Discours de Socrate : 203 b-204 a

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Discours de Socrate : 203 b-204 a

.1. Quel est l’objet du désir ? : 203 b-204 a

Quel est l’objet du désir ? Comment caractériser l’objet du désir ? Ces deux questions recevront une réponse si objet du désir, il y a. Tout désir naît d’un manque. Nous ne désirons pas ce que nous possédons. Nous désirons ce qui nous manque. Pour comprendre ce qu’est le désir, il faut définir la nature du manque qui est à l’origine du désir. En effet, c’est le manque qui donne son élan au désir. Dans Le Banquet, Platon se sert d’un mythe pour définir la nature du désir. Mais avant de s’intéresser au mythe platonicien, il faut reprendre la mythologie grecque.

        Il y a dans l’Olympe, parmi les dieux qui entourent Zeus, un personnage extravagant. Il ressemble à un bambin joufflu et bien potelé. Il vit et se promène à longueur de temps à moitié nu avec un arc doré et un carquois d’airain passés en bandoulière. Cet angelot au caractère farceur et au sourire un peu godiche est bien plus redoutable qu’il en a l’air. C’est de lui que viennent tous nos désirs et toutes les souffrances qui les accompagnent. Il s’appelle Eros. Et Zeus en fait le messager de l’Amour. Eros n’est pas le dieu olympien de l’Amour. Il en est le messager. Donc, il est un intermédiaire entre les hommes et les dieux. La déesse de l’Amour est Aphrodite. Aphrodite inspire la passion amoureuse. Et Eros, jeune dieu subalterne au service exclusif de la déesse de la Beauté et de l’Amour est chargé de former les couples. C’est pourquoi le petit Eros passe le plus clair de son temps à voltiger au-dessus des hommes et des femmes guettant le moment opportun pour décocher ses flèches. Une flèche d’or, et Eros embrasse les cœurs. Une flèche de plomb, et Eros rend sa victime à jamais insensible à l’amour. Sans Eros, l’amour dont Aphrodite détient le monopole ne serait que pure abstraction, pure idée, pure contemplation.

        Maintenant, il faut revenir au texte de Platon. Platon articule ce passage autour de trois axes de réflexion. D’abord, 203 a-c, Platon fait le récit de la naissance d’Eros. Ensuite, 203 c-e, Platon peint le portrait d’Eros. Et enfin, 203 e-204 a, Platon donne une définition du désir.

                        .1.1. Premier axe : La naissance d’Eros : 203 a-c

        Eros est un dieu de petite naissance. Il n’appartient pas comme Aphrodite, Apollon ou Athéna, aux dieux olympiens. Autrement dit, Eros n’est pas de descendance directe avec Zeus. En fait, Eros est associé à Aphrodite parce qu’il a été conçu le jour où la déesse fait son entrée officielle dans l’Olympe. Comment naît Aphrodite ? Aphrodite n’est pas le fruit d’un accouplement divin ni mi-divin mi-mortel. Aphrodite naît directement du sperme, de la semence d’Ouranos. Cronos, fils d’Ouranos, le dieu du Ciel et de Gaïa, la déesse de la Terre aide sa mère. En effet, Gaïa se plaint auprès de Cronos du traitement que lui inflige Ouranos. Ouranos a repoussé dans les entrailles de Gaïa les Hécatonchires (Géants aux cent bras) et les Cyclopes alors qu’elle s’apprête à les mettre au monde. Gaïa donne à Cronos une faucille de silex. Ouranos rejoint Gaïa. Et Cronos castre Ouranos et jette les organes génitaux de son père à la mer. Et de l’écume de mer naît Aphrodite (aphros en grec signifie écume). Elle chevauche la mer sur une conque, un coquillage pour atteindre le rivage. Quand Aphrodite paraît dans l’Olympe tous les dieux, mais beaucoup moins les déesses, sont stupéfaits d'admiration : jamais une telle beauté n'avait été admirée : sa peau était de la blancheur du lait, ses cheveux comme une rivière d'or liquide, ses yeux étincelants comme des étoiles, ses formes parfaites et elle exhalait un parfum suave de fleur. Aphrodite est donc de filiation directe avec le plus ancien dieu grec, Ouranos. Et Aphrodite, contrairement à la plupart des dieux olympiens, n’est pas une déesse issue des ébats de Zeus ce qui fait d’Aphrodite est l’égale de Zeus par sa descendance directe.

        Alors, ce jour-là, pour fêter l’arrivée de la Beauté et de l’Amours, un grand banquet est donné dans l’Olympe. Et Zeus invite tous les dieux y compris les petits dieux. Parmi ces petits dieux, se trouve Pôros, dieu de la Richesse et de l’Abondance. Plus que les autres dieux, Pôros s’empiffre des mets délicats et délicieux servis en l’honneur d’Aphrodite. Et Pôros est ivre du nectar des dieux. Puis, repu, il s’effondre à l’ombre d’un arbre, d’un grand chêne. Et il s’endort. A la fin du banquet, Pénia, la déesse de la Pauvreté et du Manque, fait son entrée. Elle vient mendier sa part comme l’exige sa nature divine. Mais lorsqu’elle voit Pôros si gros, si opulent, si las, elle songe qu’elle peut s’unir à lui pour échapper au sort misérable dont l’a assignée le Destin. Profitant de son sommeil, Pénia se glisse contre Pôros et l’étreint lascivement. En d’autres termes, Pénia viole Pôros. Eros naît donc des amours violentes de Pénia et de Pôros. Le Désir est donc le fils de la Richesse et de la Pauvreté, de l’Abondance et du Manque.

Arbre généalogique d’Eros

Ouranos-------------------------------------------------------------Gaïa

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      │                        │        │                │        │

Aphrodite              Cronos--Rhéa               Océan--Thétys

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                                │                               │

                             Zeus-------------------Métis

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                                        Pôros----------Pénia

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                                                    │

                                                    │

                                                  Eros

                        .1.2. Deuxième axe : Le portrait d’Eros : 203 c-e

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