L’État est-il une construction moderne

L’État est-il une construction moderne ?

N'est il pas d'actualité aujourd'hui d'allumer sa télévision à 20H et qu'une fois devant le journal télévisé d’entendre toutes les mesures et décisions que l’État aura annoncé prendre dans la journée ? Puis de commenter, discuter et critiquer en famille les agissements de l’État, véritable figure toute puissante du pouvoir suprême contemporain. En effet, la conception moderne de l’État, et particulièrement en France, a tendance à définir l’État comme un bloc homogène et uniforme qui serait la seule forme de pouvoir politique existante à travers le monde. De plus, en dehors de cette prétendu universalité on aurait tendance à penser que l’État a toujours été présent pour régir nos sociétés...

Pourtant cette conception des plus européocentrée est totalement erronée ! Mais alors qu'est ce que l’État auquel nous faisons si souvent référence ? Si nous avons cette vision si limitée de l’État c'est avant tout parce qu'il tire ses racines du continent européen. Il faut en fait voir l’État non pas comme une forme naturelle du pouvoir mais bien comme une construction historique lente et progressive qui est spécifique à chaque société, dont les traditions politiques, culturelles, religieuses et sociales sont uniques. Cependant il est indispensable de dissocier les termes « moderne » et « contemporain » qui serviront à définir le type d’État dont nous parlerons ici. En effet, L’État contemporain correspond à l’État actuel, celui de notre siècle et de l'époque dans laquelle nous vivons. L’État moderne quant à lui représente le type d’État qui s'est progressivement instauré dans le monde et que nous connaissons de nos jours d'ailleurs ce concept sera défini juste en dessous. De plus nous parlerons à travers notre argumentation de la notion de modernité qui se définie par l'opposition au classicisme, c'est à dire qui correspond aux constantes évolutions qui ont lieu l'époque qui est la notre.

On considère que l’État est apparu au fur et a mesure que le pouvoir des personnes physiques s'est transféré à une instance abstraite. Ainsi Max Weber définit l’État par sa célèbre formule : l’État est «une communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime».

J'ajoute le définition que donnent Gabriel Almond et Bingham Powell dans leur ouvrage Comparative Politic. A Developmental Approach dans laquelle ils définissent l’État à travers l'analyse systémique comme « un ensemble ouvert, entretenant d'immenses échanges avec son environnement ». Plus précisément, « l'activité de l’État est donc dominée par une double mouvement. En provenance de la société civile, il extrait ou mobilise des ressources ; en sens inverse, il répond à certaines attentes et distribue des biens (au sens le plus large du terme) ».

J'ai privilégié ces définitions car elle reprennent les trois éléments qui définissent principalement l’État soit un territoire donné, une population sous sa juridiction ainsi qu'un pouvoir institutionnalisé et centralisé. Mais à cela s'ajoute la notion d'interaction entre l’État et la société dont ce dernier va répondre aux différentes attentes sociales.

PB : En quoi l'instance étatique s'est elle formée et développée en réponses aux attentes contemporaines ?

Dans un premier temps, nous verrons la genèse de l’État en analysant d'abord les sociétés antiques puis celle de la sortie du système fédéral. Puis dans une seconde partie, nous étudierons la façon dont l’État n'a cessé et ne cesse de se moderniser et les évolutions que cela nécessite.

Pour commencer, nous étudierons, dans une première partie, la genèse de l’État et par la suite, l'émergence de l’État moderne.

Tout d'abord, bien que la dénomination d'État ne soit pas si vieille, le concept au contraire date de plusieurs millénaires.

Pour prendre des exemples tirés de l'Antiquité, que ce soit la cité (ou Polis) d'Athènes ou celui de l'Empire romain, il est encore difficile de considérer ces constructions politiques comme des États au sens moderne. Pourtant, elles avaient toutes deux un territoire déterminé sur lequel vivait une population précise. De plus, ces constructions politiques disposaient d'une armée unique et nationale qui était mobilisée et équipée par l’impôt.

L'empire romain présentait déjà certaines des caractéristiques de l’État, plus qu'Athènes,. En effet, elles ont un territoire déterminé sur lequel vit une population précise. De plus, il y a une armée unique et nationale qui est mobilisée et équipée par le seul impôt romain. De plus, création d'un ordre juridique romain avec la mise en place d'une chose publique. Alors le peuple et l’État sont choses équivalentes. Cependant on ne peut pas présenter l'Empire romain comme un véritable État car la justice y est rendue au nom du suzerain qui est l'incarnation de Dieu.

Ensuite, on peut analyser la conception d'Engels de l’État. Cette dernière trouve en fait son explication par la lutte des classes. Pour Engels qui a une vision marxiste de l’État, il y a dans ces sociétés de l'Antiquité la marque de la création de l’État puisqu'elles reposent sur l'antagonisme de classe. En effet, à cette époque on peut scinder la société en deux classes opposées : les esclaves s'opposant aux propriétaires. Ainsi par la domination des uns sur les autres on peut voir émerger de façon logique un État puisque, selon Engels, l’État repose sur les intérêts de chacun des classes et également sur l'organisation de la division du travail. Donc Engels se base exclusivement sur un facteur économique qui découle de la richesse dont dispose chaque personne.

Pour résumer, selon Engels, l’État n'existe qu'à travers la division de classes qui produit des inégalités donc c'est une construction temporaire dans le mesure où il n'est nullement une nécessité si la lutte de classes est prend fin. C'est ainsi que se définie la théorie communiste de l’État.

Cependant, on retrouve cette lutte de classes au Moyen Age lors de la création de l’État moderne où s'oppose alors, non plus les esclaves et leurs maîtres, mais la noblesse à la paysannerie; puis dans nos sociétés

...