Commentaire d'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 13 juin 2019
Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 13 juin 2019. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar imoufaux • 1 Avril 2020 • Commentaire d'arrêt • 1 404 Mots (6 Pages) • 684 Vues
Commentaire d’arrêt cass, com, 13 juin 2019
L’arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 13 juin 2019 porte sur le régime de la prestation compensatoire en cas de procédure collective de son débiteur.
En l’espèce, une femme avait obtenu lors de son divorce avec son ex-époux l’obligation de ce dernier de lui verser une prestation compensatoire en capital. Or, l’ex-époux a fait l’objet de l’ouverture d’une procédure collective à son encontre et n’a toujours pas versé cette créance alimentaire.
Après avoir déclaré au passif une créance de prestation compensatoire, son ex-épouse se désista de sa déclaration et saisit le juge-commissaire d'une requête afin d'obtenir, sur les fonds détenus par le liquidateur, le paiement d'une provision à valoir sur cette créance. La Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a par un arrêt du 5 janvier 2017 rejeté cette demande. L’ex-épouse décide alors de se pourvoir en cassation.
En substance, l’ex-épouse avançait qu’une provision lui était dû au titre de la créance qu’elle détenait portant sur l’obligation de versement en sa faveur d’une prestation compensatoire par son ex-époux, du fait du manquement à l’exécution de cette obligation par ce dernier placé en procédure collective.
La Cour d’Appel estimait quant à elle que bien que cette créance ait une nature particulière, l’ex-épouse s’étant désisté de sa déclaration de créance dans le cadre de la procédure collective, elle ne pouvait prétendre obtenir une telle provision.
Dès lors, il est possible de s’interroger quant au fait de savoir quel est le régime de la prestation compensatoire en cas de procédure collective de l’ex-conjoint ?
Par son arrêt du 13 juin 2019, la Chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par l’ex-épouse au motif que la créance de prestation compensatoire, si elle échappe à la règle de l’interdiction des paiements, demeure soumise à celle de l’interdiction des poursuites, et son titulaire ne peut être admis aux répartitions qu’à la condition d’avoir déclaré sa créance.
Il apparait ainsi par cette décision que la prestation compensatoire qui doit être réglée hors procédure (I), n’empêche toutefois pas l’obtention de son paiement dans le cadre de la procédure collective à la condition de déclarer celle-ci au passif (II).
I – L’affirmation de l’obligation de paiement de la prestation compensatoire hors de la procédure collective
Bien que la prestation compensatoire ne se voit pas appliquer l’interdiction des paiements (A), l’interdiction des poursuites s’impose toutefois à elle (B).
A – L’affirmation de l’absence d’application de l’interdiction des paiements
L’un des principes de base applicable en matière de procédure collective réside à l’article L.622-7 du Code de commerce. Ce dernier dispose que l’ouverture d’une procédure collective emporte « interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture ». L’arrêt rendu par la Cour de cassation admet toutefois le paiement de la prestation compensatoire durant cette période de procédure collective. Pour cela elle se fonde sur ce même article prévoyant que cette interdiction de paiement est évincée en matière de créance alimentaire.
La nature de cette créance semble en elle-même justifier cette éviction de l’interdiction des paiements afin d’assurer l’exécution d’une obligation à dimension sociale.
Par ailleurs, en affirmant que la prestation compensatoire échappe à l’interdiction des paiements, la Haute juridiction judiciaire se place dans la lignée d’une jurisprudence importante en matière d’exception de l’interdiction pour les créances alimentaires. Par ses deux arrêts rendus en date du 8 octobre 2003, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a par un revirement de jurisprudence évincé l’interdiction des paiements ainsi que l’obligation de déclaration des créances alimentaires.
Toutefois, bien que la Cour de cassation ait affirmé cette exception, elle rappelle que la prestation compensatoire reste soumise à l’interdiction des poursuites.
B – La réaffirmation de l’application de l’interdiction des poursuites
Dans sa solution, la Cour de cassation affirme de façon assez pédagogique que l’éviction de l’interdiction des paiements, n’évince toutefois pas la prestation compensatoire de l’interdiction des poursuites. Par cette affirmation, la Haute juridiction judiciaire fait de la prestation compensatoire une créance hors procédure collective. Ce principe sur lequel se fonde la Cour de cassation trouve sa source à l’article L 622-21 du Code de commerce.
La justification de l’exclusion de cette créance se trouve dans le caractère profondément personnel de cette dernière. Celle-ci correspond en effet à une dette personnelle du débiteur qui, dès lors, n’est payable que sur ses seuls revenus personnels dont il conserve la libre disposition.
En affirmant que la prestation compensatoire reste soumise à l’interdiction des poursuites, la Cour de cassation se met en opposition avec une part importante de la doctrine considérant que ces créances ayant une fonction sociale par essence, ce principe devrait être écarté.
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