Sport Politique
Dissertations Gratuits : Sport Politique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar mouradmgs • 20 Avril 2015 • 3 221 Mots (13 Pages) • 1 934 Vues
Alfred WAHL, professeur émérite à l’université de Metz.
Lors du congrès de Neuchâtel, le 25 novembre 1975, le président du Comité
international olympique (CIO), Juan Antonio Samaranch, déclare : « Nul doute
que les compétitions sportives, et en particulier les Jeux Olympiques, reflètent
la réalité du monde et constituent un microcosme des relations internationales. »
De fait, ce point de vue s’est largement répandu chez les observateurs politiques
depuis avril 1971, date à laquelle une équipe américaine de ping-pong va en
Chine alors que ce pays n’entretient pas de relations diplomatiques avec les
États-Unis. Cette très insignifiante page de l’histoire des sports est immédiatement
célébrée comme césure historique. Et se retrouve même dans les encyclopédies
à l’entrée « diplomatie du ping-pong ». Plus de doute : il y a un rapport
immédiat entre sport et problèmes internationaux, d’autant que, selon le président
Nixon, « en jouant au ping-pong, nos deux pays ont effacé les incompréhensions
du passé ».
Rien de nouveau cependant pour les initiés. La renaissance des Jeux Olympiques
en 1896 était imprégnée d’une volonté de pacifier les rapports entre les
nations. Déjà les Jeux de l’Antiquité s’ouvraient sur l’instauration d’une trêve
au sein du monde grec.
L’objectif de départ, c’est la promotion d’un esprit antinationaliste et de la
fraternité entre les sportifs : d’où la fondation de fédérations nationales par sport
pour aménager les relations sportives entre les nations. Mais tout de suite il
s’agit de relations internationales presque ordinaires : les compétitions vont
reproduire symboliquement les rivalités entre les nations, ou encore internes à
ces dernières ; elle ne sont qu’« euphémisation » d’affrontements plus violents
par le biais des règlements.
Sport et politique, toute une histoire !
Alfred Wahl
14 Alfred Wahl
L’utopie supranationale n’a pas résisté longtemps aux réalités. Les toutes
premières confrontations internationales sont aussitôt chargées d’enjeux politiques.
Il existait tout juste quatre équipes de football-association à Paris, en
1893, que l’une d’elles envisage de rencontrer une équipe de Strasbourg, alors
allemande. Aussitôt, un dirigeant de l’Union des sociétés françaises de sports
athlétiques (USFSA), la fédération omnisports, signale qu’« avant d’accepter de
jouer une telle rencontre, surtout à Strasbourg, il faudrait d’abord être sûr de la
remporter ». Ainsi, pour ce représentant d’une instance soucieuse de se placer
hors du champ politique, le prestige de la France est en jeu.
De son côté, l’écrivain Charles Maurras, futur directeur de l’Action française,
en un premier temps inquiété par la volonté de fraternisation internationale,
se rassure vite. Il se réjouit à l’avance, en 1896, de l’échec annoncé du
« cosmopolitisme sportif » ; le sport va encore exaspérer les passions patriotiques
: « Maintenant les peuples vont se fréquenter directement [par le sport],
s’injurier de bouche à bouche et s’engueuler coeur à coeur. La vapeur qui les a
rapprochés ne fera que rendre plus faciles les incidents internationaux. »
Certes, on ne procède pas encore au décompte minutieux des résultats, mais
c’est parce que les rencontres internationales entre sélections nationales sont
encore rares. Les hymnes nationaux, par contre, sont exécutés, ce qui n’est pas
conforme à l’esprit originel du sport.
Le gouvernement français sera un des premiers à développer une véritable
politique sportive au lendemain de la Grande Guerre, une section Tourisme et
sport étant créée en 1920 au sein du ministère des Affaires étrangères et rattachée
au Service des oeuvres françaises à l’étranger (SOFE). Les athlètes sont donc
considérés comme des ambassadeurs, au même titre que les artistes, et ils bénéficient
de subventions en matière de compétition à l’étranger. « Le sport est
devenu une affaire d’État », déclare Gaston Vidal, directeur du Service de l’éducation
physique. Un rapport du SOFE de 1921 propose d’intégrer dans « les films
cinématographiques de propagande pour l’étranger quelques épisodes de grands
matchs où la France s’est classée première ». Les victoires sont désormais
perçues comme des indices de la vitalité d’un peuple et en tant qu’atout des
régimes.
C’est aussi au lendemain de la guerre que se produit la première campagne
de boycott. L’initiative vient du mouvement sportif anglais qui pousse la FIFA à
interdire les matchs organisés avec
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