La disparition de l'acte administratif unilatéral
Dissertation : La disparition de l'acte administratif unilatéral. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar so130997 • 23 Mars 2017 • Dissertation • 2 600 Mots (11 Pages) • 6 241 Vues
SUJET: LA DISPARITION DE L'ACTE ADMINISTRATIF UNILATERAL
Selon Jean Walline, «un acte juridique de l'administration est comme tout acte juridique, un acte de volonté destiné à introduire un changement dans les rapports de droit qui existe au moment ou il intervient ou à modifier l'ordonnancement juridique». L'acte administratif unilatéral est un acte qui impose des droits et des obligations à ses destinataires indépendamment de leur consentement. C'est l'outil privilégié de l'administration, c'est le principe mise en œuvre de l'administration de ses prérogatives de puissance publique. En droit français, l'acte administratif unilatéral est l'acte administratif pris par une personne publique, créant des droits et obligations à l'égard des administrés. Par opposition à l'acte administratif contractuel, l'acte unilatéral manifeste l'expression de la volonté unilatérale de l'administration. L'acte administratif unilatéral présente deux grands traits majeurs. C'est d'abord un acte exécutoire, c'est-à-dire qui fait grief et qui, à ce titre, peut faire l'objet d'une recours pour excès de pouvoir. Plusieurs types de mesures administratives ne remplissent pas cette condition: les mesures d'ordre intérieur prises notamment en milieu carcéral, militaire et scolaire, les circulaires et les directives. L'acte administratif unilatéral se définit aussi par son auteur: c'est, en effet, un acte pris par une personne publique, bien que le juge admette dans certaines hypothèses qu'il puisse être édicté par une personne privée en charge d'un service public. L’administration est soumise à un certain nombre de conditions qu’elle doit respecter concernant la formation, l’exécution, la disparition des décisions exécutoires. La fin de l'acte administratif unilatéral est l'opération, rétroactive ou seulement à venir, par laquelle l'autorité administrative ou le juge administratif décide de la disparition d'un acte administratif unilatéral, ou seulement de tout ou partie de ses effets. Il ne sera pas traité en détail, dans ce devoir, de la disparition de l'acte pour caducité ni du régime de l'état caduc de l'acte.
Dans quelle mesure l'acte administratif unilatéral peut-il être amené à disparaître et quels sont les organes compétents pour mettre en œuvre cette disparition?
Plusieurs actions sont possibles pour mettre fin à un acte administratif unilatéral (I) mais il y a une double compétence quant à l'autorité titulaire de la mise en œuvre de sa disparition (II).
I. Les manifestations de la disparition de l'acte administratif unilatéral
Plusieurs actions peuvent être mises en œuvre pour faire disparaître un acte administratif unilatéral: l'abrogation (A) et le retrait (B) sont les principales.
A. L'abrogation, le principe de la non-rétroactivité des actes administratifsa
Tout d'abord, lorsque l'abrogation intervient pour mettre fin à un acte administratif unilatéral, le principe majeur de la non-rétroactivité des actes administratifs est respecté: en effet, l'abrogation n'emporte d'effets que pour l'avenir uniquement c'est-à-dire que les effets passés de l'acte sont maintenus. Le fait que l'abrogation ne soit pas rétroactive emporte une sécurisation des droits dont pouvaient se prévaloir les administrés. L'abrogation fait en sorte que l'acte ne soit plus invocable ni par l'administration ni par l'administré. Un des grands principes du service public est le principe d'adaptabilité et c'est ce principe qui justifie le pouvoir d'abrogation de l'administration. En effet, selon ce principe, le régime des services publics doit pouvoir s'adapter à l'évolution des besoins collectifs la société et à l'évolution de l'intérêt général. Il s'agit de gérer le service public en fonction des besoins de la collectivité. Par conséquent, cela entraîne une différence entre l'abrogation d'un acte réglementaire et celle d'un acte non réglementaire. Concernant l'acte réglementaire, le principe est que cet acte peut créer un droit au bénéfice de son titulaire mais ce dernier ne peut pas en exiger le maintien. Le règlement administratif est donc bien créateur de droits mais ces droits ne sont jamais acquis. Ainsi, l'administré bénéficiaire d'un droit ou d'un avantage ne peut pas aller à l'encontre d'une décision d'abrogation, dans la mesure où ses droits ne sont pas acquis et que l'administration doit toujours s'adapter, en premier, lieu à l'intérêt général. Concernant l'acte individuel, il n'y a pas de principe d'adaptabilité mais un «principe d'intangibilité des effets individuels des actes administratifs». Ainsi, concernant les décisions qui ne font naître aucun droit acquis, l'abrogation est possible (autorisations administratives telles que les autorisations de police). En revanche, pour les décisions créatrices de droits acquis, l'administration peut les abroger à condition qu'elles soient illégales et non définitives. De plus, l'administration apprécie discrétionnairement s'il y a lieu à une abrogation partielle ou totale de l'acte sauf si l'acte est illégal (obligation d'abrogation affirmée pour la 1ère fois dans l'arrêt du CE. Sect. Despujol du 10 janvier 1930 que cette illégalité soit présente dès le départ ou qu'elle soit apparue du fait de changements de circonstances). Ainsi, si l'acte est illégal dès l'origine: dans un 1er temps, il y a obligation d'abrogation si une demande a été faite (CE Leboucher et Tarandon du 12 mai 1976). Dans un 2ème temps, il y a absence d'obligation dans l'arrêt CE Sect. Société Afrique France Europe transaction du 30 janvier 1981 avec une exception si la demande est faite avant l'expiration du délai de recours (CE Association Auto défense du 30 juin 1982). Dans un 3ème temps, le décret du 28 novembre 1983 reprend la solution initiale de l'absence d'obligation et le CE accepte dans son arrêt du 2 février 1989 Cie Alitalia. Si l'acte devient illégal par la suite, depuis le décret de 1983, l'abrogation est admise à tout moment. La modification ne sera pas traitée ici car elle est relativement proche de l'abrogation. Elle se contente de remplacer certains effets de l'acte par d'autre. La seule différence est que cela suppose le maintien en vigueur de l'acte, pas de sortie de l'ordonnancement juridique.
B. Le retrait, exception au principe de la non-rétroactivité des actes administratifs
Le retrait, quant à lui, est une exception au principe général de la non-rétroactivité des actes administratifs. En effet, il entraîne une sortie de l'ordonnancement juridique de l'acte ainsi qu'une suppression des effets passés de celui-ci. Cependant, des conditions strictes sont posées à sa mise en œuvre: le retrait est possible pour tous les actes individuels non créateurs de droit mais une difficulté se pose quant aux actes créateurs de droits acquis. L'acte créateur de droits acquis ne peut être retiré que s'il est entaché d'illégalité et pas s'il est simplement inopportun (CE Dame Cachet 3 novembre 1922). Il y a là une volonté de limitation du pouvoir de l'administration. De plus, conformément aux conclusions du commissaire du gouvernement Rivet, il y a une condition de délai de 2 mois pour procéder au retrait à compter de l'entrée en vigueur de la décision. Là encore une difficulté intervient. L'entrée en vigueur de l'acte est subordonnée à la publicité de l'acte et le délai ne commence donc à courir que lorsque l'acte est publié. Ce problème est illustré par l'arrêt Ville de Bagneux de 1966 dans lequel le CE dit que «lorsqu'une décision (…) n'a fait l'objet d'aucune mesure de publicité, le délai ne court ni à l'égard des tiers, ni à l'égard de l'administration». L'administration peut donc retirer l'acte quand elle veut. C'est une application du principe de légalité au détriment de la sécurité juridique de l'administré. Néanmoins, il y a une évolution jurisprudentielle avec les arrêts Madame de Laubier de 1997 et Centre sanitaire et social de Saint-Clar de 1999 qui tendent à différencier l'administration des tiers, celle-ci ne pouvant donc plus invoquer la non-publicité des actes pour contrer le délai de 2 mois. C'est la réaffirmation du principe de sécurité juridique des administrés. Finalement, il y a une confirmation jurisprudentielle dans l'arrêt du CE Ternon du 26 octobre 2001 qui dit que le délai de l'administration pour retirer l'acte est de 4 mois à compter de «l'édiction de la décision». Les droits acquis ne sont donc plus menacés par une absence de publicité. Le pouvoir de retrait de l'administration trouve son fondement dans le droit de corriger ses erreurs. Ainsi l'administration peut immédiatement retirer un acte s'il est illégal sans attendre le recours contentieux mais un problème se pose si l'acte est créateur de droits acquis pour l'administré. Les droits acquis sont donc une limite à l'exception au principe de non-rétroactivité des actes administratifs. Le problème posé en doctrine est qu'il n'y a pas de réelle définition organique de ce que sont les droits acquis mais une simple énumération en fonction de l'étude de la jurisprudence administrative. Ainsi, une grande liberté est laissée au juge administratif pour déterminer les actes créateurs ou non de droits acquis et si l'acte peut, ou non, subir un retrait.
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