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Observation et clichés

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Par   •  21 Janvier 2015  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 343 Mots (6 Pages)  •  796 Vues

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Constat et clichés

Sorti en 2011, le Temps de l’Afrique, écrit par Jean-Michel Severino, directeur de recherche à la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (FERDI), et Olivier Ray, économiste à l’Agence France de Développement (AFD), recèle une mine d’informations pour comprendre l’évolution actuelle de ce continent si vaste, si divers, mais traînant toujours à sa suite quantité de clichés. En particulier, l’ouvrage étudie la question de la croissance, demandant pourquoi l’Afrique ne s’est pas développée plus rapidement après l’indépendance à l’instar d’autres pays d’Asie et d’Amérique latine.

« Durant les années 1970-1980, alors que l’Amérique latine et l’Asie de l’Est connaissaient respectivement des croissances de 2% et 5%, le niveau de vie par habitant stagnait en Afrique. […] Le niveau de vie d’un Subsaharien est en moyenne trois fois plus faible que celui d’un asiatique, et quatre fois inférieur à celui d’un Latino-Américain. Son espérance de vie, en recul par rapport aux années 1980, atteint tout juste 47 ans, soit vingt-quatre ans de moins que celle d’un habitant d’Asie de l’Est et trente-deux ans de moins qu’un ressortissant d’un pays de l’OCDE. »

Les auteurs commencent tout d’abord par évoquer une malédiction imaginaire pouvant s’exprimer sous trois formes différentes. La première hérite de thèses aristotéliciennes dont Montesquieu se fit l’écho amplificateur : le climat. La seconde insiste sur la continuité du drame colonial, portée en particulier par l’économiste argentin Raul Prebisch qui avait théorisé la dégradation des termes de l’échange, affirmant que l’enrichissement des pays riches était inversement proportionnel à celui des pays pauvres. Une interprétation de cette analyse amena à remettre en question le bienfondé de l’aide internationale. La troisième et dernière forme de la « malédiction introuvable » concerne les aspects culturels, décrivant l’Afrique comme rétive au progrès, incompatible avec le développement économique.

Début de décollage après l’indépendance

Une fois ces clichés évoqués, Severino et Ray retracent les faits marquants qui expliquent de manière plus objective pourquoi l’Afrique n’a pas décollé économiquement après l’indépendance. Il convient déjà de rappeler qu’au cours des années 1950-1960, les espoirs des nations nouvellement libres laissèrent libre cours à l’organisation d’Etat centralisés « en parfaite cohérence avec les théories économiques dominantes de l’époque ». Le rattrapage économique battait alors son plein « si bien que la croissance atteignait 4,6% par an en moyenne de 1960 à 1973, bien au-dessus de la croissance démographique ». Les inquiétudes de l’époque en matière de développement se focalisaient alors plutôt en Asie hors Japon.

Ce début de décollage s’effectua dans un climat néocolonial où l’indépendance était toute relative : « outre une tutelle politique de fait, accordée à celle-ci (l’Afrique) par un ensemble de traités militaires, la France exerçait une tutelle monétaire sur une bonne partie du continent par l’intermédiaire du franc CFA – géré depuis Paris». Sur le plan économique, les anciennes métropoles avaient légué aux nouveaux Etats une organisation orientée exclusivement vers l’exportation de produits primaires : cacao, café, coton, hydrocarbures et minerais. Rien ne fut mis en place pour détourner les pays africains de cette économie rentière, au contraire : la libéralisation des droits de douanes s’accompagna de prix garantis.

Cette spécialisation héritée de la colonisation empêcha le développement d’une agriculture vivrière. « Encouragés par une monnaie surévaluée dans l’essentiel du continent, les Etats africains ont continué à importer leur nourriture de l’extérieur ». « La jeune industrie subsaharienne luttait quant à elle contre un environnement peu propice à son envol : faiblement compétitive internationalement du fait de coûts de transports élevés, d’une main-d’œuvre peu productive et de la surévaluation des taux de change, elle ne pouvait compter sur le marché africain pour autant ».

Autres éléments qui ne favorisèrent pas le développement d’une industrie diversifiée : la taille du secteur public et la corruption. S’appuyant sur les théories keynésiennes ou socialistes en vogue, l’objectif officiel était de participer à l’émancipation des africains par l’éducation et l’industrialisation. Concrètement, plutôt que redistribuer l’argent, les politiciens l’utilisèrent pour s’accrocher indéfiniment au pouvoir en achetant des soutiens, tel Houphouët-Boigny, ou pour s’enrichir personnellement.

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