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L’histoire brisée

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Par   •  10 Octobre 2013  •  Commentaire de texte  •  1 666 Mots (7 Pages)  •  605 Vues

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L’histoire brisée

AuteurJoseph Maïla du même auteur

1EN UN AN, le paysage politique aura été radicalement transformé. Depuis le mois de septembre 2000, la guerre s’est installée en Israël/ Palestine, bouleversant toutes les donnes, reléguant aux oubliettes bons offices et médiateurs, négociation et mesures de « construction de la confiance », disqualifiant la diplomatie et les percées laborieusement acquises en direction de la paix. En un an, les « bombes humaines » et les tirs de mortier se sont mêlés aux bombardements aériens et aux assassinats « ciblés » provenant de missiles tirés par des hélicoptères ! Force est de le constater : la chronique des relations israélo-palestiniennes ne tient plus que de la nécrologie et n’enregistre plus que le nombre soigneusement tenu à jour des morts d’une quotidienneté faite de deuils et de souffrances. Réduits à se confronter sur le terrain des armes, les protagonistes ont oublié jusqu’au nom de la paix. Les poignées de main, le 13 septembre 1993, d’Itzhak Rabin et surtout de Shimon Pérès, à présent acteur et témoin survivant d’un tournant historique, avec Yasser Arafat reflètent rétrospectivement le destin d’un rêve brisé. Le processus de paix a volé en éclats, entraînant avec lui ses artisans devenus artificiers. Le camp de la paix, dans les opinions publiques palestinienne et israélienne, résistait tant bien que mal aux aléas de la négociation, à ses impasses et aux retards pris sur des calendriers patiemment échafaudés. Maintenant, il ne se fait plus entendre. Pour tous ceux qui avaient cru qu’une page de l’Histoire était en train de se tourner au Proche-Orient, le choc est dur et la déception amère. Plus que des péripéties propres au déroulement du règlement d’un contentieux lourd et douloureux, c’est en réalité l’amplification de la peur, la crispation des volontés, le retour de la méfiance et de la haine qui sont le plus inquiétants. Le processus de paix n’aura-t-il été qu’une suite de désillusions politiques ? Comment a-t-on pu en arriver là ?

2Trois éléments se seront conjugués, conjurés presque, pour aboutir petit à petit à l’impasse.

3D’abord, au plan du déroulement de la négociation : le report des enjeux cruciaux du conflit israélo-palestinien à de lointaines échéances. Sur la question de la restitution des Territoires occupés, sur le statut de Jérusalem, sur le devenir des colonies, et surtout sur le sort des réfugiés palestiniens, tout s’est passé comme si la négociation tardive qui les concernait pouvait autoriser un surcroît de contrôle politique et militaire, et permettre la poursuite de l’expansion des colonies. Israël fut le maître incontesté d’un calendrier qu’il manipula au gré de son intérêt, suspendant des pourparlers, imposant des conditions préalables à leur reprise, exigeant des garanties pour des redéploiements militaires pourtant convenus, mais qui n’étaient exécutés qu’après des sommets où tout était à nouveau discuté, et finissant par reporter sine diele dernier redéploiement. Cette attitude israélienne aura jeté le doute sur les intentions de l’Etat juif. Elle aura surtout fait surgir des interrogations fondamentales, vécues dans l’anxiété et la colère, sur le sort de territoires colonisables à merci alors qu’ils étaient voués, en principe, à constituer les assises du futur Etat palestinien. Pour ne rien dire de la méconnaissance totale de la population réfugiée, dont on laissait entendre que son « droit au retour » ne serait, dans le meilleur des cas, que symboliquement envisagé…

4Un autre facteur qui aura contribué à perdre le processus de paix fut l’enchaînement par Israël de politiques irrésolues à l’égard des Palestiniens. Suite erratique et contradictoire. A la détermination raisonnée d’Itzhak Rabin succéda la versatilité d’un Pérès, oscillant entre négociation et répression, en attendant que Benyamin Netanyahu ne vienne donner un coup d’arrêt brutal au processus de paix. Yehoud Barak mêlera, paradoxalement, l’audace à la tergiversation, avant que Sharon ne décide qu’Israël avait suffisamment « cédé » pour persister dans son erreur. En réalité, cette évolution politique en dents de scie ne fut que l’expression d’une incertitude : celle de voir disparaître les moyens de l’hégémonie sans que se concrétisent les formes de la sécurité. La société israélienne entérinera cette peur ; elle fera sienne cette indétermination face à un avenir mal assuré. Imperceptiblement, l’opinion publique israélienne aura glissé d’une peur légitime vers une vision « aseptisée » de l’avenir des Palestiniens. Comme si la paix probatoire et vexatoire qui leur était infligée devait conduire les Palestiniens à se fondre, à l’avenir, dans un Etat sans formes, sans forces et sans vitalité. Cette idée que la paix se ferait avec des Palestiniens soumis et dominés aura faussé l’image même de la paix. Elle aura accrédité l’existence d’une altérité politique reconnue à la seule condition qu’elle reconnaisse elle-même sa dépendance.

5En troisième lieu, il faut enfin signaler que l’Autorité palestinienne n’aura pas su donner une image crédible d’elle-même. Face à la perplexité méfiante d’Israël, les Palestiniens ont patiemment accumulé les symboles de l’autorité que le processus de paix leur offrait. Ils ne sont pas parvenus à faire de cette autorité une vraie réalité. Une gestion autoritaire, entachée trop souvent, hélas, de corruption, n’aura pas réussi à doter l’Autorité palestinienne de structures bureaucratiques

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