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Fiche de lecture Culture Numérique, D. Caron

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Par   •  13 Septembre 2021  •  Fiche de lecture  •  2 990 Mots (12 Pages)  •  638 Vues

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Fiche de Lecture

Nisrine Hammani - 813

Culture Numérique

Dominique Cardon

Paris, Les Presses de Sciences Po, Séries: « Les petites humanités », 2019.


Introduction

Sociologue des médias et des technologies de l’information et de la communication à Sciences Po, Dominique Cardon mène dans ce livre une réflexion sur les origines de ce qu’il nomme une “culture numérique”, c’est-à-dire « la somme des conséquences qu’exerce sur nos sociétés la généralisation des techniques de l’informatique ».

Le livre développe une perspective historique et généalogique d’une part, synthétique de l’autre, des effets directs ou indirects, des conséquences et implications de la révolution digitale sur les sociétés.

Comment le numérique a-t-il été à l’origine de mutations de nos sociétés en ayant des conséquences à la fois sur ses structures et sur les individus mêmes ?

Poser cette question revient à s’interroger sur la manière dont l’innovation et le progrès technique peuvent conduire à des évolutions de l’activité humaine.

D. Cardon fonde, au fil des chapitres, son raisonnement sur trois axes:

  • L’augmentation du pouvoir des individus par le numérique
  • L’apparition de formes collectives nouvelles et originales
  • La redistribution du pouvoir et de la valeur



Les origines du numérique et la généalogie d’Internet:

Comment une nouvelle innovation technique, Internet, peut-elle être accompagnée d’une dimension culturelle, sociale et politique ?

Il s’agit pour Cardon de montrer historiquement que la naissance d’Internet est celle d’un nouvel espace commun, et d’analyser sociologiquement cette généalogie.

Une naissance ambivalente :
Du langage binaire jusqu’à d’Internet, le numérique s’est développé sous la confrontation de cultures différentes. Il naît en combinant les savoirs d’ingénieurs, génies informatique, et de l’armée à la recherche de technologies pointues pour mener à bien des opérations militaires.

En effet, Cardon montre que la révolution du numérique et l’avènement d’internet ont d’abord naquit sous une logique de commande militaire. L’essor du numérique dans un contexte de guerre explique en grande partie le rôle important que joue l’ambivalence entre les idées de contrôle (des autorités voulant de prendre en main le web) et de liberté (des universitaires à travers une contre-culture) associées à internet.

Une troisième instance a participé au développement d’internet: les hippies et “passionnés d’informatiques”, futurs hackers. Un vrai système de coopération se met en place: même si ce système est indirect et que les personnes n’ont pas travaillé ensemble, ils concourent tours un un projet global, celui de l’innovation du numérique.

On a bien une naissance dans la confrontation dans une origine à la fois militaire et libertaire des réseaux numériques.

La Coopération et l’Émancipation au coeur d’Internet :

Internet est le fruit d’une intelligence collective, un outil coopératif fabriqué en logiciels libres par les pionniers.

La mise en réseau des ordinateurs, aujourd’hui banalisée, constitue proprement la révolution numérique. L’invention du web signe l’entrée de l’informatique dans un monde nouveau, monde virtuel où les échanges sont si faciles que la liberté d’expression, les dogmes et codes sociaux se trouvent renversés et redéfinis: l’abolition des différences, des inégalités et des frontière caractérise l’utopie des pionniers du numérique. Le mouvement hippie sème dans le monde digital la graine de l’“empowerment”, l’émancipation des utilisateurs d'une certaine tutelle, au travers du web. D’un autre côté, la gouvernance du réseau est régie par des normes techniques non décidées par les États (au départ) ni par des entreprises, mais par un “collectif ouvert et auto-organisé”.

Mais dominique Cardon nuance cette perspective, en soulignant qu’elle ne représente qu’une utopie puisque les distinctions sociales et culturelles se maintiennent sur internet et ce dernier reste soumis à des logiques de contrôle, comme l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) qui reste sous tutelle des EUA jusqu’en 2016, ou W3C (World Wide Web Consortium) qui est influencé par les géants du web comme Google et Facebook.

Toujours est-il que la dimension coopérative dans la création d’Internet s’ancre aussi dans le Web à son invention, lieu privilégié de la naissance de communautés.

Le Web, un bien commun

Le web est une sous-partie d’Internet, né par l’invention du lien hypertexte de l’informaticien britannique Tim Berners Lee en 1990.

Une diffusion massive :

Les liens http, le html et les “browsers” se développent tout au long des années 90. Ces innovations successives constituent une massification, puisqu’elles caractérisent la diffusion d’un réseau réservé à une élite aux grandes compétences informatiques au grand publique, notamment à partir de l’année 1995.

Dominique Cardon souligne qu’une décision a été fondatrice de cette transformation :
Le 30 avril 1993 le CERN renonce à ses droits d’auteur sur le logiciel du World Wide Web, le fameux www, offrant ainsi la technologie de l’HTML au monde entier. Ainsi,
“les liens hypertexte appartiennent désormais à tous, ils constituent un bien de l’humanité”.

L’invention du Web se présente à ses prémices comme une véritable révolution. Donnant une impression de coupure avec l’anonymat, l’ouverture d’un monde indépendant, le monde “en ligne” devient une sphère de réinvention des relations sociales les rendant plus authentiques et plus égalitaires.
Mais Dominique Cardon insiste sur le fait que plus Internet se développe en conduisant à une massification de ses usages, plus il apparaît comme étant un “prolongement numérique des rapports sociaux ordinaires”, sans véritable rupture entre le réel et le virtuel.

Le Web, une communauté d’individus libres :

Les premières communautés en lignes naissent aux États-Unis au milieu des années 1990. Le mot “communauté” est un terme spécifique à internet, à sa dimension libertaire de coopération.
Le 8 Février 1996, John Perry Barlow publie la “Déclaration d’indépendance du cyberspace” consacrant la clôture de l’ère des pionniers l’avènement du web comme un bien commun.

Internet devient une affaire d’individus car son usage comme outil d’émancipation est mis au premier plan. Mais l’individualisme qu’il offre, souligne Cardon, n’est ni égoïste ni obéissant à des dogmes préétablis. Le web, surtout, reflète une logique de choix des individus, en ayant la capacité (donc le pouvoir) de choisir leur communauté librement.

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