Cartier Et Lahontan
Dissertation : Cartier Et Lahontan. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar great_1 • 3 Mars 2014 • 434 Mots (2 Pages) • 1 592 Vues
Adario. — Tout beau, n’allons pas si vite, le jour est long, nous pouvons parler à loisir, l’un après l’autre.
Tu trouves, à ce que je vois, toutes ces choses bien dures. Il est vrai qu’elles le seraient extrêmement pour ces Français qui ne vivent, comme les bêtes, que pour boire et manger, et qui n’ont été élevés que dans la mollesse : mais dis-moi, je t’en conjure, quelle différence il y a de coucher sous une bonne cabane, ou sous un palais ; de dormir sur des peaux de castors, ou sur des matelas entre deux draps ; de manger du rôti et du bouilli ; ou de sales pâtés et ragoûts, apprêtés par des marmitons crasseux ? En sommes-nous plus malades, ou plus incommodés que les Français qui ont ces palais, ces lits et ces cuisiniers ? Hé ! Combien y en a-t-il parmi vous, qui couchent sur la paille, sous des toits ou des greniers que la pluie traverse de toutes parts, et qui ont de la peine à trouver du pain et de l’eau ? J’ai été en France, j’en parle pour l’avoir vu […].
Lahontan. — Hé bien, tu veux donc que je croie les Hurons insensibles à leurs peines et à leurs travaux, et qu’ayant été élevés dans la pauvreté et les souffrances, ils les envisagent d’un autre œil que nous ; cela est bon pour ceux qui ne sont jamais sortis de leur pays, qui ne connaissent point de meilleure vie que la leur, et qui n’ayant jamais été dans nos villes, s’imaginent que nous vivons comme eux ; mais pour toi, qui as été en France, à Québec et dans la Nouvelle-Angleterre, il me semble que ton goût et ton discernement sont bien sauvages, de ne pas trouver l’état des Européens préférable à celui des Hurons. Y a-t-il une vie plus agréable que celle d’un nombre infini de gens riches à qui rien ne manque ? Ils ont de beaux carrosses, de belles maisons ornées de tapisseries et de tableaux magnifiques ; de beaux jardins où se cueillent toutes sortes de fruits, des parcs où se trouvent toutes sortes d’animaux ; des chevaux et des chiens pour chasser, de l’argent pour faire grosse chère, pour aller aux comédies et aux jeux, pour marier richement leurs enfants, ces gens sont adorés de leurs dépendants. N’as-tu pas vu nos princes, nos ducs, nos maréchaux de France, nos prélats et un million de gens d’autres états qui vivent comme des rois, à qui rien ne manque et qui ne se souviennent d’avoir vécu que quand il faut mourir ? […]
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