Sens et dénotation
Dissertation : Sens et dénotation. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Maxime Villemure • 30 Juin 2015 • Dissertation • 1 797 Mots (8 Pages) • 1 914 Vues
Introduction
D’Aristote jusqu’à Bertrand Russell, en passant par Leibniz et Emmanuel Kant, le langage a toujours constitué une branche essentielle de la philosophie qui était, et qui est également aujourd’hui, rigoureusement étudiée. Vers la fin du XIX e siècle, un philosophe analytique allemand du nom de Gottlob Frege s’est notamment penché sur sa théorie du sens et de la dénotation, pour laquelle il consacra d’ailleurs un article : <<Sens et dénotation>> (Über Sinn und Bedeutung). Dans la présente dissertation, il sera sujet d’exposer les deux principaux arguments présents dans la publication de Frege pour motiver l’introduction du sens à titre d’élément indispensable pour comprendre le fonctionnement du langage, à savoir (1) incorporer le sens pour résoudre le problème des affirmations d’identités informatives de la forme A=B et (2) élucider, avec le sens, la problématique de l’échec du principe de substitution des identiques de Leibniz chez les énoncés de type propositionnel.
Problème d’affirmations d’identités informatives A=B
La première problématique qui sinue le parcours de Frege est le groupe d’énoncés d’identités informatives telles que A=B. Considérons, d’une part, les énoncés de type A=A, qui sont intuitivement des tautologies, c’est-à-dire des énoncés qui sont vrais en soi, des énoncés auxquels nous ne pouvons douter de la valeur de vérité. Bien qu’ils soient toujours vrais, ils ne livrent aucune connaissance tangible mis à part le fait qu’une chose est égale à elle-même (pomme=pomme, orange=orange), une connaissance dite a priori (logiquement antérieure à l’expérience). D’autre part, les énoncés de type A=B, quant à eux a posteriori, possèdent un contenu informationnel, il relève donc de la nécessité que ces énoncés nous donnent de l’information sur le monde.
La solution référentielle
La dénotation (aussi appelée référence), selon Frege, est une formulation linguistique (mot, phrase, proposition, etc.) qui fait appel à l’objet auquel elle dénote ou auquel elle se réfère dans le monde réel, c’est-à-dire, à la chose ou à l’entité que le mot lui-même représente. Frege, dans son article <<Sens et dénotation>>, démarre son argumentaire en nous donnant l’exemple de l’<étoile du matin>> (A) et de l’<étoile du soir>> (B), qui sont toutes deux des énonciations linguistiques qui dénotent le même objet, en l’occurrence, la planète Vénus (X). Prima facie, l’exemple semble livrer de l’information que l’étoile du matin est l’étoile du soir (A=B), alors qu’en réalité, tout ce qu’il démontre est que Vénus=Vénus, ou X=X. La solution référentielle n’est donc pas satisfaisante pour livrer un contenu informatif.
La solution métalinguistique
Frege poursuit son argumentation en invoquant une solution qui pourrait être <<métalinguistique>>. Ce moyen tente de démontrer qu’en fait, quand il y a apparition d’un énoncé A=B, on voudrait en fait parler des signes des mots; que les énoncés <<A>> et <<B>> dénotent la même chose et de ce fait, nous apprennent quelque chose sur la relation entre ces signes, à supposer que <<A>> = <<B>>. Pour reprendre l’exemple cité plus haut, l’<<étoile du matin>> = l’<<étoile du soir>> livrerait un contenu informatif sur les mots de chacun des groupes, tout en référant au même astre, Vénus. Cependant, Frege spécifie : << (…) cette relation existerait entre les noms ou signes dans la seule mesure où ils dénomment ou désignent quelque chose. >>. Sens et dénotation, p.103. En d’autres mots, la solution métalinguistique nous notifie exclusivement d’une occurrence de convention linguistique, c’est-à-dire que deux expressions différentes, par pure contingence, réfèrent à un même objet. Conséquemment, il n’y a pas d’information qui porte concrètement sur le monde et cette solution devient fragmentaire, voire inapplicable.
La solution du sens
Frege débute l’introduction de sa théorie du sens en exprimant de manière éloquente que pour toute expression ayant un sens déterminé, celle-ci n’a pas impérativement de dénotation ou de référence. Voici un extrait présent dans l’article pour éclairer son propos: << L’expression << la suite qui converge le moins rapidement>> a un sens, mais on démontre qu’elle n’a pas de dénotation. Pour toute suite convergente donnée, on peut en trouver une qui converge plus lentement mais converge néanmoins. On peut donc concevoir un sens sans avoir pour autant avec certitude une dénotation. >>. Sens et dénotation, p.104. Frege poursuit en disant, dans un premier temps, que si l’on a recourt aux mots d’autrui au style direct, par exemple : << Jean mange une pomme >>, et bien ces mots réfèrent aux mots d’autrui et corollairement, ces mêmes mots ont la dénotation habituelle. Dans un second temps, pour le cas du style indirect, Frege dit que l’on parle du sens des paroles d’une autre personne. Prenons par exemple cette phrase : << Jean a une <<dent>> contre vous. >>, le mot <<dent>> n’a pas sa dénotation habituelle, mais bien son sens habituel, qui, dans ce cas-ci, serait contextuel. Pour résumer, Frege écrit clairement : << La dénotation indirecte d’un mot est son sens habituel. >> Sens et dénotation, p.105. Dès lors, Frege nous met en garde sur sa définition de sens en précisant clairement la différence entre la <<représentation mentale>> et le sens. La représentation mentale est subjective, privée, tandis que le sens est objectif, tangible et <<peut être la propriété commune de plusieurs individus>> Sens et dénotation, p. 106. Pour illustrer les distinctions, Frege utilise l’analogie d’une personne qui observe un astre à l’aide d’un télescope. Pour expliquer de manière succincte, l’image rétinienne serait la
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