Quelle(s) compétence(s) stratégique(s) faut-il chercher à construire ? et comment la (les) construire ?
Analyse sectorielle : Quelle(s) compétence(s) stratégique(s) faut-il chercher à construire ? et comment la (les) construire ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar neworld • 26 Janvier 2015 • Analyse sectorielle • 8 887 Mots (36 Pages) • 836 Vues
INTRODUCTION
Qu’elle soit individuelle ou organisationnelle, la compétence est un sujet récurrent en stratégie comme en GRH depuis quelques années. En stratégie, elle se trouve étayée par des courants tels que la Resources-based View (RBV) qui, au moins dans un premier temps, prennent le contre-pied de l’approche classique (Porterienne) pour expliquer l’avantage concurrentiel d’une firme. Cet engouement pour la compétence n’a cependant pas permis de clarifier ce concept malgré le volume des publications qui y sont consacrées. De nombreux auteurs ajoutent un nouveau terme dans le champ mais peu tentent de structurer les apports antérieurs. De plus, la mode du recentrage sur le cœur de métier a poussé les dirigeants, les consultants mais aussi les chercheurs à surtout s’intéresser à l’identification des compétences ayant une valeur stratégique pour une firme, plutôt qu’à leur construction. Or, si l’on se réfère à la RBV, on admet que l’avantage concurrentiel d’une entreprise repose principalement sur des combinaisons de ressources constituant des compétences stratégiques. Dès lors, la construction de celles-ci devient un enjeu considérable pour l’entreprise et une problématique de premier ordre pour la recherche en gestion. Dans cette perspective, deux questions centrales se posent au dirigeant : quelle(s) compétence(s) stratégique(s) faut-il chercher à construire ? et comment la (les) construire ?
Dans ce papier, c’est avant tout sur la question du choix de la compétence stratégique à construire que nous nous penchons. L’étude de cas que nous présentons porte sur les quatre plus importantes entreprises de l’industrie dentellière de Calais (en termes de salariés et de chiffre d’affaires). Plus particulièrement, nous proposons d’observer la dynamique de constitution des compétences stratégiques dans ce secteur. Par cette étude empirique exploratoire nous avons mis à jour les mouvements stratégiques de ces entreprises au cours des vingt dernières années. Après avoir analysé comment ces derniers sont apparus dans le champ, nous proposons un modèle de dynamique inter-firmes de constitution des compétences stratégiques.
I. Les apports et les limites des approches « ressources » et « compétences » A. Lesapports
Au regard de la littérature, on peut constater dans la RBV, la volonté légitime des auteurs d’expliquer la création et la préservation de l’avantage concurrentiel. Ainsi, Durand (2001) relève que « de nombreux travaux ont montré le lien entre ressources et performances. En fait, la théorie suppose que les ressources sont directement liées à l’avantage concurrentiel qui, lui, impacte la performance ». Le principal apport de la Resources-based View et de ses
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prolongements repose donc sur l’éclairage supplémentaire qu’elle fournit quant à la création de rente par rapport à l’analyse Porterienne. Meschi (1997) semble aussi partager ce point de vue lorsqu’il affirme que la RBV met en avant « l’idée que le déterminant majeur du profit et de la croissance n’est pas tant la structure de l’industrie que la mobilisation et la combinaison astucieuse des ressources possédées par l’entreprise » (p.1).
Bien que la RBV soit couramment opposée à la perspective Porterienne, il semble plus pertinent de la positionner comme cadre d’analyse complémentaire comme le propose Puthod (1998). En effet, Porter aborde essentiellement la question de la performance des firmes par l’analyse des conditions externes. Porter et les auteurs s'inspirant des travaux de l'économie industrielle font l’hypothèse implicite que les firmes d’un même secteur doivent contrôler des ressources identiques. A l’opposé, en accordant une attention privilégiée aux ressources susceptibles d'être durablement hétérogènes, l'approche ressources, amorcée par Penrose (et le courant évolutionniste), marque sa différence avec l’analyse des structures sectorielles et tente de préserver l’équilibre environnement/entreprise caractéristique de la démarche LCAG.
Sur la base de la RBV, tout un courant que Tywoniak appelle « courant des ressources et des compétences » s’est constitué. Celui-ci place la notion de compétence stratégique au centre de l’avantage concurrentiel. Les travaux qui s’inscrivent dans ce courant sont nombreux ces dernières années à tel point que, comme le démontrent Priem et Butler (2001), la RBV tend à devenir un courant prépondérant en stratégie. Les auteurs ont en effet relevé les différents thèmes de recherche présents dans les contributions en stratégie mobilisant le « courant des ressources et des compétences ». Les sujets et programmes de recherches s’inscrivant dans ce cadre sont incontestablement nombreux et variés, mais aucun ne semble être consacré à la question de la construction (ou de la constitution) des compétences stratégiques.
La RBV et l’approche de l’économie industrielle peuvent être partiellement intégrées grâce au concept de capacités dynamiques. En effet, si l’on se réfère à la définition qu’en donnent Teece, Pisano et Schuen (1997), les capacités dynamiques consistent en une adaptation des compétences à un environnement évoluant rapidement. Dans une certaine mesure, on retrouve ici la logique de strategic fit de l’approche Porterienne soutenue par le courant des ressources et des compétences. Dans ce cas, la perspective compétence ne peut se limiter à une analyse interne de l’entreprise et doit nécessairement prendre en compte l’environnement. C’est pourquoi, nous suggérons que la relation entre les deux courants ne se limite pas à une complémentarité mais tend vers une intégration réciproque. Comme nous le verrons par la suite, cette approche intégrant la RBV et la perspective Porterienne est notre point de départ pour traiter de manière dynamique la constitution des compétences stratégiques.
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B. Les limites
Dans son article de 1999, Williamson remarque que «la recherche sur les compétences n’a curieusement pas fait l’objet d’une critique soutenue » (p.1093). L’auteur identifie pourtant trois limites principales au courant des ressources et compétences. La première concerne le caractère fréquemment tautologique des définitions des principaux concepts. La seconde est le manque d’opérationalisation du courant. Enfin, la troisième met en évidence le manque de considération du courant pour les questions de construction et de reconfiguration des compétences. On peut d’ailleurs se demander s’il n’existe pas un lien de causalité entre ces trois limites.
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