Le désir
Documents Gratuits : Le désir. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 17 Janvier 2012 • 3 403 Mots (14 Pages) • 1 005 Vues
Le désir
Les enjeux de la notion – une première définition
Une réflexion sur le désir se présente d’emblée comme une réflexion sur sa profonde ambiguïté qui est aussi celle de l’homme en son essence. Le désir est toujours désir de quelque chose. Ce « quelque chose » nous manque, que nous en ayons un besoin vital ou non. Ainsi, le désir pourrait se définir par la tension vers le « désirable », que celui-ci soit un objet, une personne ou encore un état de choses. De là, la possession du désirable conduirait à la satisfaction, à la plénitude, à l’apaisement. Le mouvement du désir trouverait ici sa fin. Mais nous savons d’expérience qu’il n’en est pas ainsi. D’une part, l’objet désiré une fois qu’il est possédé perd le plus souvent son caractère de désirabilité. D’autre part, une satisfaction complète du désir semble impossible puisque le désir ne cesse de se tourner vers de nouveaux objets dont il est privé. Sans manque, le désir s’éteindrait. On pourrait dire que cette « fuite en avant » du désir résulte de la distance qui sépare l’homme du seul état en lequel il pourrait se repaître, à savoir le bonheur. Mais on peut aussi penser que jamais le désir ne pourra trouver dans le monde d’objet qui lui convienne ou le satisfasse pleinement. Le désir se définit ainsi par une démesure à l’égard de ses objets. Comme pure puissance de l’homme, comme dimension fondamentale de son essence, il ne s’éteint qu’avec la mort. Ainsi, on comprend que l’insatisfaction le caractérise en profondeur en quoi il peut être utile de trouver des moyens de réguler ou de maîtriser le désir, notamment pour qu’il ne perturbe pas outre mesure l’activité rationnelle de l’homme. Mais peut-être aussi l’insatisfaction du désir est-elle le moteur de l’activité de négation et de transformation du monde et de l’homme. Sans désir, aucune création ne serait plus alors possible.
La maîtrise du désir
« Lorsque cela s’accomplit en nous, les orages de l’âme se dispersent, le vivant ne chemine plus vers ce qui lui fait défaut et ne vise plus quelque supplément au bien de l’âme et du corps. En effet, noud ne sommes en quête du plaisir que lorsque nous souffrons de son absence. Or maintenant nous ne sommes plus dans le manque du plaisir » Épicure, Lettre à Ménécée.
Selon Platon, la seule chose éminemment désirable est la vérité. Mais ce désir qui est à la source de la connaissance ne partage absolument rien avec ces mauvais désirs qui naissent de l’union de l’âme avec le corps. Or, tout ce qui assaille le corps, les maladies, les désirs, les craintes, etc. nous « remplissent » dit Platon, à tel point qu’aucune pensée ne devient plus possible. Ce qu’exige de nous notre corps (qui nous tient par là en esclavage), c’est la possession de biens. Or ceux-ci étant l’objet de nombreuses convoitises entraînent des guerres et des batailles sans fin. Mais même si nous parvenons à un certain état de tranquillité, même si plus rien d’extérieur à nous semble pouvoir entraver notre recherche du vrai, il semble que les désirs du corps ne puissent se taire. C’est ainsi que Platon en vient à conclure, et tel est le thème du célèbre mythe de la caverne, que le seul moyen pour l’homme de parvenir à la vérité, à la contemplation des Idées qui n’ont rien de sensible est de se séparer du corps pour « regarder avec l’âme en elle-même les choses en elles-mêmes ».
Ce qui intéresse en premier lieu la philosophie antique dans sa période hellénistique, c’est de donner lieu à une morale du désir. Épicure entend catégoriser les différentes sortes de désirs. Il faut d’abord distinguer les désirs naturels et les désirs vains. Ensuite on peut différencier dans les premiers ceux qui sont nécessaires au bonheur, ceux qui le sont pour le bien-être du corps, ceux encore qui sont strictement vitaux. Seule une connaissance des catégories du désir peut, écrit Épicure, permettre de sélectionner les désirs, de les approuver ou les refuser, en ayant une juste conception de leurs effets. Le critère de choix est le plaisir, qui est le bien premier. On se méprend souvent sur la conception épicurienne ; il ne s’agit en aucun cas d’une recherche effrénée du plaisir quelles qu’en soient les conditions et conséquences. Au contraire, Épicure nous apprend qu’il faut parfois renoncer à des plaisirs si nous savons qu’ils seront suivis par des douleurs plus grandes et, inversement, qu’il faut parfois accepter la douleur si elle se trouve sur le chemin qui mène à un plaisir qui la surpasse.
Les stoïciens donnent lieu à une formulation sensiblement différente. Épictète affirme ainsi qu’il faut distinguer les choses qui dépendent de nous de celles qui ne dépendent pas de nous. Il faut détourner son désir des secondes et accepter les vicissitudes ce sur quoi nous ne pouvons rien, quand bien même ce serait la maladie ou la mort qui nous affligerait. La pensée de Descartes est proche de la morale stoïcienne. Il affirme que c’est pour lui une règle de conduite de préférer réformer ses désirs plutôt que l’ordre du monde car les seules choses qui soient véritablement en notre pouvoir sont nos pensées. Or, c’est une propriété de la volonté de ne désirer que les choses qui semblent possibles. En effet, écrit Descartes, nous ne désirons pas posséder le royaume de Chine, cette possession ne nous manque pas. Ainsi, si nous apprenons à ne désirer que ce que nous avons la certitude d’acquérir, alors plus rien ne pourra nous manquer. Nous aurons un sentiment de plénitude plus développé que celui qui, possédant toutes les richesses, ne sait pas mettre fin à sa conquête. Descartes a bien soin de préciser que c’est là un exercice extrêmement difficile.
Terminons cette partie consacrée à la maîtrise des désirs par la critique virulente qu’en fait Nietzsche. Selon lui, la condamnation du désir n’est rien d’autre qu’une manifestation du nihilisme, une dépréciation de la vie qui naît de la peur de souffrir. Se situer Par-delà bien et mal, c’est pour Nietzsche renverser toutes les valeurs, opposer à la volonté de néant qui exige l’extinction
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