La fabrique de la famine : les paysans face à la mondialisation Walden Bello
Fiche de lecture : La fabrique de la famine : les paysans face à la mondialisation Walden Bello. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Margolette • 4 Décembre 2018 • Fiche de lecture • 2 327 Mots (10 Pages) • 660 Vues
La fabrique de la famine : les paysans face à la mondialisation
Walden Bello
L’ouvrage de Walden Bello traite de la crise alimentaire mondiale tout en s’interrogeant sur le devenir de l’agriculture paysanne sous un régime mondialisé de production capitaliste. Autrement dit, quelle est la part de responsabilité des politiques néolibérales dans la destruction des systèmes agraires ?
La thèse de l’ouvrage se résume ainsi : la doctrine néolibérale qui prône la réalisation d’un mode de production capitaliste au détriment de la production paysanne, érode les agricultures en place. La crise alimentaire mondiale serait donc le résultat d’une restructuration libérale de l’agriculture dans les pays en développement. La doctrine néolibérale est destructrice de l’agriculture. C’est une crise de production due à l’éviction des paysans par l’agriculture capitaliste qui a conduit à la crise alimentaire. Le capitalisme est devenu le mode de production dominant dans le secteur de l’alimentation mondiale. La production paysanne composée d’exploitations familiales dont les denrées produites le sont essentiellement pour leurs propres besoins mais dont les denrées excédentaires sont commercialisées, est assujettie au mode de production capitaliste. La thèse de l’auteur se décompose en 3 arguments : d’abord, les politiques néolibérales transforment des pays exportateurs nets en pays importateurs nets (I). De plus, les politiques en matière d’agrocarburants mettent en péril la sécurité alimentaire (II). C’est pourquoi, le modèle de la souveraineté alimentaire doit être choisi au détriment du mode de production capitaliste (III).
I. Les doctrines libérales destructrices des modèles agraires locaux : la transformation de pays exportateurs nets en pays importateurs nets sous l’effet des PAS et des accords de libéralisation
Suite à la mise en place du système de Bretton Woods, la question du devenir des petits exploitants sous ce régime se posait. Le régime Bretton Woods s’est développé différemment selon les régions du monde. Dans le Sud, il se traduit par le desarrollismo, une politique de substitution aux importations. La Banque mondiale cherche à développer « la productivité des pauvres ». Afin d’élever la productivité rurale, la subvention de l’achat des semences, d’engrais et de pesticides est la solution. Cette politique échoue et laisse place, dès les années 1980, aux plans d’ajustements structurels, généralisés aux pays du Sud. L’idéologie néolibérale vise l’efficacité des économies. L’idée est donc de réduire les dépenses publiques de l’Etat en question afin que ce dernier accumule un maximum de devises étrangères nécessaires au remboursement de sa dette extérieure. L’auteur postule que l’ajustement structurel assujettit les campagnes face aux productions capitalistes. Un changement crucial opère dans des économies du Sud : des pays, auparavant exportateurs nets de denrées alimentaires deviennent importateurs nets. Ce qui a entrainé ce changement déterminant n’est autre que l’ajustement structurel mis en place par la Banque Mondiale. Il se produit alors une « dépaysannisation » : l’élimination progressive du mode de production paysan. Pour démontrer cet argument, il prend l’exemple du Mexique, des Philippines et du continent africain qui étaient exportateurs nets pour certaines cultures et qui, suite aux ajustements structurels et aux politiques de libéralisation, sont devenus importateurs nets. Les pays en question ne sont plus autosuffisants pour nourrir leur propre population et doivent donc importer. Le processus débute avec la crise des dettes. Pour obtenir l’argent nécessaire pour rembourser leur dette externe, les pays bénéficient de l’aide du FMI et de la Banque Mondiale. En échange des liquidités nécessaires, les pays doivent accepter un fort interventionnisme de la part des institutions multilatérales. L’idée principale de l’ajustement structurel est de consacrer un maximum de ressources au remboursement du service de la dette extérieure au détriment des dépenses publiques de base. En poussant le pays à exporter plus, l’idée était de lui permettre d’acquérir les dollars nécessaires au remboursement. L’axe majeur de l’ajustement structurel est la transformation de l’agriculture ainsi que le désengagement de l’Etat. L’Etat est contraint de réduire massivement ses investissements publics et des politiques de libéralisation du commerce extérieur sont menées.
L’adhésion du Mexique à l’OCDE en 1993 a ravagé le secteur du maïs, notamment avec l’ALENA. Les Etats-Unis pratiquent une politique de dumping ayant pour conséquence une invasion du maïs américain sur le sol mexicain. Les politiques néolibérales ont eu pour objectif la transformation capitalistes des campagnes. Ces objectifs étaient totalement contraires à ceux menés par le PRI dans le milieu rural dans les années 1990. Du fait des politiques néolibérales, 15 millions de paysans ont été évincés. Le rapport CARNEGIE souligne que les importations américaines de denrées agricoles ont conduit 1,3 millions de paysans à arrêter leurs activités. Les années d’ajustements structurels et de libéralisation de l’économie ont fait des ravages : migration vers le Nord, trafic de drogue ; elles ont transformé un pays exportateur en un pays importateur de maïs. Concernant les Philippines, elles se retrouvent face à un déficit de riz. Aujourd’hui, ce pays dépend massivement des importations : en effet, il doit importer du riz pour les besoins de son propre pays. Le riz était avant tout une culture nationale. Un faible pourcentage de production était vendue à l’international. Le plan d’ajustement structurel a assujetti le pays en réduisant massivement les dépenses de l’agriculture, qui chutent de moitié en 1988. L’Etat ne peut plus soutenir les petits producteurs. L’agriculture paysanne est livrée à elle-même. L’adhésion à l’OMC en 1995 n’a fait qu’aggraver la situation économique. En conséquence, le pays doit supprimer d’importants quotas sur les importations agricoles.
Alors que dans les années 1960, l’Afrique était autosuffisante et exportateur net, aujourd’hui, elle importe 25% des denrées alimentaires. De 1970 à 1973, l’Afrique subsaharienne connait une croissance « vigoureuse ». Ce qui l’explique est le soutien ferme de l’Etat à l’agriculture avec des subventions sur les engrais et les semences. Cette ère agricole prend fin avec le rapport Berg qui discrédite les politiques de développement menées auparavant par les gouvernements africains. La doctrine libérale prévoyait
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