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Dernières nuits de Paris, Soupault

Commentaire de texte : Dernières nuits de Paris, Soupault. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  27 Octobre 2024  •  Commentaire de texte  •  2 372 Mots (10 Pages)  •  34 Vues

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Molliard Gwenaëlle

Commentaire des Dernières nuits de Paris, Philippe Soupault, 1928

   Si Philippe Soupault (1897-1990) écrivain, journaliste et cofondateur du mouvement surréaliste n’est pas de ceux qui ont acquis une certaine postérité de ce mouvement révolutionnaire, définie par André Breton comme une « dictée de la pensée grâce à l’absence de tout contrôle de la raison afin de révéler la véritable connaissance du monde », il a pourtant su, au sein de son roman Les Dernières Nuits de Paris, écrit en 1928, subtilement dépeindre ce mouvement dans ses entrailles. Le passage que nous commenterons se situe au chapitre dix sur quatorze et révèle une observation des caractéristiques de « la bande de Volpe » : ici notre narrateur, grâce à son ton descriptif, nous ouvre les portes de la perception de la bande, très nettement inspirée du groupe surréaliste, dans ses limites, son muthos inconsistant, son mimétisme, faisant ainsi que tous soient régis par un seul dogme : Paris. C’est ainsi qu’à sa lecture, nous pouvons nous questionner sur la façon dont ces idoles de la fantasmagorie sont tombés dans le piège de Paris. Afin de poursuivre cette quête, nous nous pencherons dans un premier temps sur ces lambda marginaux de la bande de Volpe, aussi bien dans ce qui crée leur unicité que dans ce qui les condamne à l’ordinaire, puis nous poursuivrons avec la critique du mouvement surréaliste à travers ces adeptes du mystère, à la fois dans leur fonctionnement éternel et dans leur angoisse pesante du néant. Enfin nous terminerons sur la régente de ces troubles, Paris, par les mythes dogmatiques qu’elle eut créé ainsi que par la victoire de sa propagation du mimétisme.

    La bande de Volpe, hommes exerçant des activités illégales de toutes sortes, et se réunissant régulièrement afin d’élucider des mystères au sein de Paris, faisant d’eux des marginaux dans la société, des ombres de Paris, sont pourtant décrits par notre narrateur avec un ton descriptif dont le registre professionnel du labeur intrigue par sa banalité : sans jamais nommer un membre de cette bande dans ses qualifications, notre narrateur ne les dénomment que par « ils » les caractérisant ainsi tous de la même sorte, utilisant de ce fait huit fois l’adjectif indéfini « même » (l7,9, 12, 13, 17, 18) dans ses descriptions. Celui-ci se répète de manière redondante, en particulier concernant leurs caractéristiques, « possédant les mêmes tics, les mêmes déformations » (l7), « les mêmes tics,

habitudes, affections et haines mêlées » (l18-19) appuyant à la fois sur la similitude de leurs attraits et sur leurs éternelles répétitions, pouvant prêter à croire à une absence de changements et à l’impossibilité qu’ils adviennent un jour, et ce par des adverbes hyperboliques joignant ces descriptions : « mais ils étaient toujours » (l6), « mais ils seraient restés à jamais » (l18), ce parallélisme oxymorique nous démontrant l’éternel retour de leurs caractéristiques. Et s’ils ne sont que mêmes habitus, ils sont également normalisés vis-à-vis des autres groupes constituant la ville comme le démontre explicitement le narrateur (l14) « ils restaient bien des Parisiens avec la manies et habitudes des habitants », abaissant le voile sur leur impression extraordinaire, cassant le mythe, prouvant la banalité. Dans ces habitudes, celles d’aller au café : notre narrateur nous raconte à partir de la ligne 20, un événement aux allures banales : cela se déroula « un jour », l'imprécision du temps pouvant nous faire comprendre que cela aurait pu advenir n’importe quand, il les vit dans un café alors qu’ils écoutaient une chanson, où plutôt « un refrain que crachotait un gramophone » (l21) dont la personnification employée démontre l’étrangeté tout de même présente qui règne au sein de leurs activités mais dont la banalité de son écoute, cette chanson inspirée d’une rengaine célèbre de Maurice Chevalier, prouve l’ordinaire de ce groupe.

Pourtant, malgré les efforts du narrateur pour nous convaincre de leur banalité, ils semblent, quand bien même leurs attraits ordinaires et communs à de nombreux groupes, qu’ils restent préoccupés et guidés par un mystère, les empêchant d’être parfaitement catégorisés. Et nous pouvons le découvrir dans la syntaxe où si l’adjectif « même » revenait régulièrement, il en était régulièrement justifié par l’adverbe « mais » (l6,9,10,18) concernant les affirmations proférées, démontrant l’ambiguïté d’une qualification à proprement dite du groupe. Entre les lignes 8 et 11, nous pouvons apercevoir cette place ambiguë que tient le groupe, et qu’essaye de nous faire entrevoir notre narrateur : en effet, lorsqu’il est mentionné « au milieu des autres corporations, ils tenaient une place à part » (l8) nous observons que dans cette antithèse, où en étant au milieu ils sont à part, la bande de Volpe a de quoi être catégorisé avec les autres corporations mais pas suffisamment pour en faire partie, de cette norme corporative. Sont-ils alors des marginaux, des fauteurs de troubles ? Ils semblent qu’ils ne le soient pas suffisamment non plus : « peut-être auraient-ils pu (…) dont la célébrité est universelle » (l11) nous prouve qu’ils ne sont pas assez sensationnels, qu’ils ne commettent pas d’actes à proprement dits fascinants, comme pouvait le faire la Bande à Bonnot, à la même époque. Peut-être peuvent-ils être perçus comme des lâches, osant mais non suffisamment, voulant se faire peur mais pas trop, bloqués entre le marteau et l’enclume ; mais il semble plutôt que de par cette étrange

posture, le narrateur en nous rappelant leur banalité et leurs supercheries nous prouve encore plus leur marginalité car ils suscitent bien trop de contradictions pour que nous les nommions proprement.

Ainsi si la bande de Volpe semble inqualifiable, et finalement encore plus à part de l’ordinaire que ne l’est l’extraordinaire ; elle s’apparente dans ses machineries, dans sa manière de fonctionner au groupe des surréalistes dont Soupault était membre, dans cette « société secrète » où notre auteur, tout comme notre narrateur, s’est éloigné de la trans commune afin d’en être un observateur plus critique et un dénonciateur de ses troubles plus subtile encore qu’auparavant.

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