Le Prêche Du père Paneloux
Commentaires Composés : Le Prêche Du père Paneloux. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar jeanlafouine • 8 Juin 2015 • 788 Mots (4 Pages) • 846 Vues
Au bout de sa longue période, le père Paneloux s'arrêta, les cheveux sur le front, le corps agité d'un
tremblement que ses mains communiquaient à la chaire et reprit, plus sourdement, mais sur un ton
accusateur : « Oui, l'heure est venue de réfléchir. Vous avez cru qu'il vous suffirait de visiter Dieu le
dimanche pour être libres de vos journées. Vous avez pensé que quelques génuflexions le paieraient
bien assez de votre insouciance criminelle. Mais Dieu n'est pas tiède. Ces rapports espacés ne
suffisaient pas à sa dévorante tendresse. Il voulait vous voir plus longtemps, c'est sa manière de vous
aimer et, à vrai dire, c'est la seule manière d'aimer. Voilà pourquoi, fatigué d'attendre votre venue, il a
laissé le fléau vous visiter comme il a visité toutes les villes du péché depuis que les hommes ont une
histoire. Vous savez maintenant ce qu'est le péché, comme l'ont su Caïn et ses fils, ceux d'avant le
déluge, ceux de Sodome et de Gomorrhe, Pharaon et Job et aussi tous les maudits. Et comme tous
ceux-là l'ont fait, c'est un regard neuf que vous portez sur les êtres et sur les choses, depuis le jour où
cette ville a refermé ses murs autour de vous et du fléau. Vous savez maintenant, et enfin, qu'il faut
venir à l'essentiel. »
Un vent humide s'engouffrait à présent sous la nef et les flammes des cierges se courbèrent en
grésillant. Une odeur épaisse de cire, des toux, un éternuement montèrent vers le père Paneloux qui,
revenant sur son exposé avec une subtilité qui fut très appréciée, reprit d'une voix calme : « Beaucoup
d'entre vous, je le sais, se demandent justement où je veux en venir. Je veux vous faire venir à la vérité
et vous apprendre à vous réjouir, malgré tout ce que j'ai dit. Le temps n'est plus où des conseils, une
main fraternelle étaient les moyens de vous pousser vers le bien. Aujourd'hui, la vérité est un ordre. Et
le chemin du salut, c'est un épieu rouge qui vous le montre et vous y pousse. C'est ici, mes frères, que
se manifeste enfin la miséricorde divine qui a mis en toute chose le bien et le mal, la colère et la pitié,
la peste et le salut. Ce fléau même qui vous meurtrit, il vous élève et vous montre la voie.
« Il y a bien longtemps, les chrétiens d'Abyssinie voyaient dans la peste un moyen efficace,
d'origine divine, de gagner l'éternité. Ceux qui n'étaient pas atteints s'enroulaient dans les draps des
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