Étude du supplément du journal Au voyage autour de monde de Louis-Antoine de Bougainville par Diderot
Dissertation : Étude du supplément du journal Au voyage autour de monde de Louis-Antoine de Bougainville par Diderot. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar brenyermat • 3 Juin 2015 • 1 939 Mots (8 Pages) • 1 302 Vues
Supplément au Voyage de Bougainville, Diderot, 1796,
Eléments d'introduction
- auteur, oeuvre : Denis Diderot : philosophe, romancier*, dramaturge, essayiste, critique d'art fçs (1713 – 1784) (*voir Jacques le fataliste et son maître, extr étudié ds sqce incipits de romans).
Publicat° en 1771 d'un Voyage autour du monde par le navigateur fçs Bougainville, ds lequel il raconte notamment l'expédit° à Tahiti, île initialement découverte en 1767 par un navigateur anglais (Wallis). En 1772, Diderot écrit Supplément au Voyage de Bougainville, dialogue philosophique (qui réunit deux personnages imaginaires) entre B, porte-parole de l'auteur qui fait l'éloge des Tahitiens, et A, sceptique. Oeuvre publiée de manière posthume en 1796. Oeuvre philosophique qui ne cherche pas à être vraisemblable dans son dispositif fictionnel : trame narrative et personnages invraisemblables ms au service de l'argumentation philosophique.
- présentat° de l'extrait : un vieillard tahitien prend la parole au moment où Bougainville et son équipage quittent l'île en présence des Tahitiens en pleurs. Le passage précédant l'extrait raconte comment ce vieil homme a jusque là exprimé par son mutisme et son attitude en retrait sa désapprobation à l'égard de la présence des Européens. A ce mutisme va succéder une longue harangue*, adressée d'abord aux Tahitiens puis à Bougainville. (* long discours solennel prononcé par un personnage important devant une assemblée)
- problématique : la visée argumentative du texte et les procédés mis en oeuvre
- annonce du plan : I la construction d'une figure de vieux sage, II représentant d'une communauté digne d'éloge et III blâme de la civilisation européenne et du colonialisme
I un vieux sage
A le contexte valorise le discours et son locuteur : les lignes précédant la harangue contribuent à conférer une autorité au locuteur et donc à valoriser son discours : évocation de sa muette réprobation + mise en scène de sa prise de parole « ce vieillard s'avança d'un air sévère, et dit »
B il affiche une connaissance du passé, du présent et de l'avenir
le passé : analyse des transformations opérées sur les Tahitiens par les Européens : l. 26 à 30 puis 44 à 47
le présent : analyse comparée de la culture des Tahitiens et des Européens (2ème partie de la harangue)
l'avenir : discours prophétique qui annonce la future colonisation l. 10 à 15
C il montre une parfaite maîtrise de l'art oratoire et des stratégies de conviction et de persuasion
1) construction du discours avec succession d'interlocuteurs Tahitiens (l. 9, 16), Bougainville (l. 21 à 49), Orou (l. 32, 33), chacun des deux discours étant lui-même rigoureusement construit
-discours aux Tahitiens : a- injonction (l. 9, 10), b- prophétie (l.10 à 15), c- référence à son statut de vieillard dégagé de l'avenir (l. 15, 16), d- allusion à une solution qui empêcherait la prophétie de se réaliser (l. 16 à 18), e- conclusion (l. 18, 19)
-discours à Bougainville : a- injonction (l. 21, 22), b- opposition des deux cultures et évocation des méfaits de la colonisation (l. 22 à 31), c- arguments contre la colonisation (l. 31 à 47), d- injonction et conclusion (l. 47 à 49)
2) utilisation de deux registres : pathétique (surtt ds la 1ère partie, ex « Pleurez, malheureux Otaïtiens ») et polémique (l'ensemble du discours)
3) utilisation de nombreux procédés rhétoriques : exclamations (l. 16, 34, 40), questions oratoires (l. 31, 34, 37...)...
D il se montre éthiquement irréprochable (procédé oratoire classique)
1) il montre de la compassion à l'égard de ses compatriotes (« Ô Otahitiens ! Ô mes amis ! »), alors que, vu son grand âge, il n'est pas concerné (« je touche à la fin de ma carrière ; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point. » Rmq « calamité » mis en relief par détachement du GN + reprise par deux pronoms : que et la
2) il se refuse à suggérer une solution violente (tuer les Européens) qui garantirait pourtant l'avenir de Tahiti (l. 16 à 18)
3) il se présente comme membre d'une communauté pure et innocente (voir II)
II. l'éloge de la civilisation tahitienne et de la vie naturelle
A. pureté et innocence :
> Série d'affirmations
1) « Nous sommes innocents, nous sommes heureux » : persuasion liée à la juxtaposition de deux phrases simples (dont la simplicité est à l'image de la vie naturelle) et répétition du « nous » qui suggère cohésion sociale. Idée que bonheur = conséquence de l'innocence, c-à-d pureté originelle : la virgule contient idée de csqce implicite.
2) « Nous suivons le pur instinct de la nature ». Ce qui la rend convaincante : figure (personnificat° de la nature, dotée d'un instinct) qui renforce l'idée exprimée : harmonie homme / nature
[*
3) « Ici tout est à tous » : impression d'évidence liée à rythme 2 / 2 / 2 + paronymie tout / tous
Interrogation sur la notion de propriété (cf idées de Rouseau en conclu)
4) « Nos filles et nos femmes nous sont communes » : « nos, nos, nous » préparent « communes »
Cette phrase suggère liberté sexuelle donc interroge a contrario la rigidité des moeurs occidentales.
> interrogation sur un des fondements de la morale européenne : la malédiction de la Genèse (sexualité = faute, honte) Ici au contraire : libre exercice de la sexualité = preuve de pureté et d'innocence.
B. valeurs morales et idéologiques
1) générosité et tolérance :
- l'attitude accueillante des Tahitiens : lignes qui précèdent notre extrait + « Nos filles et nos femmes nous sont communes, tu as partagé ce privilège avec nous »
- « nous avons respecté notre image en toi » : l'affirmation
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