Le Nudge

Le "nudge", littéralement "coup de pouce", se fonde sur l’économie comportementale (ou "Behavioral Economics") qui s’appuie sur plus de 40 ans de recherches académiques sur le processus de décision. La thèse majeure de Daniel Kahneman1 soutient l’irrationalité humaine par l’existence de nombreux facteurs d’influence du comportement dans leur prise de décision quotidienne, comme les biais cognitifs, les émotions, les interactions sociales, les contextes environnementaux. Contrairement aux autres, les biais cognitifs sont "prédictibles", et il est possible de transformer les connaissances sur ces raccourcis mentaux en action nudge. Un biais cognitif opère une distorsion dans notre manière de traiter l’information car nos capacités cognitives sont limitées et le surplus de l’information est permanent (nombreux stimulus). Tout cela rend le traitement de l’information perfectible. Les biais opèrent de manière rapide, automatique et ils sont quasi-irrépressibles chez tout le monde. Ils sont pourtant vitaux, et nous permettent de survivre, de prédire notre environnement pour naviguer plus rapidement dans celui-ci en généralisant les informations.

L’idée du nudge a été développée par Thaler et Sunstein dans leur livre en 2008 (édité en France en 20102). En comprenant mieux les comportements humains dans leurs dimensions rationnelles et irrationnelles, cette incitation douce permet de créer des actions plus efficaces pour encourager à moindre coût les gens à adopter le comportement souhaité. Pour aider les foyers à réduire leur consommation d’énergie, la société américaine Opower a modifié la facturation par courrier qui les informe sur leur consommation en y ajoutant une comparaison avec celle de leur voisinage. Si celle-ci est inférieure la moyenne, on vous félicite avec un "smiley", et dans le cas contraire, vous recevez des conseils pour vous améliorer. Dans le cas présent, le fait d’actionner le levier de la norme sociale à favoriser l’émulation chez les participants, et a permis d’économiser 250 millions de dollars tout en aidant les gens à passer d’un comportement actuel néfaste pour eux-mêmes, pour la collectivité et pour la planète, à un comportement désiré. C’est une approche multisectorielle qui peut favoriser un comportement plus écoresponsable, contribuer à une société plus collaborative ou encore permettre le changement dans l’entreprise. Elle peut agir sur la consommation en modifiant simplement la présentation. Une expérience s’est réalisée en 2009 dans la cafétéria d’une université américaine pour inciter ses utilisateurs à choisir des produits plus sains. Initialement situé dans un coin, l’emplacement du panier de fruits a été modifié puis relocalisé au niveau de l’entrée. Désormais à la vue de tous et plus facile d’accès, la vente de fruits a augmenté de 137%. Autre exemple, une simple gravure de mouche au fond des urinoirs publics de l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol a réduit les débordements de 80% et les frais d’entretien.

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