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La démocratie et ses ennemis

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Par   •  29 Mai 2015  •  Analyse sectorielle  •  464 Mots (2 Pages)  •  544 Vues

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La démocratie et ses ennemis

Revenons aux faitx : 2 individus ont attaqué la rédaction d’un journal puis un autre s’en est pris aux clients d’un supermarché juif. Le bilan est lourd : 17 victimes. Mais le vrai bilan a eu lieu trois jours plus tard : en réaction à l’assassinat de ces victimes, ce sont plus de 3 millions d’avocat qui sont venus défendre et plaider leur cause auprès d’eux-mêmes, mais aussi à la face du monde. Le mouvement avait été identique à New-York, à Madrid et dans les autres villes occidentales attaquées. Ainsi, si la démocratie est le plus fragile des régimes politiques, elle est aussi celui qui est le plus ouvert – à ses amis bien sûr – mais aussi à ses ennemis intérieurs et extérieurs.

Dès le lendemain de ces attentats, certains responsables politiques ont appelé à un nouvel arsenal législatif, un Patriot Act à la française, censé protéger contre de potentielles nouvelles exactions et au-delà limiter l’ouverture consubstantielle de tout régime démocratique. Toute loi d’exception limitant la liberté rappelle les lois terribles adoptées par Robespierre, lesquelles avaient pour inspiration cette invite de Saint-Just :

” Soulevons le voile qui cache les complots ; épions les discours, les gestes, l’esprit de suite de chacun ”

Au-delà de l’oxymore politique (limiter la liberté au nom de la liberté) et du bilan mitigé du Patriot Act aux Etats-Unis, il est clair que la mobilisation massive semble dire le contraire d’un souhait de fermeture : plus la démocratie est ouverte, hospitalière, plus elle est défendue. Chaque blessure faite à la démocratie la renforce, paradoxalement. Cette ouverture de la démocratie fait aussi sa spécificité : quand une tyrannie ou un régime oligarchique est mis à mal, bien peu les défendent.

Jacques Derrida, qui avait assisté au 11 Septembre, avait ainsi défendu une logique auto-immunitaire de la démocratie :

” Plus encore qu’une autre, […] une démocratie chrétienne devrait être accueillante aux ennemis de la démocratie, leur tendre l’autre joue, offrir l’hospitalité, donner la parole et le droit de vote aux anti-démocrates, ce qui est conforme à une certaine essence hyperbolique et plus auto-immunitaire que jamais de la démocratie même ”

Sans doute certains, les mêmes voulant bâtir toujours plus de prisons, ont tête l’éradication totale de la violence. Voeux pieux. La violence ne s’éradique pas, la démocratie elle-même s’est construite sur la violence, le rejet de l’Ancien Régime au travers de ses deux Révolutions. Par conséquent, nul besoin de Patriot Act, l’auto-immunité de la démocratie sera toujours plus puissante que n’importe quel dispositif juridique. On ne décrète pas la défense de la démocratie, elle s’auto-immunise, s’auto-défend dès qu’elle est en danger.

La démocratie est un projet commun indestructible, toujours à-construire, auquel participe Charlie Hebdo et chacun d’entre nous. Les anti-démocrates seront toujours mis en échec tant que nous sommes et resterons Charlie.

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