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De l'Etat et du voile d'ignorance, en contractualisme

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Par   •  10 Octobre 2022  •  Cours  •  38 553 Mots (155 Pages)  •  244 Vues

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DE L’ETAT et DE LA SOCIETE CIVILE BOURGEOISE à PARTIR DU POUVOIR DE LA FORCE ET DE LA LOI ![pic 1]

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 ROUSSEAU, KANT ET LE POUVOIR fondé sur la force, comme le passage au droit, à la loi

« Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit et l’obéissance en devoir. De là le droit du plus fort ; droit pris ironiquement en apparence et réellement établi en principe. Mais ne nous expliquera-t-on jamais ce mot ? La force est une puissance physique ; je ne vois point quelle moralité peut résulter de ses effets. Céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté ; c’est tout au plus un acte de prudence. En quel sens pourra-ce être un devoir ?

Supposons un moment ce prétendu droit. Je dis qu’il en résulte qu’un galimatias inexplicable. Car sitôt que c’est la force qui fait le droit, l’effet change avec la cause ; toute force qui surmonte la première succède à son droit. Sitôt qu’on peut désobéir impunément on le peut légitimement, et puisque le plus fort a toujours raison, il ne s’agit que de faire en sorte qu’on soit le plus fort. Or, qu’est-ce qu’un droit qui périt quand la force cesse ? S’il faut obéir par force on n’a pas besoin d’obéir par devoir, s’i l’on n’est plus forcé d’obéir on n’est plus obligé. On voit donc que ce mot de droit n’ajoute rien à la force ; il ne signifie rien du tout…Convenons donc que force ne fait pas droit, et qu’on n’est pas obligé d’obéir qu’aux puissances légitimes. »

J.J Rousseau, Du contrat Social, livre 1, chapitre 3

A l’opinion très répandue que la loi trouve son origine dans la force ou d’une manière plus ou moins proverbiale que c’est toujours la loi du plus fort qui règne ou que le plus fort est le roi… R. répond par une réfutation qui du coup instaure une différence spécifique conceptuelle ou une distinction qualitative essentielle entre le droit et la force reposant sur le couple physique/ moral qui d’ailleurs est aussi le couple naturelle/ morale (ou culturelle comme porteur de civilisation). Tout passage ou tout troisième terme rétablissant la continuité serait de l’ordre de la confusion. En raisonnant par l’absurde, R. nous conduit à une conclusion , considérée alors comme suffisamment probable pour donner lieu à un enchaînement de conséquences. La relation à une temporalité problématique est marqué par l’insistance du « sitôt que.. ».

R. souligne l’aspect relatif de la force, et donc l’impossibilité d’instaurer sur elle une relation durable d’autorité ou de maîtrise. « Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître », cette simple proposition est à la fois quantitative, « le plus » et « jamais assez » et « toujours » soit l’éternité ou la très longue temporalité, soit l’illimité et la limite très éphémère d’un strict rapport de forces visibles. .Même les faibles peuvent devenir dominants comme Nietzsche le dira de la démocratie ou du catholicisme, un troupeau de mouton tendre ensemble peut ravager l’esprit de chevalerie, et dans la république ou dans le Gorgias, Platon fait dire aux sophistes, à Calliclès comme à Trasymaque que parfois la force de l’arbitraire d’une bonne lignée dispense de la loi à la condition d’en accepter le renversement, par la masse ou la foule, ne laissant pas le temps de discuter ou dialoguer. Il y a même le nombre des suffrages, donc la majorité.

Pour autant R. ne raye pas totalement l’horrible force comme origine de la civilité, il continue à noter qu’il faut à un moment donné une transformation… » s’il ne transforme sa force en droit et l’obéissance en devoir »…nous voyons ici que l’obéissance et le devoir ne sont pas considérées comme contraire logique ou physique au droit ; c’est le même registre, obéir et faire ses devoirs c’est donc avoir des droits ; car obéir ce n’est pas se soumettre à la nécessité ou à la fatalité, ce n’est pas plier ou ployer, obéir relève d’une obligation appelée ici devoir, c’est-à-dire qu’on se donne relevant d’une instance de décision appelée la volonté ou le consentement, car la force obtient le recul ou l’arrêt, elle n’obtient pas un acte mais une réaction.

Pour autant l’aspect moral de la loi ou de l’obéissance ne conduit pas R. a être naïf, ni sur l’origine du droit et de la loi, ni sur son installation appelée constitution, il note qu’on peut bien ironiser, ha !oui ! ce prétendu droit, regardez néanmoins mon jugement solennel ou le visage de mon enfant devant l’église, et aussi tous ces hommes brigands qui, seuls, sont vils et rapidement en bande de brigands sont arrêtés. Mais l’ironie elle-même est sujette à ironie, car il apparaît bien que l’argent aussi est de l’ordre du quantitatif, les riches règnent et l’inégalité seule est établie, le cynisme si nous le voulons aussi est possible selon cette phrase… il importe donc de voir que justement le moral ou le juste ne règne pas, il doit être ou il doit se transformer ou être le produit d’une transformation se on veut « en fait et en droit » penser ce qui existe. Même du côté de la causalité ou de l’enchaînement des causes et des effets on ne peut pas faire sortir d’une cause physique une cause autre que physique, donc la force appartient à la physique scientifique, et non du droit ; c’est la police qui établit les faits. C’est la justice qui en pense la responsabilité ou l’origine causale. Néanmoins on cède bien à un brigand, dès qu’il tourne le dos on peut tout ce qu’on peut physiquement. La nécessité naturelle du rapport de force tourne et n’a rien à voir avec l’ordre de la volonté qui est non physique, et donc une force ou virtu ou vertu morale. L’intelligence même ne conduit pas à la moralité d’une action, le calcul seul ou l’intérêt bien compris même ne peuvent pas aussi fonder l’ordre de la légitimité ou de la légalité, les deux ensembles, car sinon la légalité n’est que coutume prudentielle sans autre effectivité que le caractère singulier des relations physiques du singe intelligent et calculateur qu’est le prudent, même le « jurisprudent » s’il ne s’appuie sur un consentement tacite qui est en terme de moralité fondateur. R. insiste donc sur la rupture complète des deux ordres pour éviter la confusion sémantique.

De la contradiction en terme de signification il inscrit le passage à l’ordre de la chronologie, l’insistance sur le sitôt que il insiste sur le caractère instantanée et soudain de l’inscription d’un force sur un corps, le temps et la succession ou simultanéité, conduit à la question de la connexion ou de la causalité. Si obéir est une question de force dès que la punition ou contrainte cesse il convient de désobéir, la ruse et l’hypocrisie ou la fausseté ne sont pas sémantiquement dans leur signification moralement négative… Contrairement à l’exercice de la force brute, le droit suppose une certaine durée et même intemporalité. L’obligation est toujours un peu de l’ordre du par soi même, je suis votre obligé, c’est aussi je m’oblige donc je me contrôle et je dois continuer à me tenir la pression ou la contrainte en revanche n’ont aucun caractère de persistance, donc annuler le mot droit il est une redondance sémantique une inutile répétition…D’où la conclusion l’origine du droit même ne peut pas être dans le temps dans l’histoire la force. Si nous nous soumettons au pouvoir à ses armées ou à sa force publique c’est alors que nous nous soumettons volontairement, car le pouvoir n’est jamais que celui que nous lui accordons ; peuple ou souverain, c’est toujours peuple et souverain et donc si nous récriminons comme peuple, il ne faut nous en prendre qu’à nous même ; si nous sommes gouvernant et craignions l’insurrection du peuple c’est que notre autorité est bien à mal.

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