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Francis Ponge, Le Pain

Fiche de lecture : Francis Ponge, Le Pain. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  21 Mai 2023  •  Fiche de lecture  •  1 712 Mots (7 Pages)  •  188 Vues

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Introduction : 

  • Le texte que je vais vous présenter est de Francis Ponge. Né en 1899 et mort en 1988, Francis Ponge est un poète français du XXe siècle qui publie d’abord sans succès quelques recueils de poèmes. Il fréquente le groupe surréaliste sans adhérer pleinement à ce mouvement. Son indépendance à l’égard de tout mouvement littéraire et sa liberté vis-à-vis des codes de la poésie lui valent d’être incompris en son temps. Ami des peintres, il s’interroge également sur les capacités du langage à exprimer le réel.
  • En 1942, il publie son premier grand recueil Le Parti pris des Choses dont l’objectif est de rendre compte des « choses » du quotidien à travers de courts poèmes en prose (cf dictionnaire d’objets ordinaires). Ponge donne la parole aux objets inanimés et invite ses lecteurs à apporter un regard neuf sur les objets qui nous entourent.
  • Le poème que nous allons étudier est « Le Pain ». Ce dernier confirme cet attachement de l’auteur aux choses simples et triviales en s’efforçant de décrire un aliment, dont l’auteur cherche à saisir la beauté, que le lecteur ne voit pas au 1er regard, et à en rendre compte à travers une description surprenante.

Lecture


Problématique : Comment le poète parvient-il à transformer un objet banal et prosaïque en un spectacle onirique grâce à l’alchimie poétique ?


Plan du texte :

  • Mouvement 1 : Renouvellement de la vision du pain (l1 à 3).
  • Mouvement 2 : Genèse du pain et formation de la croûte (l4 à 8).
  • Mouvement 3 : Autre monde – la mie et sa vie organique (l9 à 12).
  • Mouvement 4 : Désacralisation du pain (l13 à 14).


Explication :

MOUVEMENT 1 : Renouvellement de la vision du pain

  • « surface du pain » = croûte.
  • Dès les premiers mots, il y a une forme de dépassement de l’ordinaire : le poète utilise l’adjectif « merveilleux », il réenchante l’objet ordinaire qui devient ainsi étonnant, prodigieux, il suscite l’admiration. Le pain devient alors une sorte d’objet artistique par la transformation que l’artiste (le poète) lui fait subir.
  • Le terme « impression » est intéressant : il renvoie à la fois à l’imprimerie (le pain est imprimé grâce au poème), à l’art (impressionnisme) et à la dimension psychologique : la sensation.
  • « à cause de… qu’elle donne » = Ponge donne vie au pain en le rendant fautif d’être merveilleux et en lui exprimant une action qu’il exerce, comme s’il était un être vivant avec une conscience.
  • « Quasi panoramique » : « quasi » semble nous avertir que le deuxième terme « panoramique » est un peu excessif. Quant à « panoramique », il nous rappelle combien le poète apprécie les jeux de mots : on peut entendre pan-oramique (panem = le pain en latin).
  • Avec cette première phrase, le pain prend déjà une dimension cosmique : le petit objet permet de voir l’immense (panoramique = tout voir) = changement d’échelle.
  • La suite du paragraphe confirme cet aspect : « comme si l’on avait à sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus ou la Cordillère des Andes ».
  • Noter la redondance (à sa disposition = sous la main).
  • Cette expression renvoie aussi à la démarche poétique de Ponge : le poète ne puise pas son inspiration dans le monde des idées ou dans son vécu personnel, mais dans les choses qui sont sous ses yeux.
  • « comme si » = dimension imaginaire.
  • Le pain devient sous nos yeux un univers à part entière, un paysage magnifique et grandiose à explorer (cf les références géographiques).

Dans ce mouvement, Ponge renouvelle la vision de la croûte en lui donnant vie. On regarde le pain comme si on le voyait pour la 1ère fois.


MOUVEMENT 2 : Genèse du pain

  • On note au début du deuxième paragraphe l’emploi systématique des connecteurs logiques : « d’abord », « ainsi donc ».
  • On assiste alors à la fabrication du pain : « en train d’éructer » = le gonflement, « four stellaire » = le four à pain, « durcissant » = cuisson, « vallée (…) crevasses » = description de la croûte en train de se former.
  • Mais toute la phrase peut également être comprise comme représentant la création du monde, dans une dimension mystique.
  • Énumération de termes géographiques = prolongement des chaînes de montagnes : « vallée », « crevasse » : le façonnage du pain est comparé aux reliefs créés en premiers lors de la création de la Terre. On remonte le temps jusqu’aux origines du monde (= le pain continue dans sa dimension cosmique, nouveau changement d’échelle).
  • La métaphore « four stellaire » renvoie aux étoiles. On passe donc des braises du four à pain aux étoiles de la voûte céleste.
  • Champ lexical de l’architecture « façonné », « plans », « articulés », « dalles » + adverbe de précision « nettement » : la création du pain est un travail d’orfèvre.
  • La dernière phrase de ce paragraphe n’a que peu de rapports directs avec le pain : aucun des termes employés n’y fait référence. Le seul terme qui fasse référence à la croûte du pain : « dalle » n’est employé que pour décrire ce qui couvre le sol.
  • On peut s’interroger sur le tiret qui sépare la mention de la croûte et la première description de ce qu’il y a dessous (avant tire = mélioratif, belle lumière, après = nette rupture). Cette première approche de la mie est assez curieuse.
  • L’expression « sous-jacente » évoque ce qui s’étend en-dessous et ce qui est caché, implicite. C’est à relier aux termes « mollesse » et « ignoble » qui sont péjoratifs, et s’appliquent davantage à un être humain (c’était déjà le cas, plus haut, du verbe « éructer » et de l’adjectif « amorphe »).

Ponge compare la formation du pain à la genèse du monde, apportant une vision poétique sur cet aliment.

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