Distance thérapeutique
Analyse sectorielle : Distance thérapeutique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar RimbaudWave • 7 Janvier 2019 • Analyse sectorielle • 2 447 Mots (10 Pages) • 742 Vues
Analyse de pratique professionnelle
- Situation d’appel
Procédural : « comment j’ai fait ? »
Le contexte : « avec qui, quand, où ? »
Les intentions : « dans quel but ? »
Je suis en seconde année de formation en soins infirmiers. Cette analyse de pratique a été faite lors de ma troisième semaine de stage réalisé en CMP[1]. J’aborde donc le domaine de la psychiatrie. Mon travail s’intéresse à un entretien infirmier à travers l’approche proxémique du patient. L’entretien infirmier est un soin fondamental en santé mentale dans le domaine extrahospitalier. Lors de ce soin, j’ai participé à la préparation de la moitié d’un pilulier avec une patiente.
Âgée de 38 ans et atteinte de troubles dépressifs récurrents[2], couplés à des symptômes psychotiques[3] (troubles hallucinatoires visuels), Mme B. se rend toutes les deux semaines environ au CMP afin d’échanger avec son infirmière de suivi référente sur l’évolution de ses troubles, la gestion de sa vie quotidienne et ses projets, ses humeurs et ressentis, le vécu de sa maladie et son adaptation au traitement associé. Elle est suivie par cette infirmière référente depuis X temps. L’infirmière ne prend pas de notes durant l’entretien, favorisant l’expression spontanée, une base en psychiatrie. Il s’agit aussi de préserver un lien social supplémentaire. Enfin, elle réalise avec l’infirmière deux semainiers de ses traitements quotidiens, au regard de la prescription médicale actuelle. Celui-ci est vérifié et approuvé par la patiente et l’infirmière. Il peut alors être décidé de réévaluer le délai entre chaque entretien pour changer le nombre de jours de traitements à préparer en pilulier. La patiente repart ainsi avec ses piluliers à son domicile : elle est autonome dans la prise de son traitement au quotidien et observante. Le but d’un tel soin est de faire de l’éducation thérapeutique, de favoriser l’observance et l’alliance thérapeutique, de refaire le point ou réajuster le traitement en cours (efficacité et effets secondaires). Lors du rendez-vous en question dans l’un des bureaux de consultation infirmière, l’infirmière référente était présente. La patiente a d’abord accepté que je puisse assister à l’entretien. Après des échanges d’une demi-heure, j’ai pu constater qu’elle était plutôt d’un bon contact et avenante. En règle générale, comme pour chaque patient, j’attendais de voir, observer, écouter et découvrir avant de m’impliquer dans le dialogue. Mme B. a verbalisé que tout allait bien d’ailleurs, en dépit du fait qu’une douleur estimée à 0,5 sur 10 était ressentie. J’ai pu co-participer à l’entretien en lui posant quelques questions sur ses occupations professionnelles notamment. Mme B. travaille comme assistante des services hospitaliers dans un foyer pour religieuses. L’infirmière m’a alors demandé d’aider Mme B. à préparer son pilulier sur le bureau. Mme. B. est traitée par antipsychotiques, anxiolytiques et antidépresseurs oraux. Elle a également un traitement anticholinergique afin de prévenir les effets extra-pyramidaux de ses médicaments neuroleptiques.
Plutôt confiant et au vu du contexte apaisé de l’entretien, je me suis donc rapproché de la patiente instinctivement afin d’être plus à l’aise pour ce soin. Il fallait amener un climat de confiance en plus en me rapprochant d’elle pour lui montrer que j’étais véritablement impliqué avec elle dans ce soin. Je suis donc placé au bout du bureau entre l’infirmière et Mme B. afin d’avoir une visibilité sur l’écran d’ordinateur où était inscrite la prescription, et également de pouvoir capter le regard des deux personnes. Nous débutons chacun la préparation d’un semainier. Spontanément, Mme B. se met à changer d’attitude dès que je rapproche mes mains de sa zone de préparation de son pilulier afin de comparer le mien. Son tempérament jovial et gai de la phase de pur entretien laisse place à une crispation au visage, un regard figé qui par moment me fixe, une certaine méfiance dans l’expression émotionnelle. Sa voix devient plus monocorde et elle parle de façon plus hésitante en continuant de me jeter des coups de regard, laissant transparaître une crainte. J’essaie de garder une position adéquate en gardant la bonne distance, ressentant de la peur chez elle, comme une attaque de ma part. J’essaie aussi de recentrer le malaise sur le soin en lui-même avec l’infirmière en reparlant du pilulier et sollicitant la patiente pour qu’elle constate si le mien est correctement fait selon elle. J’en profite pour reprendre ma place initiale aux côtés de l’infirmière. Je sens malgré tout qu’une barrière a été percée chez la patiente ; elle ne se comportera plus jamais de la même manière avec moi jusqu’à la toute fin de l’entretien. Ce changement de comportement s’accompagne aussi d’un discours un peu plus sec et froid de sa part. J’ai vraiment eu l’impression que Mme B. se révélait sous un tout autre jour ou qu’une partie de sa maladie se manifestait, depuis le début de l’entretien où elle paraissait stable psychiquement. Au terme de l’entretien, elle me serre la main d’elle-même. Nous convenons d’un prochain rendez-vous avec son infirmière référente.
- Ressenti
Les émotions : « qu’est-ce que j’ai ressenti ? »
Dès ma première semaine au CMP, j’ai pu participer à des entretiens avec les référentes des patients, aux réunions pluridisciplinaires (médecins, infirmières, psychologues, assistantes sociales et secrétaires médicales) et aux soins ambulatoires (injections intramusculaires de traitements neuroleptique retard). Le CMP couvre un champ psychanalytique. Mon appréhension de cette discipline était immense pour moi avant le stage, car je n’en connaissais que l’aspect théorique vu en première année, et qui m’avait paru très abstrait. Mais les premiers entretiens m’ont tout de suite permis de comprendre les enjeux de la prise en charge spécifique du CMP, en étant observateur et attentif. Les infirmières parlent généralement peu pour laisser un espace de parole suffisamment important au patient. Elles ne prennent effectivement pas de notes sauf pour marquer des informations importantes comme des prises de rendez-vous. Les dossiers des patients que j’ai eu sous les yeux dans certains stages n’étaient pas forcément à même de me renseigner totalement sur les axes de soins à mettre en place ou sur le contexte. Au CMP, lors des entretiens, certains patients ne prononçaient que peu de mots. Je ne voyais pas non plus nécessairement de réaction de la part des infirmières référentes, tout du moins, je ne les percevais pas si bien, malgré les phases de débriefings qui suivaient chaque entretien. Malgré l’enthousiasme des infirmières, j’essayais d’adhérer mais je n’y parvenais pas toujours. Le soin que je décris m’a laissé dubitatif car je n’ai pas compris réellement pourquoi la patiente s’est tout de suite braquée. Je me suis aussi demandé pourquoi l’infirmière n’a pas noté ce point dans le logiciel de transmissions. Et comment pouvais-je aborder ce changement de comportement autrement. La méthode, qui est la psychanalyse, je l’entendais, mais pour ce problème, je n’en percevais pas forcément l’intérêt. De plus, j’ai eu l’impression par moment que ces entretiens étaient adossés sur rien ou très peu de choses que je connaisse jusque-là.
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