LIGNES DIRECTRICES
Commentaire d'arrêt : LIGNES DIRECTRICES. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar disizromain • 10 Décembre 2015 • Commentaire d'arrêt • 2 119 Mots (9 Pages) • 4 602 Vues
Romain BOIX
Commentaire d’arrêt : 04 février 2015 « Ministre de l’intérieur »
Selon les termes du commissaire du gouvernement B. Tricot la circulaire est « un pavillon qui peut recouvrir toutes sortes de marchandises » (Conclusion sur arrêt, 29 janvier 1954, institution Notre Dame de Kreisker). En effet, parfois les circulaires cachent de nombreuses lignes directrices et la dénomination officielle ne saurait constituer en quoi que ce soit un caractère décisif. Dans cet arrêt nous verrons qu’une fois de plus, la nature de l’acte devra être précisée par le Conseil d’Etat.
Dans ce travail nous étudierons et commenterons l’arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 4 février 2015 « Ministre de l’intérieur ».
Mr B.A citoyen Colombien résidant régulièrement en France sollicite la régularisation de sa situation en demandant une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale ». Le préfet de police rejette sa demande et rend à son encontre une décision obligeant Mr B.A à quitter le territoire Français.
Le litige en question porte alors sur le fait que Mr B.A demande à se prévaloir d’une circulaire de régularisation appelé « circulaire Valls » du 28 novembre 2012 relative aux conditions d’examen des demandes d’admission au séjour.
M B.A conteste alors la décision du préfet du 22 avril 2013 refusant à Mr B.A la délivrance du titre de séjour demandé devant le Tribunal administratif de Paris. La juridiction de 1ère instance annule la décision par un arrêt du 18 décembre 2013, le préfet forme alors appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Paris mais cette dernière le déboute par un arrêt du 4 juin 2014. Le ministre de l’intérieur s’est alors pourvu en cassation devant le Conseil d’Etat au motif que la circulaire dont se prévalait Mr B.A n’était pas une ligne directrice et ne pouvait alors pas être soulevé durant un jugement.
Les requérants demandent alors de faire annuler l’arrêt du 4 juin 2014 au motif que le juge d’appel aurait commis une erreur de droit en considérant que l’avantage énoncé dans la circulaire du 28 novembre 2012 était une ligne directrice pouvant alors être avancé devant le juge administratif, alors qu’en l’espèce Mr B.A ne pouvait se prévaloir de celle-ci étant donné sa situation irrégulière sur le territoire Français.
Le Conseil d’Etat a alors dû se demander si un texte relatif à l’attribution d’un avantage pouvait être soulevé par un administré alors que celui-ci n’y aurait pas légalement droit.
La haute cour de l’ordre administratif a donc dû se pencher sur la nature réelle de la circulaire afin d’estimer si elle était bien invocable par Mr B.A.
Le Conseil d’Etat décide enfin d’annuler l’arrêt du 4 juin 2014 en annonçant que la cour administrative d’appel de Paris avait commis une erreur de droit en considérant que les énonciations de la circulaire du ministre de l’intérieur du 28 novembre 2012 était des lignes directrices dont l’administrés pouvait donc se prévaloir.
Cet arrêt revêt alors un apport important en réaffirmant la différence de régime juridique entre lignes directrices et ordonnances. De plus il ressort de l’arrêt le caractère d’orientation générale, une création prétorienne bien distincte de la ligne directrice puisqu’elle n’est pas invocable par l’administrés.
Désormais, il s’agit d’étudier le rappel du Conseil d’Etat du principe de non invocabilité des circulaires non réglementaire (I) avant de s’attarder sur l’évolution jurisprudentiellede la haute cour de justice administrative concernant ce types d’acte administratif unilatéral (II)
I) La réaffirmation de la non-invocabilité des circulaires non réglementaire
Afin de mieux comprendre le caractère de réaffirmation de la non-invocabilité des circulaires non réglementaires dans cet arrêt il s’agira de voir qu’en l’espèce les parties ont un désaccord sur la nature de l’acte (A) avant d’étudier plus précisément l’orientation générale et son régime juridique (B)
A) Le conflit des parties sur la nature de l’acte
Classiquement, la circulaire est définie comme un acte par lequel un chef de service procède à l’interprétation, à l’attention de ses subordonnés, d’un texte législatif ou réglementaire. La circulaire peut aussi exposer une politique gouvernementale, les recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif contre les circulaires sont considérés comme irrecevable.
En principe, la circulaire est seulement interprétative, toutefois certains chefs de services insère des dispositions réglementaires dans celle-ci les rendant alors porteuses de normes, le juge administratif les traitent alors comme un acte administratif lambda et peuvent alors être attaqué par recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif (CE, 29 janvier 1954, Notre Dame de Kreisker).
Les lignes directrices, anciennement appelé directives ( CE, 19 septembre 2014, Jousselin) sont des document par lequel l’administration se fixe à l’avance une ligne de conduite en manifestant un « pouvoir d’orientation » différent du pouvoir réglementaire car non contraignant. La légalité de ces actes est désormais dégagé (CE, 11 décembre 1970, crédit foncier de France) depuis que les ministres en font une grande utilisation du fait de leurs manque de pouvoir réglementaire en dehors de celui de chef de service (CE, 7 février 1936, Jamart). Ces mêmes directives peuvent être contestables par la voie de l’exception d’illégalité (CE, 11 décembre 1970 Crédit foncier de France) elles sont aussi susceptibles d’être invoqué par les administrés.
En l’espèce, la nature de l’ordonnance du 28 novembre 2012 est la base du litige entre Mr B.A et le ministre de l’intérieur. Mr B.A considère que ladite ordonnance relative à la régularisation des étrangers «sans papiers» définit des lignes directrices qui peuvent alors être invoquées devant le juge administratif. Le ministre de l’intérieur quant à lui considère que l’ordonnance fait ressortir des orientations générales dont les personnes concernées ne peuvent se prévaloir.
Ce litige n’est pas anodin dans le droit administratif, il en est même fait état par le Conseil d’Etat dans un rapport dénonçant le fait qu’en réalité beaucoup de « circulaires » dénommé comme telles établissent en vérités des lignes directrices (CE , rapport annuel, 2013, page 140)
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