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Jean Cocteau « Par lui-même » (1927)

Commentaire d'oeuvre : Jean Cocteau « Par lui-même » (1927). Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  1 Avril 2020  •  Commentaire d'oeuvre  •  4 260 Mots (18 Pages)  •  1 334 Vues

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Jean Cocteau: le Poète

A travers son poème « Par lui-même » (1927)

Introduction :

        Aujourd’hui connu, principalement, pour son œuvre théâtrale ou cinématographique, on oublie souvent que Jean Cocteau est avant tout un poète. Il le dit lui-même dans son Journal d’un inconnu « Je suis, sans doute, le poète le plus inconnu et le plus célèbre ». Ainsi artiste aux mille facettes, à la fois romancier, dramaturge, cinéaste et dessinateur, il se voulait, avant tout, poète. Son œuvre poétique, est imposante en quantité, puisqu’elle comporte environ mille cinq cents pages dans le tome de la Pléiade qui lui est consacré, mais elle est aussi d’une très grande qualité ; Mythologie, Allégories, Clair-obscur, La Crucifixion, l’Ange Heurtebise, L’incendie, Le cap de bonne Espérance, La 3e Ode… pour ne citer que les quelques traits saillants de son œuvre poétique monumentale qui sont des écrits emblématiques de la poésie du XXème. Cocteau est un poète et toute son œuvre est d’essence poétique, celle-ci s’illustre souvent dans ses créations impliquant diverses formes d’arts.

Par ailleurs, cela n’est pas étonnant puisque Cocteau est né en 1889 dans une famille de grands bourgeois où l’on aime et pratique les arts, un milieu bien propre à éveiller et développer ses talents artistiques précoces. Bien qu’intelligent, il fait des études bancales qui lui valent plusieurs échecs au baccalauréat. En 1908, sa mère l’introduit dans le monde artistique et mondain où il se fait rapidement une réputation de dandy et des relations dans le milieu littéraire qui lui organise, au théâtre « Femina » une matinée « consacrée à un tout jeune poète de dix-huit ans, Jean Cocteau » ; depuis ce jour-là, Cocteau ne cessera de s’impliquer dans les arts et la poésie. Il se lance alors très tôt, à 20 ans, dans le milieu mondain littéraire classique, mais bientôt, il opère une première mue et se réinvente en optant pour une esthétique avant-gardiste, radicale et contemporaine. C’est une conjonction d'événements et de phénomènes autour de 1912 (le cubisme en peinture, Apollinaire, les symbolistes et les débuts du surréalisme) qui lui font comprendre qu'il doit se défaire de ses repères intellectuels et artistiques classiques pour survivre en tant qu'artiste-poète. Dès lors, pour ne pas manquer le wagon de la modernité Jean Cocteau s’illustrera parmi les surréalistes et les dadaïstes. Sa poésie emboîtera le pas et à travers elle, il redéfinira à sa manière ce qu’est l’écriture poétique.

Dans ce dossier consacrer à l’œuvre poétique « Cocteauesque » nous nous interrogerons sur la singularité de sa poésie, puis sur ce qu’elle dit des mouvements l’ayant inspiré et enfin nous analyserons un de ses poèmes pour illustrer son propos au sujet du rôle du poète. Comment Jean Cocteau définit l’acte poétique à travers sa poésie ?

 La singularité, la vie et les inspirations d’un poète polyvalent :

             Jean Cocteau s'est longtemps efforcé de trouver sa propre voie et a longtemps errer entre différents style qu'il a cherchée pendant toute sa vie avec son stylo, son pinceau et ensuite avec sa caméra. Ainsi, coller une étiquette sur l'œuvre de Jean Cocteau dans le contexte des mouvements littéraires de son temps est une entreprise risquée, car il se distingue par une œuvre multiforme ; s’essayant à l’écriture classique de mythologie en alexandrin puis en expérimentant et en se rapprochant du symbolisme, il a fini par se joindre dans son écriture au surréalisme qu’il a lui-même crée sans en faire finalement partie. En 1917, Jean Cocteau écrivit, pour Serge de Diaghilev (metteur en scène et chorégraphe), Parade un ballet mis en musique par Erik Satie et dont les décors étaient l'œuvre de Pablo Picasso. Parade étonna Diaghilev et avec lui le tout Paris. Apollinaire, commentant le spectacle, le qualifia de « surréaliste ». Ce nouveau terme fut très vite repris par Breton et ceux qui avec lui, menèrent le surréalisme à son apogée. Apollinaire inspira ainsi les surréalistes et eu une influence non-négligeable sur Cocteau, puisque son ascendance a marqué sa carrière. Apollinaire le soutenait et reconnaissait son talent, ce qui mena Cocteau a s'est déclaré plus tard « l'héritier spirituel » d'Apollinaire, affirmant ainsi la modernité de son entreprise, tout comme les surréalistes. Malgré cela et bien qu'intimement lié à la naissance du mouvement, Cocteau, que l'on surnommait alors le « Prince frivole » ne fit pourtant jamais « affilié » au groupe surréaliste. Après la mort d’Apollinaire, en 1918, chantre de la nouveauté et de l'avant-garde, les intellectuels parisiens se disputent le leadership de la modernité. Les surréalistes ont été inspirés par tout le travail de désinhibition des poètes, entrepris par Guillaume Apollinaire tout comme Cocteau, mais ce point en commun ne suffisait pas pour les lier ; le groupe des surréalistes voyait d'un très mauvais œil, l’intellectuel décadent, bourgeois, rêveur, mais très populaire (et sans doute, trop homosexuel) qu'était Cocteau. Malgré le fait que les surréalistes ne reconnaissaient à Cocteau aucun talent, et que Cocteau ne s’est jamais revendiqué explicitement de ce mouvement, il est indéniable que l'œuvre du poète est symboliquement, stylistiquement et esthétiquement surréalisme. Ainsi dans ses écrits (qui mêlent bien souvent esquisses, dessins et jeux graphiques à l'écriture), ou dans son cinéma, c'est un constant jeu créatif entre rêve et réalité, une importance accordée à la liberté d'esprit et le thème de la beauté indéfinissable et ambiguë qui lie les surréalistes à Cocteau. Les surréalistes et Cocteau ont tous deux aussi aspiré à la liberté de pensée et ont tentés y accéder par la poésie. Il y a donc plusieurs affinités entre Cocteau et les surréalistes.

Cocteau (comme nous avons pu le souligner précédemment) a aussi été inspiré par le mouvement symboliste. Le symbolisme se déclare le gardien de la beauté et prône l'amour de la forme. Le symbolisme se revendique aussi comme le seul mouvement capable d'exprimer pleinement l’Idée, mais tout en rappelant que la forme ne peut jamais être la simple servante de l'art pour l'art : la tâche de l'artiste est de trouver la forme la plus convenable qui permette de traduire l'Idée absolue et inexprimable. Cocteau était de ce même avis et tout comme les symbolistes, ils s’employaient sans cesse à renouveler, à rajeunir et à enrichir le langage poétique à la recherche de l’expression parfaite du conceptuel. Il s'estimait, en tant que poète être le seul à pouvoir saisir le sens caché du monde par l'emploi des symboles. Ainsi selon les symbolistes, mais aussi selon Cocteau le poète est capable de restaurer le lien entre le monde directement perceptible et son côté caché. Cocteau la formulera en 1926 dans son œuvre critique Rappel à l’ordre (1926) : "L’espace d’un éclair, nous voyons un chien, un fiacre, une maison pour la première fois. Voilà le rôle de la poésie. Elle dévoile dans toute la force du terme. Elle montre nue, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement. Mettez un lieu commun en place, nettoyez-le, frottez-le, éclairez-le de telle sorte qu’il frappe avec sa jeunesse et avec la même fraîcheur, le même jet qu’il avait à sa source, vous ferez œuvre de poète". Ainsi, dans cette citation Cocteau, confère à la poésie un rôle essentiel : celui de la poésie qui dévoile les sens et révèle l’homme à lui-même par l’intermédiaire de ses sens, de ses perceptions. L’écriture poétique remplit ainsi une fonction révélatrice de l’homme vis-à-vis de lui-même. Par ailleurs, il est important de souligner que cette même conviction est aussi partagée par Baudelaire et Rimbaud qui sont incontestablement des inspirations pour la poésie de Cocteau.

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