La mort donne-t-elle un sens à la vie ?
Dissertation : La mort donne-t-elle un sens à la vie ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Adrien Meilhac • 29 Novembre 2021 • Dissertation • 2 844 Mots (12 Pages) • 1 991 Vues
Adrien Meilhac
Philosophie générale
Dissertation
La mort donne-t-elle un sens à la vie ?
« Il n’y a qu’un seul problème philosophique vraiment sérieux : c’est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d’être vécue, c’est répondre à la question fondamentale de la philosophie. ». Première phrase du Mythe de Sisyphe écrit par Albert Camus en 1942, elle pose le problème de la valeur de la vie comme celui qui doit être répondu avant tout autres, car toutes les autres questions dépendent de sa résolution. En effet, c’est bien la valeur que la vie qui va permettre à tout ce qui la compose d’en avoir aussi. Si j’estime que la vie ne vaut rien, que je n’ai pas de raison de vivre, alors rien d’autres ne saurait en avoir. Comment le bonheur, ou la morale, pourraient être souhaitable, si la vie ne l’est pas ? Pourquoi voudrait-on avoir de l’argent, de la gloire, ou même devenir vertueux, si au fond nous ne pouvons voir pour quelles raisons nous le faisons. Notre Raison nous demande de fonder nos actes, d’avoir une raison de les faires. Car si ce n’est pas le cas, rien ne nous y pousse, rien ne vient ne vient nous sortir de notre inertie : c’est le sens qui met en action la vie.
Pourtant, si en 1942 la question reste irrésolue, c’est qu’il n’est pas si facile d’y répondre. Le « sens », c’est la signification qu’a une chose pour une personne et constitue sa justification. Le sens d’une action, c’est sa raison d’être, c’est l’argument qui légitimise son existence. Par exemple le sens de l’action « manger », ça peut-être le fait de rester en vie, que la nourriture soit bonne, ou même la curiosité de gouter un nouvel aliment. Ce sont les raisons pour lesquelles l’action peut être fait. Au contraire lorsqu’une action n’a pas de sens, c’est que rien ne donne une bonne raison de la faire. Par exemple, le sens de la « guerre » semble déjà plus dur à trouver. Pourquoi raison pourrions-nous vouloir la guerre ? Pour certains, il n’y a jamais aucune raison de la vouloir, elle n’a donc pas de sens pour eux. Pour d’autres, elle peut se justifier, elle peut avoir un sens dans certaines circonstances, comme par exemple pour ramener la paix, ou pour défendre des intérêts. On remarque d’ailleurs que le sens d’une chose n’est pas une donnée objective. Certains diront que la guerre a du sens, d’autre diront que non. Le sens qu’a une chose pour nous, c’est nous, nos expériences, nos devoirs et règles, qui lui donnons. De plus, le sens d’une chose est changeant, il peut apparaitre ou disparaitre en fonction des situations. Dormir alors qu’on n’est pas fatigué n’a pas de sens, mais si on attend quelques heures le temps que l’envie de dormir vienne, alors l’action est justifiée.
Ainsi, si le sens qu’a une chose pour nous est personnel et est soumis au changement, comment pourrions nous trouver un sens à la vie ? D’autant plus que chose vient compliquer la tâche : la mort. La vie peut-elle avoir un sens si une des caractéristiques qui la compose est sa finitude ? Cela semble être une tâche ardue. Car s’il est vrai que la mort peut être ce qui donne du sens à la vie, puisqu’en lui donnant une date de fin, il en fait une ressource rare, qu’il faut soigneusement entretenir, il n’en demeure pas moins que la mort est une force qui réduit les choses au néant, qui efface l’existence, qui met un point d’arrêt à un mouvement, une chose qui évoluait. La mort apparait donc comme un enjeu important dans la quête d’un sens à la vie.
Une première objection à traiter serait l’idée selon laquelle la mort ne serait rien, et que, à cet égard, elle n’impact donc pas la vie, elle ni ne lui enlève ni ne lui donne du sens. Cette thèse est soutenue par Epicure, pour qui la mort n’est rien, et ne peut rien être. En effet, si pour connaitre une chose il faut en faire l’expérience par la sens, et que la mort est justement la privation de tout sens, alors inévitablement la mort n’est rien puisque l’on ne peut savoir ce qu’elle est. Il est impossible de penser une chose dont on ne sait rien, si ce n’est par des mythes. De cette inférence, il faut en tirer une idée : la mort n’est rien, donc il ne faut pas s’en inquiéter. Elle n’est ni mal, ni bonne, elle n’est que le retour à une situation antérieur, on ne fait que retourner à la condition que nous occupions avant notre naissance, laquelle ne nous a pas plus inquiété quand nous étions. La mort ne donne ici pas de sens à la vie. Il ne faut pas comprendre qu’elle lui en enlève, Epicure estime que la vie acquiert un sens sans l’action de la mort, mais elle ne lui en offre pas non plus.
Mais si la mort n’a pas la capacité de donné du sens à notre existence, cela signifie-t-il qu’une vie d’immortel aurait le même sens que la vie de mortel ? Serait-il souhaitable de ne plus mourir ? Cela pourrait-il même donné plus de sens à la vie ? Déjà il faut voir qu’être immortel, c’est la possibilité de tout faire un jour ou un autre. Victor Frankl, professeur de neurologie, de psychiatrie et créateur de la logothérapie dit « Si nous étions immortels, nous pourrions légitimement reporter chaque action pour toujours. Que nous fassions une chose maintenant ou non n'aurait aucune importance... Mais face à la mort, qui est la finalité absolue de notre avenir et la limite de nos possibilités, nous sommes dans l'obligation d'utiliser notre vie au maximum et de ne pas laisser passer les occasions singulières... qui nous échappent. » En vivant à l’infini, il ne nous est plus possible de nous fixer de limite, de nous obliger nous-même à faire quelque chose : on sait pertinemment qu’on pourra forcément le faire dans un jour futur, dans quelques semaines, années, ou même décennies. La notion de temps deviendra de plus en plus floue, le temps n’aurait plus de valeur puisque nous en aurions alors en quantité infini. Les choses perdraient de leur sens, d’où d’ailleurs « l’expression n’« avoir ni queue ni tête », qui montre que le début et la fin d’une chose sont deux données nécessaires pour qu’un chose ait du sens pour nous. Rien ne nous pousserait plus à ne rien faire si on était immortel. Il semble donc que la mortalité soit caractéristique de l’existence humaine. Heidegger et Montaigne mettent cette idée en exergue lorsque le premier dit « seul l’Homme meurt, l’animal périt », et le second « l’animal périt, l’Homme meurt ». C’est par la confrontation avec la mort que l’Homme prend conscience de sa vie. L’immortalité dépossède la vie de sa possibilité d’avoir du sens, et l’empêche même d’exister ! Car il y a logiquement de la vie que si la mort existe. Pour pouvoir dire, « ceci est la vie », je dois pouvoir voir une autre alternative, de laquelle je peux affirmer « ceci est la mort ». Une chose a besoin de son contraire pour être appréhendable : je ne peux pas affirmer qu’un objet est grand, si celui la même que je vois est identique à tous les autres sur cette caractéristique. L’existence de la mort est donc nécessaire pour que celle de la vie le soit aussi. Et elle est donc aussi nécessaire pour que la vie puisse avoir un sens, mais nous ne sommes pas encore en capacité de dire que la mort donne ou enlève du sens à la vie.
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