Les représentants sont-ils représentatifs ?

Les représentants sont-ils représentatifs ?

Introduction

 « Ah ça ira, ça ira, ça ira, les aristocrates à la lanterne, ah ça ira, ça ira, ça ira, les aristocrates on les pendra ! ». Cette chanson de 1789 illustre bien la manière dont la Révolution Française se fixe pour but d’abolir les distinctions entre les citoyens au profit de l’égalité et ainsi, d’abandonner une conception de classe où l’aristocratie domine. Pour des raisons pratiques évoquées hier, les Révolutionnaires décident de mettre en place un régime représentatif. Celui-ci est défini comme dans un régime qui reconnaît à une Assemblée le droit de représenter la nation dans son ensemble. De plus, la volonté des citoyens s'exprime par l'intermédiaire de représentants élus qui incarnent la volonté générale en votant les lois et éventuellement en contrôlant le gouvernement. Notre régime actuelle, la Vème République, est d’ailleurs construite selon cette logique : c’est ainsi que tous les cinq ans, nous participons en tant que citoyens français aux choix de nos représentants, les députés, qui siègent à l’Assemblée Nationale. Ils sont ainsi élu afin d’être nos porte-paroles et les défenseurs de nos intérêts. Dans cette logique, il convient de savoir si la diversité de la population française est représentée aux travers de nos élus, que ce soit en terme de classe sociale, d’âge ou de niveau d’instruction. Ainsi, la représentativité s’inscrit dans la continuité de sa définition statistique soit, la qualité d'un échantillon à représenter, par ses caractéristiques, l'ensemble de la population dont il est extrait. Ainsi, par exemple, la représentativité parfaite de la population à l’Assemblée Nationale serait un échantillon réduit de la société selon ses caractéristiques économiques et sociales.

Pourtant, en 2012, aucun député n’est ouvrier à l’Assemblée Nationale. Nos élus sont-ils alors toujours représentatifs de la société ? Il tient donc de se demander qui sont ces citoyens qui nous gouvernent et d’étudier leur représentativité. Il s’agit de comprendre si leur identité met en péril le régime représentatif et si nous nous sommes réellement détachés de cette aristocratie que nous avons voulu abolir. L’aristocratie est défini comme un forme de gouvernement dans lequel le pouvoir est détenu par un petit groupe de personnes constituant l'élite. C’est donc dans cette interrogation que Daniel Gaxie, professeur de Science Politique à la Sorbonne, publie en 1980 notre texte de référence : « Les logiques du recrutement politique ». Il cherche ainsi à expliquer et analyser qui sont nos représentants, afin de comprendre si le pouvoir représentatif est détenu par un petit groupe privilégié et nous rapproche ainsi d’une aristocratie. Dès lors il convient de s’interroger pour savoir si la Vème République est une forme de gouvernement aristocratique. Afin de répondre à cette question, nous chercherons en quoi le champ politique donne une apparence réelle mais assez limitée du miroir de la société, puis dans un second temps, que le pouvoir est en réalité monopolisé par une minorité qui ne représente le reste de la population que par ricochet.

Problématique: La Vème République est-elle une forme de gouvernement aristocratique ?

1. Le champ politique comme miroir de la société : une apparence assez limitée

1. La représentativité des élus à différentes échelles, faible mais réelle

1) Vue d’ensemble de l’AN : les CSP au sein de l’AN sont diverses et ce tout au long de la Vème République (sauf en 2012 où il y 0 ouvriers) → étude de Luc ROUBAN : entre 1958 et 2007 toutes les CSP ont été représentées à l’AN • Luc ROUBAN montre aussi qu’il y a une assez large distribution des diplômes à l’AN pendant cette période. En 2007, les écarts de pourcentage ne sont pas si grands entre Sciences Po Paris et diplôme professionnel (12% contre 9,7%) ni entre juste le baccalauréat et Science Po Province (6,7% contre 3,8%) → pas de si grand écart entre les formations prestigieuses et celles qui le sont moins

• Le pourcentage de femmes députées a fortement augmenté entre 1958 et 2007 passant de 1,2% à 17,6%. Visible surtout dans les partis de gauche : 2007 26% des députés du PS sont des femmes, 22% pour le PCF contre 3% pour le centre. + loi en 2000 qui impose un accès égal des femmes et des hommes aux mandats électoraux donc partis obligés d’inscrire autant de femmes que d’hommes sur les listes → effets probants : communes de plus de 3 500 habitants, 27% -> 47,5% ; conseils régionaux : après les élections de 2004, 27,5% -> 48%

2) Les élus locaux : Étude de Michel KOEBEL, « élus locaux sont les mandataires les plus appréciés des Français ». Par rapport aux députés, représentent souvent mieux le peuple au niveau :

• Des CSP : dans les villes de moins de 500 habitants, conseillers municipaux employés et agriculteurs exploitants sont plus présents que les conseillers municipaux cadres et professions intellectuelles supérieures → donc là où la population agricole est la plus présente c-à-d loin des grandes zones urbaines c’est aussi là qu’il y a la plus grande part de conseillers municipaux agriculteurs. Inversement, plus la taille de la ville augmente plus la part des conseillers municipaux cadres et professions intellectuelles sup augmente → les grandes villes concentrent les fonctions intellectuelles de gestion et de décision et sont aussi les villes où il y a une forte proportion de conseillers municipaux des classes supérieures. → représentativité plutôt forte dans les conseils municipaux en terme de CSP Part des maires agriculteurs entre 1983 et 2008 a bcp baissé, tout comme la part des agriculteurs dans la pop française ; inversement pour les cadres et professions intellectuelles sups

• De l’âge : jeunes et seniors très actifs dans certaines fonctions municipales → 2008, parmi les 18-29 ans aux conseils municipaux, 94% sont conseillers municipaux et parmi les 80 ans et plus, 70% le sont.

1. Le rôle du PCF : de la lutte des classes à la lutte politique

1) La représentativité globale qui peut être perçue chez nos représentants ne se vérifie pas totalement au sein même des partis politiques. En effet, Daniel Gaxie écrit : « Le PCF est le seul parti représenté au Parlement au sein duquel les classes populaires bénéficient d’une aussi large représentation, où les classes moyennes soient constamment plus nombreuses qu’elles ne le sont dans l’électorat et ou les classes supérieures soient si faiblement surreprésentées ».

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