Faut-il attribuer le désir à l’inconscient ?
Dissertation : Faut-il attribuer le désir à l’inconscient ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Claudia Bléandonu-Berberian • 16 Juin 2020 • Dissertation • 2 306 Mots (10 Pages) • 654 Vues
Faut-il attribuer le désir à l’inconscient ?
« Le plaisir imaginé s’appelle désir » - Ricoeur.
Par cette citation, force est de constater que le désir sollicite l’activation de cette faculté intellectuelle que l’on nomme imagination.À la différence de la passion qui, elle, est complétement passive, il y a dans le désir une part de responsabilité. Toutefois, dire que nous sommes responsables et donc maîtres de tous nos désirs semble absurde et revient à nier l’existence d’une vie propre de l’âme hors d’atteinte de la conscience et de la volonté consciente : l’inconscient. Pourtant, si je désire obtenir une bonne note à mon devoir de philosophie, j’ai conscience de ce désir et je ferais tout mon possible pour l’assouvir. Or, mon but ultime est-il seulement d’obtenir une bonne note à ce devoir ? N’est-il pas plutôt celui d’être la meilleure et d’obtenir la reconnaissance de mes paires ? Ainsi, derrière chaque désir se cache un autre désir plus profond. On ne peut constamment attribuer l’origine de nos désirs à notre conscience. N’y a-t-il pas ici une dimension de l’objet de notre désir qui nous échappe ? Le désir se rapproche du besoin voire même de l’instinct car il désigne un élan involontaire dont le but est de combler un manque. C’est pourquoi, se poser la question de la part d’inconscient dans le désir semble tout à fait légitime. Face à l’incompréhension de l’insatiable désir de l’Homme, on serait tenté d’inconscientiser le désir. C’est-à-dire de déresponsabiliser l’Homme face à ses propres désirs. Toutefois, est-ce vraiment raisonnable ? Mais alors, comment se justifient nos désirs ? Nous allons tenter de répondre à cette interrogation. Tout d’abord par l’évidence que tout désir existe grâce à l’état de conscience de ce désir, puis, ensuite par une seconde évidence qui est celle de l’existence d’un inconscient nous rappelant sans cesse que certaines données de notre psyché nous échappe, nous renvoyant finalement ainsi à un désir que l’on devrait justifier par la quête de soi.
1. S’il y a désir, il y a conscience du désir.
Nos désirs naissent d’un manque dont nous sommes conscients.
On ne peut désirer quelque chose que l’on ne connaît pas. Le désir, c’est le désir d’un manque, un manque induisant que ce qui nous manque, nous l’avons déjà eu dans le passé, réellement ou de façon fantasmatique. Il implique donc une régression, un désir d’avant. C’est pour cela aussi qu’un certain nombre d’entre nous ont tendance à dire « c’était mieux avant ». Le désir est issu à l’origine du besoin et surtout du plaisir qui a été pris lors de l’assouvissement des besoins.Et ce désir ne peut véritablement devenir désir que s'il devient conscient. Ainsi, pour Spinoza, le désir « se rapporte généralement aux hommes, en tant qu'ils ont conscience de leur appétit. » (Ethique) Pour se trouver véritablement satisfait, le désir doit passer par la conscience. Sinon, comment l'homme pourrait-il utiliser ses moyens intellectuels pour satisfaire ses désirs ? C'est pour cela que le désir est considéré par certains philosophes comme ingénieux et créateur. Chez Spinoza « Le désir est l’appétit accompagné de la conscience de lui-même. » Les différents appétits (faim, soif, besoin sexuel) de l’Homme sont inconscients ou instinctifs. Par exemple, on respire ou on digère généralement sans y penser. Or, à certains appétits vient s’ajouter la conscience. Et cette conscience transforme le simple appétit en désir : la faim devient désir de tel plat ; la pulsion sexuelle devient désir de telle personne.
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De plus, chaque désir a un but.
Chez Platon c’est la recherche de la « beauté » divine. Si l’on se réfère au Phèdre, l’objet privilégié du désir humain est le corps lorsqu’il est beau, mais la beauté de l’objet du désir ne lui est pas inhérente, elle tend seulement à élever l’âme vers la contemplation de la Beauté en tant que telle. Le platonisme ne méprise pas le désir, il le justifie et l’associe au vrai et au bien comme une des idées les plus élevées. L'intuition de la beauté en soi est supérieure à la jouissance provoquée par les beaux objets particuliers. Dans Le Banquet, il montre comment on peut passer du désir des beaux corps à l’amour des belles âmes pour parvenir à la contemplation de la beauté en soi. Toutefois, cette quête peut s’avérer lourde et douloureuse et conduit, bien souvent, à un sentiment de frustration et donc au malheur. C’est pour cela qu’il faut pour certains le réprimer.
La répression des désirs est possible car nous en sommes conscients.
Celui qui saura couper le désir à la racine aura du même coup écarté la source de tout malheur. Chez les stoïciens, les choses qui dépendent de nous doivent être distinguées des choses qui ne dépendent pas de nous. Seules les premières doivent être privilégiées et nous devons accepter la fatalité des secondes (comme la maladie, la mort). La pensée de Descartes est proche de la morale stoïcienne dans le sens où l’on ne doit désirer que ce qui est possible. Pour lui, si nous apprenons à désirer uniquement ce que nous pouvons posséder, alors plus rien ne nous manquera et ce sera le bonheur. Epicure disait : « Le bonheur ne consiste pas à acquérir et à jouir, mais à ne rien désirer, car il consiste à être libre ». Ainsi, on arrive à une absence de désir que l’on appelle ataraxie. Mais ne rien « désirer » n’est-il également pas dangereux ? La conscience de nos désirs est ce qui nous procure l’intensité et la force d’agir pour les réaliser. Le désir est avant tout une force motrice qui pousse l’Homme à entreprendre. Il est ainsi à l’origine des plus grandes créations humaines. Et pourtant, malgré cela, l’assouvissement de ses désirs ne conduit pas l’Homme au bonheur. L’insatisfaction du désir ne révèle-t-il pas que nous ne savons pas toujours ce que nous désirons réellement ?
2. Le caractère insatiable du désir prouve que ce dernier nous échappe et nous dépasse.
Les prémices de l’inconscient.
Dans la philosophie moderne classique, à une époque où le mot n’existe pas, Schopenhauer peut être considéré comme un pionnier de l’inconscient. Le concept de volonté se voit investi d’une force et d’une inconscience quasi-totale. Là où Rimbaud dira « je est un autre », Schopenhauer déclare
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