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Montaigne - Qui Sont Les Sauvages ?

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Par   •  18 Mai 2014  •  1 409 Mots (6 Pages)  •  1 650 Vues

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Question : De quelle manière Montaigne remet-il en cause les notions de civilisation et de sauvagerie ?

Introduction : 1) Montaigne est considéré comme un des plus grands penseurs du mouvement humaniste. Son livre modestement intitulé Essais, publié à partir de 1580, aborde de façon personnelle toutes sortes de sujet moraux, philosophiques, psychologiques… (l’éducation, l’amitié, la mort…). La découverte du Nouveau Monde, qui a mis les Européens en contact avec des hommes très différents, a suscité bien des réflexions chez certains, tandis que d’autres ont voulu imposer une vision commode reproduisant la dichotomie entre civilisés et barbares déjà proposée par les Grecs de l’Antiquité.

3) Montaigne se livre ici à une argumentation directe, qui prend la forme d’une réflexion personnelle, à la première personne, au présent de généralité, où il exprime son opinion justement sur ce thème de la civilisation et de la barbarie, remettant en cause des idées reçues acceptées par beaucoup sans esprit critique.

4) De quelle manière Montaigne remet-il en cause les notions de civilisation et de sauvagerie ?

5) I – Nous étudierons d’abord la façon dont Montaigne critique la prétendue civilisation européenne… II – Puis nous verrons comment il donne au contraire une vision positive des « sauvages »… ces deux prises de position étant paradoxales.

I – Une critique de la prétendue civilisation européenne

Allant à l’encontre des tendances habituelles à l’ethnocentrisme, Montaigne offre une représentation très critique de la « civilisation » européenne.

1. Que lui reproche-t-il ? Deux choses essentiellement :

a. Une certaine étroitesse d’esprit. La ligne 3, principalement, avec la tournure réductrice et restrictive « n’avons autre… que », exprime l’idée que les critères utilisés par les Européens, prétentieux, pour juger (de la « vérité », de la « raison », donc de la supériorité de certains hommes sur d’autres hommes : les sauvages seraient dans l’erreur et dépourvus de raison) sont bornés à leurs propres habitudes (« usances », l.4).

b. Mais le principal reproche est celui de l’artifice et de l’abâtardissement. La notion d’artifice est utilisée à la ligne 7, et à rapprocher de la notion d’art à la ligne 12 : la critique consiste à déplorer que les Européens se soient éloignés de la nature (artifice est antonyme de nature). La notion d’abâtardissement apparaît à la ligne 9. La critique consiste ici à stigmatiser (condamner violemment) une sorte de dégénérescence, de décadence, fondamentalement opposée à la notion de civilisation.

2. La violence de la critique. Le lecteur est frappé par la violence des propos de Montaigne lorsqu’il s’attaque à la civilisation européenne. Nous sommes dans un registre polémique. A travers des phrases affirmatives au présent de généralité, marquant la certitude et la conviction, l’auteur semble donner une sorte de leçon de morale, à travers notamment un vocabulaire aux fortes modalisations péjoratives. On relèvera ainsi, comme nous l’avons vu, le mot « abâtardies », quasiment injurieux… Mais aussi des mots tels que « altérés » et « détournés » (l.7), « rechargé » (l.13), « étouffée » (l.14), qui impliquent une action coupable de transformation de la nature par les Européens. Le mot « corrompu » (l.10), particulièrement péjoratif, s’inscrit dans une affirmation qui constitue une condamnation morale sans appel : les Européens sacrifient les valeurs essentielles, naturelles, à leur seul « plaisir ».

3. Autocritique et ironie. Ce qui est aussi remarquable, c’est un certain humour – mais un humour offensif – de la part de Montaigne, au service de sa critique. D’une part l’auteur, avec modestie en quelque sorte, s’inclut parmi ces Européens qu’il critique, faisant preuve ainsi d’autodérision. C’est l’utilisation de la première personne du pluriel à partir de la ligne 3 qui le confirme. Ce qui est plus significatif encore, c’est l’ironie dont fait preuve Montaigne dans la phrase des lignes 4 et 5. Le vocabulaire ostensiblement mélioratif, avec en particulier la répétition insistante de l’adjectif « parfait », auquel s’opposera le vocabulaire péjoratif de la suite, met en évidence la vanité aveugle et ethnocentrique des personnes concernées.

Montaigne critique donc les Européens, avec une certaine violence, dans le vocabulaire notamment, et avec ironie. Il leur reproche

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