Etude linéaire "A une passante"
Commentaire de texte : Etude linéaire "A une passante". Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Cécile Périn • 23 Octobre 2021 • Commentaire de texte • 1 525 Mots (7 Pages) • 421 Vues
Mouvement 1-Une scène d'apparition
Mouvement 2-La pause fatale
Mouvement 3-L'éternelle fugitive
On note que le titre «à une passante» est l'éponyme d'une dédicace
Mouvement 1 - Une scène d'apparition
Immédiatement au premier vers, le décor est planté avec le sujet « rue » qui marque la modernité du
poème. Puis l'auteur convoque le sens de l'audition avec les termes «assourdissante» et «hurlait» qui
ont une valeur paroxystique, ils marquent une intensité prononcée. On observe l'ambivalence de
l'adjectif, «assourdissante» qui porte le sème de la surdité due à l'exacerbation du son, une
ambivalence qui souligne la poétique de l'auteur basée sur l'antonymie. Cette convocation de
l'audition est réitérée par les allitérations en «» de «rue, assourdissante, autour, hurlait» qui produit
une sorte de ronronnement. La rue est personnifiée par l'utilisation du verbe « hurlait » à l'imparfait
à valeur durative ce qui semble donner un hurlement continu.
Le rejet du CCL «autour de moi» en milieu de vers, crée une sorte d'ilot où le poète paraît coupé du
monde, comme assiégé par cet hurlement continu.
Au vers 2, la gradation cataphorique «longue*, mince, en grand deuil » (* qui veut dire «grande»)
jusqu'à la périphrase métonymique «douleur majestueuse» qui représente la passante endeuillée,
convoque le sens de la vision par les formes évoquées et la couleur noire du deuil. Cette gradation
se présente tel un blason médiéval qui, d'une partie du corps, en une partie du corps, reprend de façon
mimétique le déplacement de la passante qui s'entraperçoit dans la foule et se rapproche. Cette
gradation produit aussi un effet de retardement, créant ainsi le suspens.
Au vers 3 enfin, le poète délivre l'information : «une femme passa». Le verbe au passé simple a une
valeur de brièveté ce qui souligne le caractère évanescent du moment, mais qu'immédiatement le
poète, fait perdurer avec l'ajout d'un complément circonstanciel de manière «d'une main fastueuse»,
ainsi que deux verbes au participe présent «soulevant, balançant». Ceci produit à la fois un sentiment
du temps qui s'étire et la vision d'un déplacement.
La valeur inchoative des verbes «soulevant, balançant» et le participe présent, marquent un rythme
itératif comme celui de la marche.
De même, les expansions du nom «femme» avec les adjectifs épithètes détachés «agile et noble» et
le complément de nom «avec sa jambe de statue» continuent un étirement élastique du temps. Cet
étirement est réappuyé par l' enjambement du vers 4 au vers 5.
Le champ lexical de la noblesse avec les mots «majestueuse, fastueuse, noble, statue» souligne la
dévotion du narrateur à une beauté aristocratique. Baudelaire critique d'art est sensible à la beauté
qu'il considère comme une part d'éternité.
Au vers 5, la métaphore de la jupe devenue piédestal par les termes «sa jambe de statue» renforce
cette vision d'une femme divinement belle, une muse inspiratrice d'œuvres.
Ce premier mouvement par les temps et aspects des verbes au temps à valeur durative et aspect
itérative ou encore par les expansions de nom en accordéon produisent à la fois une vision d'un
déplacement, d'un suspens et d'un temps de narration étendu à une scene.
Mouvement 2 - La pause fatale
Au vers 6, le lyrisme du poète, par l'utilisation des pronoms personnels «Moi, je» provoque comme
une scission. Face à cette étendue, cet étirement du temps et de l'action, la circonscription des
termes «moi» et «je» réitérée par l'adjectif « crispé» et la comparaison «comme un
extravagant* »(étymon « extra » qui veut dire «en dehors» et vagans p.présent de vagari qui veut dire
«errer») dénote une forme de solitude circonscrite qui s'oppose à l'étendue temporelle et l'étendue du
déplacement fluide de la femme.
* extravagant peut aussi souligner le dandysme du poète.
Le verbe «buvais» peut laisser penser que le narrateur était attablé à une terrasse de café, mais dans
le même temps, le narrateur boit du regard la femme, (locution verbale «boire qqun du regard» qui
veut dire « regarder amoureusement »). Le poète élide dans l'expression son œil et par métonymie,
le remplace par celui de la passante (vers 6 et 7 «Moi, je buvais[ ...]Dans son oeil[...]»). Ainsi, une
atmosphère dématérialisée, sans frontière entre le locuteur et la passante se forme, puis entre elle et
son œil métaphorisé en ciel avec au vers 7 « Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan,». Cette
atmosphère étendue, diffuse, ralentit encore l'instant du regard.
Les expansions de nom « livide » et « où germe l'ouragan » sont connotés péjorativement. Elles
rappellent d'un côté le manque de vie, de l'autre le chaos. Baudelaire affectionne l'esthétique
antonymique, et n'hésite pas à rapprocher les qualités d'Eros à celles de Thanatos. La frontière du
Bien et du Mal s'est évaporée dans cet œil amoureux. Il semble aimer à en mourir.
Cet aspect antithétique est répété dans le parallélisme coordonné au vers 8 «La douceur qui fascine
et le plaisir qui tue» ou encore dans le vers 9 « Un éclair .... puis la nuit ! ». les oxymores et antithèses
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