancien, du présent vers le passé, traduisant la nostalgie du poète.
  • De la strophe 2 à 4 : « le nouveau Carrousel » => « Le vieux Paris » qui ressurgit en souvenirs aux deux stophes suivantes « Je ne vois qu’en esprit » et « Là s’étalait jadis… »
  • « palais neufs, échafaudages, blocs / Vieux faubourgs » : énumération prosaïque avec un mouvement à rebours (du temps présent « neufs » vers le passé « vieux ») : ce mouvement prépare le surgissement des souvenirs des strophes qui suivent.
  • La réalité urbaine, est saisie dans son aspect éphémère. Elle laisse place au surgissement des « images » où se cristallisent les souvenirs. Contrairement au poème « Paysage » où le poète enfermé dans sa tour d’ivoire semblait fuir la réalité urbaine, le poète est ici descendu dans la rue (notez le démonstratif « ce Louvre » v.33), mais loin de se livrer à une description réaliste, la ville n’est ici qu’une porte ouverte vers l’ailleurs du souvenir (à l’image de la ville réelle se superposent les images que convoque le poète)

        1.2. La nostalgie[2] que suscite le constat des métamorphoses de Paris

  • L’anaphore « je pense » (v. 1, 34, 41, 51) structure le poème et indique le surgissement du souvenir. La déambulation spatiale se double d’une déambulation dans l’esprit du poète.
  • Les métamorphoses de Paris suscitent le regret et la « mélancolie » du poète (soulignée par la place du mot à la rime et la ponctuation qui souligne la force de l’émotion)

Aux changements de la ville que regrette le poète, celui-ci oppose la permanence de ses sentiments :

  • v.7-8 : commentaire du poète entre parenthèses, à partir du constat qui précède : la mise en relief de l'interjection « hélas» avant la césure insiste sur le sentiment de perte ressenti par le poète. => Posture très romantique de l'individu évoluant au sein d'un monde pour lequel il n'est plus adapté et vivant dans la nostalgie d’un passé idéalisé.
  • opposition « Paris change » / « rien […] N’a bougé » (v 29,30)
  • A l’énumération chaotique du vers 8/9 « palais neufs, échafaudages, blocs / Vieux faubourgs » succède l’ordre et la stabilité du vers 32 : 3/3/3/3 « Et mes chers / souvenirs / sont plus lourds / que des rocs » (l'expression « plus lourds que des rocs » connote l’éternel, l’immuable)

- Souvenir est source de douleur (cf. adjectif « lourd » du vers 32) et d’obsession => thème de la douleur

féconde = idée chère aux romantiques)

        1.3. Les différentes figures des exilés

  • La dédicace à Victor Hugo

Hugo exilé dans les îles anglaises de la Manche depuis 1852 suite à la publication du pamphlet « Napoléon le petit ». Un exil qui durera presque 20 ans…

  • La figure mythologique d'Andromaque.

Le poète avance par association d’idées : il explique dans les deux premières strophes comment la vue des changements du paysage parisien a fait surgir la figure mythologique d’Andromaque. Andromaque = double du poète dans la mesure où elle tente de retrouver le paysage de sa patrie perdue, de même que le poète en déambulant dans le Paris nouveau recrée par l'esprit le Paris ancien (l'apostrophe de ce perso souligne le sentiment de proximité ressenti par le poète). Dimension symbolique du miroir : « petit fleuve » miroir de la douleur d’Andromaque, elle-même miroir des sentiments ressentis par le poète.

Procédés soulignant la douleur dans les strophes 1 et 10 qui convoquent la figure d’Andromaque :

  • Sublimation de la douleur (v.3) : peut-être une des façons de comprendre également « le s Fleurs du Mal » (la souffrance, muse féconde du poète[3]) : 1er hémistiche, le sublime s’appuie sur une allitération en [m], tandis que le [d] et le [v], sonorités aux consonances plus dures insistent sur la souffrance du perso)
  • Strophe 10 : Mise en relief du nom d’Andromaque en tête de strophe, suite à un enjambement. Exclamation « hélas ! » traduisant la déploration +  ponctuation expressive et syntaxe hachée suggérant la douleur, la crispation.
  • le cygne qui s'est évadé de la ménagerie[4]

Animal mis en valeur par un effet d'attente (nombreux compléments intercalés avant le COD)

Figure allégorique de l'exilé : dans les strophes 5 et 6, le poète insiste sur l'inadaptation de l'animal à la ville (v.18 "pieds palmés" / "pavé sec" ; v.21 "baignait […]ses ailes / "dans la poudre")

; souffrance au vers 36 renforcée par allitération en [r] « rongé d’un désir sans trêve » et l’exclamation (exil dans un monde hostile qui n’est pas le sien)

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