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Rêve Et réalité

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Par   •  9 Février 2012  •  4 152 Mots (17 Pages)  •  22 872 Vues

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« Le Rêve est une seconde vie » dit Gérard de Nerval au début de l’Aurélia. Mais la première vie, celle que nous menons lorsque nous sommes éveillés, est-elle bien différente de la seconde ? L’opposition semble bien évidente. En effet, le rêve dans sa définition même semble dissocié de la réalité. Lorsque nous disons de quelque chose que c’est un rêve, nous entendons naturellement que cette chose n’a rien de réel. Le rêve a cependant plusieurs sens à ne pas confondre, il peut être le rêve au sens d’activité psychique, avec suite d’images se produisant pendant le sommeil. Mais il y a aussi le rêve, comme rêverie éveillée, et comme espérance, désir. Le phénomène semble donc avoir affaire à l'imaginaire et à l'illusion, c’est une construction de l’imagination à l’état de veille, une pensée qui cherche à échapper aux contraintes du réel. Quel peut alors être son rapport à la réalité ? Malgré les apparences, le rêve n’est peut-être pas si irréel. Le fait de rêver n’est-il pas réel ? Tout homme dort, donc chacun rêve, donc le rêve fait bien partie intégrante de notre réalité. Le rêve influence ensuite notre réalité tout comme notre réalité influence nos rêves : nous essayons bien d’expliquer la réalité par le rêve. Ils seraient donc à la fois opposés et liés ? Nous pourrions même pousser l’idée du rêve associé à la réalité jusqu’au bout et nous demander alors : qu’est-ce qui distingue véritablement le rêve de la réalité ? Qui nous dit que toute cette existence n’est pas qu’un simple rêve et ne pouvons-nous pas dire, avec Calderon, que « la vie est un songe » ? Car, lorsque, à l'état de veille, je perçois une réalité qui m'est extérieure, comment puis-je être certain que je ne rêve pas ? Quels sont donc les rapports entre le rêve et la réalité, faut-il les séparer ou sont-ils intrinsèquement liés ?

N’oublions pas qu’il y a différentes réalités, que chacun, hors de la réalité universelle, a sa propre réalité. Prenons le rêve dans le sens de phénomènes psychiques durant le sommeil. Il semble évident dans les termes même du sujet que rêve et réalité sont des notions antinomiques. Réalité vient de « res » la chose et désigne ce qui est réel, et qui n’est pas seulement une invention, une illusion, une apparence. La réalité nous est imposée par le monde extérieur et diffère donc, dans sa définition même, du désir et du rêve. Les philosophes se sont, depuis les débuts de la philosophie, posés la question du rêve en rapport à la réalité, de la distinction entre les deux. Les avancées scientifiques et en psychanalyse ont permis de pousser la réflexion. Quels sont les différents critères de distinction posés permettant aux philosophes d’affirmer qu’il y a une rupture entre le rêve et la réalité ?

L’argument principal et repris par nombre de philosophes est celui des liens entre les événements à l’état de veille contrairement aux événements rêvés qui n’ont pas de liens logiques, de continuité. Pour Hobbes, le propre de la vie éveillée est d’être une vie avec des caractéristiques spécifiques de liaison, de répétition, de régularité des événements. Kant dit pour cela que les événements sont liés causalement du fait des catégories de l’entendement. Ce qui fait le partage, c’est que la régularité des événements de la vie éveillée ne se retrouve pas dans le rêve où il y a absence de liaison. Hobbes pense donc qu’il y a une dissymétrie entre la vie éveillée et la vie de songe. Dans Le Léviathan (« de l’imagination »), Hobbes fait cette autre observation : « parce que dans la veille, je remarque souvent l’absurdité des rêves, alors que je ne rêve jamais de l’absurdité de mes pensées du temps de veille, j’estime avoir la preuve qu’étant éveillé, je sais que je ne rêve pas, même si, lorsque je rêve, je me crois éveillé ». De fait quand nous rêvons nous ne nous posons pas la question de la vraisemblance de ce dont on rêve, ni de son rapport à une autre réalité possible. La certitude, pour Descartes, de l'existence d'un Dieu non trompeur, lui permet de résoudre la question de la distinction du rêve et de la veille qu'avait suscitée son doute méthodique. Les critères retenus sont ceux de la cohérence et de la continuité des perceptions de la veille, contre l'incohérence et la discontinuité des images du rêve (Méditations métaphysiques, VI). De plus il montre que ce n’est pas par la perception, mais par l’entendement seul que l’on peut distinguer le rêve de la réalité. En effet, l’entendement permet d’accéder à des « idées claires et distinctes » que l’on ne peut avoir en dormant.

D’autres arguments sont utilisés et recevables, Platon par exemple pour faire une distinction entre le rêve et la réalité montre que dans les rêves s’expriment des désirs sans limites, maîtrisés dans la réalité. Il rappelle dans un extrait du livre X de la République, ce que Freud reprendra bien des siècles plus tard, cette présence de désirs et de plaisirs déréglés en chaque homme. Il entend par « déréglés » les désirs bestiaux sans pudeur ni raison. Alors que ces désirs n’ont pas n’ont pas libre cours lorsque nous sommes éveillés, ils ne sont plus guidés par la partie raisonnable lorsque nous dormons. Le rêve est le lieu des débordements. La réalité est donc le moment où les désirs peuvent être réglés, alors que le rêve est celui où ils échappent à tout contrôle de la partie raisonnable. Réalité et rêve se distinguent donc par le pouvoir d’extirper ces désirs déréglés. En effet nous ne contrôlons pas nos rêves alors qu’il nous semble contrôler notre réalité, notre raison nous empêche de faire certaine chose, nous permets de respecter une certaine morale qui est absente du rêve. De la même manière on dit « se satisfaire de la réalité », « ne pas placer trop haut ses rêves », dans les rêves nous ne sommes pas raisonnable ni exigent. Freud reprend cet argument et en ajoute d’autres, il a une approche plus psychanalytique. Pour faire une distinction entre le rêve et la réalité, il raconte un rêve où il était heureux de la mort de son père alors qu’il avait en réalité été profondément affecté. Normalement ces deux sentiments contraires devraient s’exclurent, on ne peut éprouver à la foi de la joie et de la tristesse. C’est ainsi qu’il montre une opposition majeure entre le rêve et la réalité : l’inconscient ignore la contradiction. De plus le propre du rêve c’est d’être très banal. Freud voulait mettre en place un dictionnaire des symboles communs des rêves. (Rêver de tomber, de voler, de mourir…) Or on ne peut faire

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