Création des foires de Montbrison par le comte de Forez (1308)

DM Médiévale                                                                        GILLET Victor

                                                                                         L2 - Histoire

Création des foires de Montbrison par le comte de Forez (1308)

Le second Moyen Age ou Bas Moyen Age est une période historique qui s’étend du XIIe siècle au XIVe siècle. Une de ses caractéristiques principales est l’émergence et l’affirmation de l’échange marchand et de l’économie commerciale.

Au niveau géographique, le royaume de France est constitué du domaine royal, mais aussi de toute une série de territoires sous l’autorité des seigneurs, des comtes, des ducs avec une puissance et influence variable. Le Forez est gouverné par les comtes de la seconde « race », eux-mêmes vassaux du roi de France. Le comté de Forez - qui rassemblait alors deux cent cinquante paroisses et allait de Roanne à Saint-Etienne - comprenait les possessions personnelles du comte et celles de ses vassaux. Vers le milieu du XIVe siècle que la totalité des seigneurs foréziens fut soumise à l’autorité des comtes de Forez. La puissance et l’affermissement du pouvoir comtal tient aussi à la modestie des seigneuries foréziennes - peu étendues et souvent morcelées : le comte de Forez n’a pas dans son comté de grands seigneurs qui auraient pu contester sa prééminence. Cela explique la portée de la lettre comtale de Jean Ier et de l’autorité que cristallise sa prérogative.

Le texte qui nous est présenté est un document historique normatif. Cette lettre comtale procède du comte de Forez Jean Ier, une figure importante du royaume de France au XIVe siècle puisqu’il se bat à de nombreuses reprises pour le roi Philippe IV le Bel. Issu de la maison d’Albon, Jean Ier se distingue comme étant un homme de guerre, diplomate habile, et surtout réformateur fiscal. Il prend une envergure politique importante, en siégeant notamment au Conseil privé du Royaume de France. Jean Ier devient comte de Forez en 1279 jusqu’à sa mort en 1333. L’appellation comté de Forez apparait pour la première fois en 1076, et sous Jean Ier il englobe à peu près l’actuel département de la Loire. Jean Ier développe les structures économiques au sein de son comté.  La lettre comtale traduit cette démarche de développement économique sous son règne puisqu’elle encadre la création et le fonctionnement des foires de Montbrison.

De quelle façon la lettre comtale de Jean Ier sur la création des foires de Montbrison, nous traduit-t-elle l’importance croissante de la monnaie et du commerce au bas Moyen Age ?

Pour commencer nous verrons en quoi la création des foires de Montbrison reprend l’ensemble des codes des autres grandes foires de l’époque ; ensuite nous étudierons le rôle du marchand au sein des foires ; et enfin nous nous attarderons sur la mise en place d’un marché monétaire organisé.

Les foires de Montbrison présentent des caractéristiques communes autres foires de son temps, le choix de la ville de Montbrison par le comte de Forez est lui lié aux qualités de la ville.         

Les foires de Montbrison traduisent le déroulement des foires du Bas Moyen Age. Elles reprennent les fondements des autres grandes foires de l’époque à l’instar de Champagne qui est cité au lignes 13, 29 et 48 de la lettre comtale.

 « Nous voulons et ordonnons que la première foire commencera l’endemain de la Toussaint et la seconde 8 jours avant l’Ascension ; et chacune de ces 2 foires durera 8 jours et aucun marchand venant auxdites foires ne sera tenu de payer [de droit] d’entrée ; et le dernier de ces 8 jours on réglera les paiements. » (l.4-7). Primo, la durée des foires. Elle est donc de huit jours et est une constante dans les foires médiévales. A l’époque, on retrouve le terme nundinae pour désigner les foires ; étymologiquement il composé de novem voulant dire « neuf » et de dies « jour », dénotant bien d’une uniformité de la durée des foires dans le royaume de France. On notera que la durée de neuf jours est composée d’un jour d’installation et d’accueil, puis huit jours de ventes. « Que les marchands de France ou d’autre pays » (l.15). Secundo, la visée internationale de ces dernières. Les foires médiévales, du moins celles du niveau supérieur, ont joué un rôle pionnier pour la constitution du marché international des produits, de celui de l’argent et de celui des changes comme pour l’information marchande ou pour la création monétaire. Néanmoins, même si les foires de Montbrison ne sont pas du même acabit que celles de Champagne par exemple, les routes commerciales qui traverse le Forez les connectent avec l’Italie. A son échelle, les foires accueillent une minorité de marchands étrangers ce qui l’amène à être intégrer au processus. « Item que durant lesdites foires on ne tiendra foire ni marché dans tout notre comté de Forez hors de la ville de Montbrison ». (l.52-54). Tertio, la primauté des foires sur les autres marchés locaux, ici du comté de Forez. Les foires de Montbrison ne peuvent se permettre l’existence d’autre marché durant leur déroulement puisque cela revient à diminuer les quantités et la diversité des produits à échanger. De plus, le comte de Forez perd une partie de sa capacité à capter et faire appliquer ses droits sur les marchés ou foires car ces derniers augmentent le nombre d’acteurs en jeu. Si le seigneur à plus de mal à faire appliquer ses droits sur les marchands cela peut mener à des pertes, c’est pour  ça que Jean Ier par le biais de l’article 29 assure la primauté de ses foires et leurs exclusivités.

        Ensuite, le choix de la ville de Montbrison par le comte Jean Ier de Forez afin d’accueillir les foires s’explique par les caractéristiques intrinsèques de cette dernière, notamment sa centralité et sa localisation. « Nous donnons et octroyons à tous les marchands et à toutes manières de gens qui viendront aux foires de Montbrison » (L.2). La centralité, c’est-à-dire la capacité à polariser des flux et donc à structurer des marchés spécifiques, à un rôle de essentiel dans la coordination des échanges ou des acteurs. Concernant le comté de Forez, Montbrison accapare les moyens d’une polarisation de la vie de relation et les instruments de leur domination commerciale : routes, postes et messageries, entrepôts et maisons de commission, périodiques régionaux, tribunaux et chambres de commerce, bureaux de marque… Les villes capitalisent ainsi les moyens matériels et financiers de développement d’un commerce périodique à l’occasion des foires qui élargissent pendant leur durée la zone d’attraction des villes. Cette capacité à pouvoir accueillir les marchands se traduit par : « pourront prendre des loges et avoir leurs loges » (l.15-16). Les foires demeurent des pôles dont le rôle et l’importance sont ainsi à penser dans un rapport aux villes de complémentarité temporelle dans le cas des foires urbaines qui constituent des temps forts de la vie commerciale.

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