Regards et jeux dans l’espace
Chronologie : Regards et jeux dans l’espace. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Flog711 • 15 Octobre 2022 • Chronologie • 861 Mots (4 Pages) • 372 Vues
Saint-Denys Garneau fait entrer le Québec dans la modernité avec la parution de son recueil de poésie Regards et jeux dans l’espace en 1937. Cette œuvre moderne pour l’époque va à l’encontre du courant littéraire du terroir qui est très présent, notamment avec la parution du roman Menaud, maître draveur de Savard la même année. L’œuvre de Saint-Denys Garneau connaît donc une réception critique difficile à cause de la nouveauté des propos abordés. Dans le recueil de Saint-Denys Garneau, le poème liminaire et le poème «Accompagnement» révèlent l’essentiel de la proposition de l’auteur. On remarque notamment dans Regards et jeux dans l’espace qu’une grande importance est accordée à l’espace et aux regards que porte l’auteur sur lui-même.
Dans un premier temps, Saint-Denys Garneau accorde une importance particulière à l’espace dans lequel il plonge ses lecteurs. En effet, la manière dont il amorce son recueil de poésie avec le poème liminaire permet d’avoir une bonne idée de la façon dont l’auteur intègre un paysage à travers les vers. « Je ne suis pas bien du tout assis sur cette chaise / Et mon pire malaise est un fauteuil où l’on reste /[…] / Mais laissez-moi traverser le torrent sur les roches » (p.15). On peut constater un fort contraste entre le champ lexical de la première et deuxième strophe. En effet, on commence dans un environnement restreint où l’immobilité prend une place étouffante et cela se manifeste avec une métaphore à travers laquelle on comprend que la chaise et le fauteuil sont des objets totalement immobiles qui amènent à la mort. La deuxième strophe, quand à elle, transporte les lecteurs à l’extérieur dans une nature en mouvement symbolisée par un torrent. L’auteur n’est plus assis et désire bouger dans ce nouvel espace où le mouvement représente la vie. Le poème «Accompagnement» présente également un paysage où le mouvement est constant. En effet, quand l’auteur écrit « Mais je ne puis changer de place sur le trottoir /[…] / Sous les pieds d’un étranger qui prend une rue transversale.» (p.95-96), il définit l’espace qu’occupe le poème en situant l’action dans une rue. Dans cet espace défini, le mouvement prend de l’ampleur, car l’auteur déclare au début « Je marche à côté d’une joie » (p.95), puis il continue plus loin avec « Je sois porté par la danse de ces pas à côté de moi » (p.96). Dans cette métaphore, la «marche» devient une «danse» qui représente un mouvement plein de vie.
Dans un deuxième temps, l’auteur porte plusieurs regards sur lui-même au sujet de différentes décisions qu’il prend afin de changer pour le mieux. Dès le début du recueil de poésie, le poème liminaire illustre bien cela. « Immanquablement, je m’endors et j’y meurs.» (p.15), dit l’auteur pour souligner le fait qu’il est parfaitement conscient d’être en train de s’éteindre peu à peu. Il met l’accent sur son mal-être avec une gradation quand on passe de «je m’endors» à «j’y meurs» pour décrire son malheur grandissant. Il continue en disant « Mais laissez-moi traverser le torrent sur les roches » (p.15). L’auteur porte ici un regard lucide sur ce qu’il souhaite faire. En effet, cette métaphore représente sa volonté de se libérer de son immobilité et que pour être libéré, le chemin sera semé d’embuches avec le «torrent» et que ce sera aussi inconfortable que de marcher sur des «roches». Le dernier poème du recueil présente également le regard que porte l’auteur sur lui-même. «Je marche à côté d’une joie /[…] / D’une joie à moi que je ne puis prendre /[…] / Mais je ne puis changer de place sur le trottoir» (p.95). Il montre par là qu’il est curieux, mais adopte un regard conscient en sachant que même en essayant, il ne peut pas se mettre à la place de son autre soi qui est une meilleure version de lui-même. En effet, Il s’y résigne en disant « Je me contente pour le moment de cette compagnie » (p.95), mais il cherche toujours un moyen d’être au meilleur de lui-même afin qu’il puisse un jour devenir cette meilleure version de lui-même qui marche juste à côté. Pour Saint-Denys Garneau, c’est la poésie qui lui permet de faire cela.
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