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La place de la femme dans l'œuvre d'Éluard

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Par   •  20 Octobre 2014  •  Commentaire de texte  •  1 945 Mots (8 Pages)  •  912 Vues

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Si les mains ou les yeux occupent une place importante dans ce recueil, ils évoquent aussi souvent le corps féminin. Le recueil met alors en lumière ce « elle » à la fois intrigant et fascinant.

1. Des femmes omniprésentes

La place de la femme dans l'œuvre d'Éluard

Les femmes ont joué un rôle important dans la vie et l'œuvre de Paul Éluard. Certains critiques n'hésitent pas à parler de différents cycles dans sa poésie en fonction des femmes qui l'ont accompagné. C'est le cas de Raymond Jean qui, dans la collection « Écrivains de toujours », note : « Il serait possible d'apercevoir dans l'ensemble de la poésie éluardienne : un cycle de Gala, un cycle de Nusch, un cycle de Dominique. Ce qui frappe dans une telle structure, c'est qu'elle correspond avec la plus parfaite simplicité à celle même de la vie du poète, à l'enchaînement des saisons amoureuses qu'il a vécues, aux données de la chronologie. »

S'il faut certes se garder de trop simplifier les rapports entre la vie et l'œuvre d'Éluard, nous noterons que l'œuvre du poète accorde bien une place importante à ces femmes qu'il a passionnément aimées. Ce n'est donc pas un hasard si Nusch est présente dans Les Mains libres : Man Ray lui rend « hommage » dans les portraits placés à la fin du recueil. On sait par ailleurs à quel point la mort de cette dernière a marqué Éluard dans sa chair et dans son œuvre. Le 19 décembre 1946, Éluard écrit ainsi à Man Ray : « Je te récrirai quand j'aurai repris conscience de la vie. »

La présence de la femme s'accompagne bien souvent de la crainte de son absence. La mort de Nusch rend cette idée particulièrement sensible et douloureuse. Éluard écrit ainsi dans « Notre vie », extrait du Temps déborde :

« Morte visible Nusch invisible et plus dure

Que la faim et la soif à mon corps épuisé

Masque de neige sur la terre et sous la terre

Source des larmes dans la nuit masque d'aveugle

Mon passé se dissout je fais place au silence. »

Il ne s'agit pas ici de voir dans la poésie d'Éluard une autobiographie déguisée : ce serait une grossière erreur car il n'y a aucun pacte autobiographique. Pour autant, il est important de comprendre que, pour les surréalistes, la vie irrigue l'art et l'art irrigue la vie.

Le corps féminin dans l'œuvre de Man Ray

Man Ray a souvent représenté le corps féminin. L'une des plus célèbres œuvres de l'artiste, « Le violon d'Ingres », est une photographie de Kiki de Montparnasse. Man Ray s'intéresse également à différentes parties du corps comme l'œil dans « Les larmes ». Il fait en outre référence à Vénus dans des œuvres comme « La Vénus restaurée ».

Pour autant, les représentations du corps dans l'œuvre de Man Ray ne sont pas similaires à celles que l'on trouve dans la poésie d'Éluard. Le corps de la femme, dans l'œuvre de Man Ray, est parfois mis à rude épreuve. Son érotisme s'accompagne souvent d'une forme de souffrance des corps, ce qu'on retrouve beaucoup moins dans l'œuvre d'Éluard. C'est une donnée importante qu'il ne faut pas négliger car elle permet de mieux comprendre certains dessins des Mains libres.

2. Le corps féminin dans Les Mains libres

Les métamorphoses du corps

Le corps féminin prend différentes formes dans Les Mains libres. Il peut être intégralement dessiné par Man Ray, comme dans l'œuvre qui a inspiré « Le désir ». Parfois, il est également représenté sous la forme de fragments. C'est notamment le cas dans « L'évidence », l'une des premières œuvres du recueil, qui ne représente que quelques parties du corps comme l'œil ou la bouche. Cela suffit pour donner vie à l'œuvre, qui repose alors sur ces éléments à la fois isolés et intrigants. Paul Éluard écrit dans la préface des Mains libres : « Une bouche autour de laquelle la terre tourne ». La femme de « Belle main » est également troublante puisque la main devient tout un corps, tandis que celle de « Paranoïa » n'est qu'une seule jambe.

Le corps peut être partiellement représenté. L'artiste masque parfois le visage de la femme, comme pour en renforcer le caractère mystérieux. Il est, dans certaines œuvres, simplement esquissé. Une silhouette très anonyme est allongée au pied d'un château dans le dessin qui accompagne « Château abandonné ». Un fil, dans le dessin de « Fil et aiguille », suffit pour dessiner une silhouette… De fil en aiguille, précisément, c'est l'imagination qui donne vie à cette simple ligne.

Le corps féminin est parfois associé à différents éléments, souvent insolites, comme le poisson dans le dessin de « La femme et son poisson » ; le texte aussi se distingue par des rapprochements surprenants :

« La vierge et son grillon le lustre et son écume

La bouche et sa couleur la voix et sa couronne. »

Le désir

Les corps représentés sont aussi des corps désirés. Dès le début de l'œuvre, Éluard écrit : « Le dessin de Man Ray : toujours le désir, non le besoin. »

De nombreux passages du recueil traduisent ce rapport bien particulier au corps de la femme. C'est le cas du dessin qui accompagne le poème « Le désir » et de cette main dans les cheveux. Le poème intitulé « Les sens » évoque également la chair et la force du désir :

« Dévêtue et le front pur

Tu t'abats comme une hache

Étincelante et d'un poids

À faire se lever le plomb

Entends le rubis éclore

La turquoise se faner

Ta bouche séduit ton visage

Et ton corps peut venir

Battant comme un cœur. »

Le dessin de Man Ray – cette femme ouvrant la bouche et fermant les yeux – renforce l'aspect troublant des mots d'Éluard. Il n'est pas sans

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