Les réécritures d'Andromaque
Cours : Les réécritures d'Andromaque. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Aurora68 • 18 Octobre 2020 • Cours • 3 399 Mots (14 Pages) • 712 Vues
Sujet réécritures d’Andromaque, corrigé
Réécrire est un processus de création littéraire qui traverse toute l'histoire littéraire. Montaigne rappelle dans les Essais, III, 13 : «Nous ne faisons tous que nous entregloser» et Julien Gracq en 1961 dans Préférences affirme que : «Tout livre pousse sur d'autres livres, et peut-être que le génie n'est pas autre chose qu'un apport de bactéries particulières, une chimie individuelle délicate, au moyen de laquelle un esprit neuf absorbe, transforme, et finalement restitue sous une forme inédite non pas le monde brut, mais plutôt l'énorme matière littéraire qui préexiste à lui». Réfléchir aux réécritures, c'est comprendre comment les textes voyagent dans l'histoire littéraire, comprendre les choix opérés par les auteurs et s'interroger sur leurs intentions.
QUESTION SUR LE CORPUS
Racine, Giraudoux et Marcel Aymé ont présenté tous trois des réécritures du mythe d’Andromaque à travers respectivement Andromaque, de1667, La Guerre de Troie n'aura pas lieu, de 1935 et Uranus, publié en 1948. Quelles variations de la figure d’Andromaque proposent-ils ?.
Tout d’abord, les variations reposent sur une transposition de genre. En effet, l’hypotexte, L’Iliade d’Homère, est une épopée qui glorifie les Grecs à travers le récit de leurs exploits. Or, Racine et Giraudoux ont opté pour le genre théâtral pour réécrire le mythe d’Andromaque, ce qu’indiquent les didascalies : « Andromaque/ Céphise » pour Racine, et « Il l’a prise dans ses bras, l’a amenée au banc de pierre, s’est assis près d’elle. Court silence. », pour Giraudoux. Ces indications scéniques donnent vie au mythe en proposant des êtres en chair et en os discutant directement sur scène. Les dialogues théâtraux concourent également à cette redynamisation du mythe. Racine développe un dialogue pathétique entre Andromaque et sa confidente Céphise. Les nombreuses questions que se pose la jeune femme : « Quoi ? Céphise, j'irai voir expirer encor / Ce fils, ma seule joie, et l'image d'Hector ? », et la gradation du vers 24 mettent en évidence le dilemme d’Andromaque. Giraudoux, quant à lui, expose un dialogue philosophique et engagé qui dénonce la guerre avec virulence. Andromaque déclare ainsi à propos des portes de la guerre : « Ferme-les. Mais elles s’ouvriront. » Ainsi, les portes qu’Hector se propose de fermer à jamais deviennent la métaphore de la paix impossible. Ces deux adaptations théâtrales du mythe d’Andromaque insistent donc sur sa portée tragique.
En outre, les variations de la figure d’Andromaque résultent des choix formels opérés par les écrivains. Optant pour la tragédie classique, Racine et privilégie l’alexandrin. Il prête à Hector ces propos adressés à Andromaque : « Si d'un heureux hymen la mémoire t'est chère, /Montre au fils à quel point tu chérissais le père ». l’alexandrin met en valeur la rime entre « chère » et « père », et l’ultime vœu du défunt en est amplifié. La figure d’Andromaque est donc magnifiée par la forme versifiée. Giraudoux a choisi la prose. Andromaque refuse que son fils devienne un combattant et déclare : « Je le tuerai plutôt. » Giraudoux a modernisé le mythe d’Andromaque en l’inscrivant dans les préoccupations humanistes des années 30. Aymé a choisi, quant à lui, une forme hybride qui parodie le texte source. Son roman est en prose, mais Léopold est fier d’avoir ajouté un alexandrin à la pièce : « Passez-moi Astyanax, on va filer en douce. » Le vocabulaire familier donne une dimension burlesque au propos et le décalage burlesque à l’œuvre. Aymé parodie non seulement Homère, mais aussi Racine. Léopold s’imagine en héros sauvant la veuve et l’orphelin. Le registre de langue participe donc des variations de la figure d’Andromaque, la poétisant, la modernisant ou la parodiant.
Enfin, les auteurs procèdent par amplification ou par réduction pour réécrire le mythe. Racine opte pour le discours délibératif d’Andromaque et place son intrigue après le décès d’Hector. Andromaque est très claire : « Dois-je oublier Hector privé de funérailles, /Et traîné sans honneur autour de nos murailles ? » Racine a su rappeler en deux vers tout ce qui précède sa pièce, la mort d’Hector et la façon horrible dont les Grecs l’ont traité. En réduisant de la sorte le propos, il met l’accent sur les « suites » de l’histoire, sur l’avenir de la veuve Andromaque. Giraudoux reprend, quant à lui, le dialogue d’Hector et d’Andromaque présent chez Homère, mais lui assigne par amplification une portée bien plus engagée et politique. Hector dit ainsi : « Si toutes les mères coupent l’index droit de leur fils, les armées de l’univers se feront la guerre sans index... » Aymé, enfin, ne traite le mythe que par allusions à peine retranscrites, il cite même textuellement Racine : « Faut-il qu'un si grand cœur montre tant de faiblesse ? » La figure d’Andromaque n’est finalement que le prétexte à la focalisation interne de Léopold qui se rêve héros et écrivain. Racine opte donc pour la réduction, Giraudoux et Aymé amplifient. Mais quoiqu’il en soit, ils proposent tous trois leur propre interprétation de la figure d’Andromaque, l’un la voit comme une femme désespérée prise au piège, l’autre, comme une militante antimilitariste, et le troisième comme un personnage fascinant propre à susciter les élans créatifs du héros.
Les trois auteurs proposent donc des variations de la figure d’Andromaque propres à réactualiser le mythe et à l’enrichir. Le processus de la transposition a permis à Racine et à Giraudoux de donner une voix et un corps aux personnages. La transcription modernise, poétise ou caricature le mythe. L’amplification et la réduction permettent enfin aux auteurs de donner une interprétation personnelle d’une figure littéraire et légendaire.
COMMENTAIRE Vous commenterez le texte C.
Problématique
Quel intérêt et quelle signification présentent la réécriture d’Andromaque dans le roman de Marcel Aymé Uranus ?
Plan détaillé
I Marcel Aymé présente un héros ordinaire
a) le passage est centré sur Léopold dont on suit le parcours
« Tout en marchant, Léopold se laissa distraire de sa colère par le souvenir d'Andromaque » 1 « Soudain, il s'arrêta au milieu de la rue » 13 « Cependant, la rue n'avait pas changé d'aspect » progression de la narration, choix des temps, cadre réaliste. Focalisation ext=>interne : un personnage ordinaire, dans un cadre banal.
b) Son monologue intérieur constitue l’essentiel du passage
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