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La Genese De L'etat Moderne

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Par   •  11 Avril 2014  •  4 791 Mots (20 Pages)  •  1 471 Vues

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« L’État moderne », de sa constitution entre le XVIe et le XVIIIe siècles jusqu’à la mondialisation et à la crise des États

1. LES CONFLITS INTERIEURS ET INTERNATIONAUX IMPLIQUANT LES MONARCHIES EUROPEENNES PRECIPITENT LA FORMATION DE L’ETAT NATIONAL MODERNE SUR LES DECOMBRES DE LA CHRETIENTE MEDIEVALE. LA PHILOSOPHIE POLITIQUE, A PARTIR DE MACHIAVEL OU DE HOBBES, PREND ACTE DE CETTE TRANSFORMATION.

1.1. La genèse du concept moderne d’État accompagne la naissance d’une entité politique nouvelle, entre la fin du Moyen Âge et la Révolution française.

Le type de pouvoir qu’il est convenu d’appeler « l’État moderne », et qui s’oppose nettement aux monarchies traditionnelles de l’Europe médiévale, est apparu progressivement et s’est consolidé du XVIe au XVIIIe siècle, si bien que l’État monarchique de Louis XVI possède une légitimité et des structures fort différentes de celui de François Ier. À bien des égards, les actuels États-nations de l’Europe occidentale sont encore les héritiers de cette mutation fondamentale, qui ne s’est produite que bien plus tard sur les autres continents, souvent, du reste, à la suite de fortes influences européennes. Cette mutation a été pensée et menée à bien par des philosophes politiques et des gouvernants de premier plan, généralement dénués de scrupules, mais parfois doués d’une grande subtilité, qui ont réussi à imposer un raisonnement et une pratique fondée sur la « raison d’État ». Parmi les principales figures, on citera le cardinal de Richelieu, Mazarin, Louis XIV, Frédéric II de Prusse, et, chez les penseurs, Machiavel en Italie et Hobbes en Angleterre.

L’État, en tant que communauté politique rassemblant des gouvernés sous une même autorité, existe certes depuis l’Antiquité. Néanmoins, l’État moderne est qualitativement différent des formes politiques qui l’ont précédé. Il exprime l’aspiration à un pouvoir rationnel, organisé, dans un cadre géographique limité par l’existence d’autres États de même nature à ses frontières. En même temps, il est à lui-même sa propre finalité : il est beaucoup moins tributaire d’une légitimation religieuse que ne l’étaient les monarchies chrétiennes médiévales, les monarchies du monde musulman ou même les empires chinois ou japonais de la même période. Ce qui est essentiel aux yeux des théoriciens et des dirigeants de cet État, c’est sa capacité à faire régner l’ordre sur son territoire, à garantir à ses ressortissants une sécurité minimale pour leur personne et leurs biens, à assurer enfin dans l’ordre international sa souveraineté et sa puissance à l’encontre des ambitions des autres États. Il se distingue ainsi clairement de l’idéal des monarchies universelles incarné par l’Empire romain au faîte de sa puissance, mais aussi par son successeur chrétien le Saint-Empire romain germanique. L’idéal religieux, le rêve d’un ordre à la fois moral et universel s’estompent devant la notion de l’intérêt particulier du royaume dont on est issu et dont le monarque doit assurer la cohésion contre toutes les tendances centrifuges qui menacent son autorité, en particulier depuis les guerres de religion du XVIe siècle. De manière significative c’est alors qu’apparaissent le terme même d’« État », ainsi qu’une conception de sa nature et de sa place dans la société qui ne sont pas très éloignées des nôtres – même si la notion d’une autorité démocratique en est absente à l’origine. Les périodes précédentes utilisaient le mot latin de res publica (la « chose publique »). On est passé progressivement de l’expression status rei publicae (« la situation des affaires publiques ») au concept de status tout court (correspondant à celui d’État en français, de state en anglais et de stato en italien). Par exemple, Thomas More, chancelier du roi Henri VIII avant d’être condamné à mort par lui pour avoir refusé d’abjurer le catholicisme, a écrit son ouvrage politique majeur, l’Utopie, en latin (il sera traduit en anglais après sa mort). Or, d’après son titre, cette Utopie porte bien de optimo rei publicae statu , sur « le meilleur état des affaires publiques », c’est-à-dire l’État idéal et la société idéale.

1.2. L’État moderne s’impose dans une période conflictuelle et troublée, où l’idéal médiéval d’unité du monde chrétien n’est plus d’actualité.

Toutefois, l’État moderne n’est pas né de la poursuite d’un idéal moral, ou religieux, mais bien d’une démarche réaliste visant à consolider l’ordre et la souveraineté. Dès l’origine, en effet, les royaumes de France ou d’Angleterre, par exemple, se distinguent de la monarchie chrétienne universelle qui s’incarne dans l’idée d’empire. Le roi est certes « empereur en son royaume », selon la formule des légistes médiévaux, mais il doit défendre son territoire contre les ambitions des autres rois ou grands seigneurs voisins. Par conséquent, il doit chercher à consolider et à accroître son pouvoir plutôt qu’à mettre en oeuvre une morale religieuse préétablie, comme le modèle idéal de l’empereur chrétien l’y aurait incité. En France, Saint Louis est probablement le dernier monarque qui ait paru inspiré avant tout par l’idéal de la royauté chrétienne, alors que ses successeurs, notamment Philippe le Bel, ont affirmé leur puissance au plan séculier en n’hésitant pas à affronter l’ordre des Templiers ou même la papauté. Par la suite, le royaume de France n’a pu apparaître comme l’une des principales puissances de l’Europe, à l’époque moderne (du XVIe au XVIIIe siècle, selon le découpage chronologique des historiens) qu’après avoir surmonté la terrible crise de la guerre de Cent Ans, où s’additionnaient un péril extérieur anglais et le risque de dissolution lié à l’action centrifuge de grands féodaux comme le duc de Bourgogne.

C’est donc en surmontant les oppositions par la force que l’État moderne accroît son autorité et sa puissance, qui deviennent, avec le temps, des fins en soi. Cette notion d’un État qui n’existe pas comme une simple composante d’un ordre juste voulu par Dieu, mais qui doit survivre à de nombreuses crises et révolutions, est au coeur de la pensée politique de Nicolas Machiavel, un Florentin qui a personnellement traversé les nombreuses vicissitudes des affrontements civils dans une cité d’Italie centrale entourée de voisins menaçants. Son oeuvre majeure, Le Prince, montre comment un chef d’État peut faire face à ces périls en s’inspirant des exemples du passé ; la même approche est développée plus en détail à propos de l’histoire de la république

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