Baudelaire, Une charogne
Commentaire d'oeuvre : Baudelaire, Une charogne. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Kaecless • 22 Juin 2023 • Commentaire d'oeuvre • 1 288 Mots (6 Pages) • 176 Vues
Une charogne, Les fleurs du mal.
Rapide présentation du poème:
-12 quatrains
-rimes croisées (ABAB)
-alternance entre alexandrin et octosyllabes
Memento mori: Memento mori est une locution latine qui signifie « Souviens-toi que tu mourras ». Elle désigne un genre artistique de créations de toutes sortes, mais qui partagent toutes le même but, celui de rappeler aux hommes qu'ils sont mortels et la vanité de leurs activités ou intérêts terrestres.
PBTIQ: En quoi la tradition du memento mori influence Baudelaire à écrire le beau ?
I-Strophes 1 à 5: le souvenir de la répugnante charogne.
- Strophe 1: le contraste entre promenade et horreur
- V.1 « rappelez-vous»: verbe à l’impératif + utilisation du vouvoiement. L’utilisation de l’impératif amène ici au souvenir. De plus, on peut se demander à qui Baudelaire s’adresse. A la fin du vers, il y a le terme «mon âme». 2 possibilités donc:
- soit il s’adresse réellement à son âme (c’est possible car il l’a déjà fait dans d’autres poèmes)
- soit il s’adresse à l’être aimé (cette hypothèse est validée car il utilise ensuite le pronom «nous», sous-entendu, lui et elle)
- V.2 «ce beau matin d’été ci doux»: GN. Cela pose le cadre spatio temporel, cadre idyllique pour une balade amoureuse. C’est ce qu’on appelle le «topos» dans le romantisme.
- V.3 «au détour d’un sentier»: complément circonstanciel de lieu. L’utilisation du terme «détour» montre que le chemin est inhabituel.
- V.3: «une charogne infâme»: utilisation d’un adjectif péjoratif. Vision terrible, difficile à tolérer et qui contraste complètement avec le vers précédent.
- V.4 «sur un lit semé de cailloux»: antithèse. Un lit est normalement confortable... Or, sur là il s’agit de cailloux. Le lecteur est mis dans une position inconfortable. Il y a une opposition entre l’idéal romantique et la réalité horrible.
- Il y a un retardement du dévoilement.
- Strophes 2 à 5: la description de la charogne: une vision d’horreur.
- V.5/ 6: CL de la luxure
- «jambes en l’air», «comme une femme lubrique»: cette comparaison rappelle la sexualité, thème présent chez Baudelaire, comme celui de la beauté de la femme.
- «brûlante», «suant les poisons»: dans sa description, Baudelaire fait appel à notre vue mais aussi à notre odorat.
- V.7: «nonchalante», «cynique»: ces adjectifs représente une femme sans gêne.
- V.8: «ouverture», «son ventre», «plein d’exhalaisons»: ce qui est paradoxal c’est qu’une charogne est normalement une personne morte, or, ici, la charogne s’ouvre elle même le ventre.
- V.9: «le soleil rayonnait sur cette pourriture»: antithèse entre l’idée de lumière et l’idée de la pourriture qui évoque la mort et donc l’obscurité.
- V.10: «cuire à point»: CL culinaire: la charogne devient un vulgaire morceau de viande.
- V11 et 12: forme d’ironie. Baudelaire évoque «la grande Nature» (=le cycle de la vie): ce qui est né va mourir un jour, c’est un cycle sans fin. Si ce cycle de la vie est quelque chose de noble pour les romantiques, là, Baudelaire décrit les choses de manières crues, d’où l’ironie.
- V.13: «la carcasse superbe»: oxymore montrant l’opposition entre la réalité de cette charogne et le regard que le poète nous invite à porter dessus.
- V.14: «comme une fleur s’épanouir»: comparaison qui renvoie à la nature.
- V.15 et 16: rappel de la réalité concrète de la charogne et de sa puanteur de l’énonciation (=utilisation du «vous»).
- Strophe 5 (vers 16 à 20): montre que sur cette charogne, il y a paradoxalement de la vie (cf V.8)
- Vocabulaire du mvt «bourdonnaient», «sortaient» / présence de bêtes en vie sur le cadavre.
II-Strophes 6 à 9: le corps qui s’anime.
A-Strophes 6 à 8: la charogne sublimée
- Strophes 6: verbes d’action «descendait», «montait», «s’élançait», «vivait». Bien que morte, la charogne n’est pas inerte.
- «enflé d’un souffle vague»: mouvement du corps.
- V.26 «comme l’eau courante et le vent»: comparaison de la charogne avec la nature.
- Strophes 7 et 8: transformation artistique de l’horreur. Le regard du poète dépasse la simple charogne, la réalité du cadavre en putréfaction.
- CL musique «une étrange musique», «un mouvement rythmique».
- CL peinture «une ébauche lente», «sur la toile oubliée».
= le regard du poète transcende la charogne qui peut devenir une oeuvre d’art.
B-Strophe 9: le retour à la réalité.
- «Derrière les rochers»: complément circonstanciel de lieu: retour à la réalité, on sait où on est, le cadre est fixé.
- Rappel de la réalité crue: le cadavre sert de nourriture (à la chienne notamment). On s’éloigne de la perspective artistique.
III-Strophes 10 à 12: réaffirmation du pouvoir suprême de la poésie sur l’amour.
A-Strophes 10 et 11: la comparaison être aimé / charogne.
- V.37:
- «-Et pourtant»: le tiret et l’interpellation créent une véritable rupture. Le discours d’avant va prendre tout son sens: ce souvenir était un prétexte.
- «vous serez»: l’utilisation du futur fait que le poète passe du souvenir à la prédiction.
- «semblable à cette ordure, à cette horrible infection»: il compare l’être aimée à la charogne.
- V38: «étoile de mes yeux, soleil de ma nature, vous mon ange et ma passion»: périphrases désignant l’être aimé, adresse amoureuse.
- Contraste amour mort. Rime entre infection et passion ! Finalement, rien ne différencie la charogne de l’être aimé, à part peut être le temps...
- Strophes 11 «oui ! telle vous serez»: exclamation + utilisation du futur: évoque le fait que cela est inéluctable. L’être aimé deviendra forcément une charogne. Cette comparaison peut être étrange....
B-Strophe 12: l’art plus fort que la mort, la chute du poème.
- V.45: «Allo, O ma beauté ! Dites à la vermine»: interjection + apostrophe. La césure à l’hémistiche permet de faire un parallèle puissant entre les termes «beauté» et «vermine»
- V.46: «qui vous mangera de baisers»: l’utilisation du terme «baisers» peut être pris à double sens
- On peut penser au fait que la vermine va «embrasser» l’être aimé.
- On peut aussi évidemment penser que l’auteur parle de la vermine qui va manger le corps de l’être aimé: comparaison qui met mal à l’aise...
- Tradition du memento mori: tradition de la poésie romantique rappelant que les Hommes sont voués à la mort. Cet argument permet de rappeler qu’il faut vivre sa vie et profiter de l’instant présent.
- V.47 / 48: «j’ai gardé la forme et l’essence divine de mes amours décomposés»: Baudelaire conserve quelque chose de l’être aimé par delà la mort. C’est là le pouvoir de l’art, poser sur quelqu’un un regard qui dépasse la vie et la mort. La poésie rend les choses immortelles, ainsi, cette charogne en plein milieu du chemin est devenue immortelle et a perduré par delà les siècles. C’est un éloge de la poésie.
CCL:
Résumé + réponse à la pbtiq: Baudelaire décrit en premier lieu la carcasse de manière réaliste. Ensuite, se basant sur la tradition du memento mori, Baudelaire va chercher à sublimer cette charogne, tout en rappelant quand même son destin inéluctable qui est la décomposition. Enfin, Baudelaire insiste sur le fait que l’art dépasse la nature et la vie.
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