Rousseau Et L'animal
Dissertation : Rousseau Et L'animal. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar antho.merette • 15 Décembre 2014 • 733 Mots (3 Pages) • 1 453 Vues
Trois objets sont noués dans cette étude érudite dont la rigueur et la profondeur des analyses méritent d’être d’emblée soulignées : la pensée de Jean-Jacques Rousseau ; l’animal comme question philosophique majeure ; l’impulsion de nouvelles interrogations anthropologiques, du fait de la découverte d’autres peuples mais aussi de l’observation des mœurs animales. « Il apparaît », écrit Jean-Luc Guichet, « que jamais, historiquement, aux époques antérieures ou ultérieures, le thème de l’animal n’a été aussi important dans l’espace philosophique qu’au xviiie siècle. Il se rencontre à tous les carrefours décisifs de la réflexion, métaphysique, théologique, morale, biologique, épistémologique, et incarne l’un des centres essentiels, peut-être même le centre principal, de l’anthropologie qui commence précisément à se constituer de façon autonome » (p. 18).
2Ce siècle, si riche en ruptures, représente donc, notamment quant à la réflexion sur l’animal, un moment charnière. Par ailleurs, ce siècle est dominé par le souci de ne plus seulement s’interroger sur l’homme comme sujet pensant, mais sur ce qui fait le genre humain. Aussi le regard se tourne-t-il vers ces autres que sont alors les sauvages, les enfants, les animaux, ces derniers étant porteurs d’une altérité plus problématique mais aussi plus originaire. La pensée de Rousseau est exemplaire de cet effort d’éloignement de son objet pour mieux en cerner la spécificité. L’auteur rappelle la phrase de Rousseau écrite dans l’Essai sur l’origine des langues (1781), citée par Claude Lévi-Strauss dans l’étude qu’il consacre à « Jean-Jacques Rousseau fondateur des sciences de l’homme »1 : « Quand on veut étudier les hommes, il faut regarder près de soi ; mais pour étudier l’homme il faut apprendre à porter sa vue au loin ». L’animal est, comme on le découvrira, l’un de ces lointains convoqués par l’anthropologie rousseauiste.
3Avant d’entrer dans l’examen du « statut de l’animal chez Rousseau », l’auteur présente et analyse les termes du débat tel qu’il se pose dans un xviie siècle dominé par la pensée de Descartes. Son dualisme des substances (la pensée et l’étendue) modifie une donne philosophique jusqu’alors gouvernée par la philosophie aristotélicienne : à l’animal doué d’une âme sensori-motrice succède un animal purement corporel dont les lois de la mécanique suffisent à rendre compte des agissements ; c’est la vie elle-même qui perd les outils conceptuels qui permettaient d’en penser la spécificité au regard du monde physique. Si, comme le montre l’auteur, la thèse qui sera dite de l’animal-machine est essentiellement pour Descartes une hypothèse méthodologique, ses héritiers la durciront et lui donneront une tournure dogmatique. C’est toute la querelle de l’âme des bêtes qui s’enflamme alors : philosophes et théologiens s’en emparent, car l’enjeu n’est rien moins que celui de l’immortalité des animaux qui, si une telle possibilité était admise, porterait gravement atteinte à la singularité métaphysique de l’homme. L’argument de la souffrance animale vient compliquer le débat. En effet, si les néo-aristotéliciens opposent aux tenants de l’automatisme cette dimension de souffrance, celle-ci est en même temps incompatible avec la justice divine car, comme
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