Maltraitance

La maltraitance, ce fléau qui affecte des milliers d'enfants au Québec et fait l'objet de plus de 60 000 plaintes à la Direction de la protection de la jeunesse chaque année, a 1000 visages. Négligence, violence, silence: autant de réalités que décrivent chacune à sa façon une trentaine de personnalités, dans le recueil de textes La maltraitance: une réalité qui bouleverse, publié aux Éditions du CHU Sainte-Justine.

Ce recueil de témoignages, qui rallie autant les voix de cliniciens que celles de penseurs, de poètes et d'écrivains, aborde d'un point de vue tantôt scientifique, tantôt strictement émotif et personnel, cette violence tue dont ils ont été témoins ou victimes.

L'ouvrage, illustré de magnifiques photos d'enfants du monde entier par la photographe Nancy Lessard, s'ouvre par une mise en perspective du phénomène de la maltraitance des enfants au Québec par le Dr Gilles Julien, neurologue pédiatre au CHU Sainte-Justine et ardent défenseur de la cause des enfants.

Les chiffres, encore une fois, bouleversent. Environ 22 enfants sur 1000 sont victimes de sévices physiques, psychologiques ou sexuels, ou encore de négligence. Pourquoi? C'est la question à laquelle tous les collaborations tentent de répondre, chacun à sa manière.

«La maltraitance a toujours fait partie de l'inhumanité des humains», souligne Jean-Marc Potvin, directeur de la Protection de la jeunesse et directeur de l'Institut universitaire du Centre jeunesse de Montréal. «Maltraiter, c'est parfois trop couver, étouffer, écraser», souligne Marie-Claude Béliveau, orthopédagogue et psycho-éducatrice à Sainte-Justine. Mais trop souvent, la maltraitance découle d'une indicible indifférence, comme le souligne si bien Germain Duclos, orthopédagogue et auteur. Trop de parents crient tout simplement absents, parce que trop occupés par leur carrière. «Négliger, c'est aussi ne pas donner. C'est aussi s'éloigner, être seul et donner naissance à une nouvelle solitude», souligne-t-il.

Certains voix se font plus personnelles, comme ce témoignage de Josée Blanchette sur la douleur causée par ceux-là mêmes qui nous aiment. «On ne peut pas empêcher un petit coeur d'aimer, même son geôlier», écrit-elle. Au fil des pages s'enfilent des témoignages émouvants, comme celui de Joe Bocan, à qui les confidences reçues d'une fillette de quatre ans a inspiré une chanson, et une lettre de Marie Laberge, dédiée à celui qui s'est tu, ou un poème de Gilles Vigneault.

Bref, un ouvrage qui illustre de façon sentie l'emprise de la violence faite aux enfants dans notre société ainsi que son incidence sur la vie de plusieurs grands enfants qui en portent encore les marques.

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