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Le plan Schuman, 9 mai 1950

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Par   •  9 Mars 2015  •  2 139 Mots (9 Pages)  •  2 284 Vues

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Le plan Schuman, 9 mai 1950

« L’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre » (Robert Schuman, Déclaration du 9 mai 1950)

La Déclaration du 9 mai 1950 prononcée par Robert Schuman est considérée par certains comme l’acte de naissance de l’Union européenne. Trois guerres en moins d’un siècle ont déchiré l’Europe. Le 9 mai 1950, est avant toute autre chose une volonté de paix, ce qui motive l’initiative politique de Robert Schuman. En effet, aux suites des deux guerres qu’a connu le monde entre 1914 et 1945, c’est à partir de 1948 que l’Europe entre dans une période de Guerre froide. Une période « d’accalmie » ou la constitution et le renforcement des alliances constituent deux blocs entre lesquels les oppositions s’accumulent. La crise de Berlin en 1948-1949 a marqué un premier affrontement entre les deux nouveaux géants américains et soviétiques, et les Européens de l’Ouest prennent conscience du risque que l’Europe, comme le prédisait Paul Valéry, ne devienne « un petit cap du continent asiatique ». La nécessité de s’unir pour résister à la menace soviétique apparaît alors de plus en plus clairement. Il faut réintroduire l’Allemagne dans le concert occidental.

C’est ainsi que Robert Schuman, ministre des affaires étrangères français, cherche à « éliminer l’opposition séculaire entre la France et l’Allemagne ». Robert Schuman prononce alors dans le Salon de l’Horloge du Quai d’Orsay, à Paris, sa déclaration. Cette dernière inspirée par Jean Monnet, premier commissaire au Plan, aspire à la création d’une organisation européenne chargée de mettre en commun les productions françaises et allemandes de charbon et d’acier. Ce texte débouchera sur la signature du Traité de Paris le 18 avril 1951, qui fonde la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier entre six Etats européens. Celui-ci naitra de l’idée d’un « marché commun » qui était au cœur des débats politiques et économiques. En effet, depuis la guerre, les mouvements européens avaient insisté sur la nécessité de créer en Europe un grand espace économique capable de rivaliser avec ceux d’URSS et des Etats unis.

La Déclaration du 9 mai 1950 est donc bel et bien considérée aujourd’hui encore comme le point de départ de la construction européenne, raison pour laquelle le Parlement européen a accordé à Robert Schuman et Jean Monnet le titre de « Père de l’Europe ».

Signe de l’importance historique de ce jour pour l’Europe, le Parlement européen a décidé en 1985 de faire du 9 mai la « Journée de l’Europe », célébrant dans l’ensemble de l’Union européenne le début du processus d’unification du continent européen.

Comment le plan Schuman est-il parvenu avec succès à répondre à une situation de crise européenne ?

Le plan Schuman est avant tout une coopération économique et la réponse à une nécessité conjoncturelle. C’est pourquoi il est avant tout un projet d’intégration supranationale (I) qui va aboutir a une très grande réussite jusqu'à être considéré comme le texte fondateur de la construction européenne (II).

I. Plan Schuman : un projet d’intégration supranational.

A) Clé de l’unification européenne à l’initiative de Jean Monet.

En 1950, il n’existe pas d’organisation dotée d’une forte cohérence et incarnant de manière convaincante la volonté d’unité politique européenne. Le processus européen en échec, l’idée d’unification européenne n’est pas nouveau. Cependant à cette époque, les projets d’unifications et les institutions existantes se trouvent dans une impasse. L’Organisation Européenne de Coopération Economique, créée en 1948, n’a pas de pouvoir supranational et la création du Conseil de l’Europe, le 5 mai 1949, ne suffit pas à créer un puissant organe européen, car les dix gouvernements y étant représentés ne sont pas prêts à abandonner leur souveraineté. Des lors, Jean Monnet considère rapidement que le redressement de l'économie française doit se faire en parallèle avec la construction d’une économie européenne prospère.

Ainsi, l'Europe doit se faire à partir de réalisations concrètes impliquant pour les Etats des abandons de souveraineté dans des domaines bien délimités. Il va alors tenir comptes des propositions de l’époque. Les partisans de la construction européenne proposent alors des projets pour rapprocher les industries lourdes européennes. A la conférence de Westminster d'avril 1949, dans le cadre de l’OECE, le Mouvement européen élabore un plan de coordination des industries de base européenne, notamment des coordinations du charbon, de l’acier et des transports. Autre projet de ce type, le 19 décembre 1949, le Conseil de l'Europe propose dans ces domaines la constitution de compagnies européennes.

Ainsi, dans un plan adressé à Georges Bidault en avril 1950, Jean Monnet met en évidence que le charbon est la principale source d'énergie et que l'industrie lourde en a besoin pour fonctionner. Il rappelle que l’industrie française a besoin du charbon allemand pour fonctionner. Quant à l'acier c'est une production essentielle pour l'industrie lourde. De plus, mettre en commun la production du charbon et de l'acier sous une autorité supranationale lui apparait comme un moyen pour rendre non seulement impensable mais aussi matériellement impossible toute nouvelle guerre entre la France et l'Allemagne. Pour parvenir à ce résultat, la grande nouveauté du projet de Jean Monnet est que les institutions prévues pour gérer cette production commune sont indépendantes et supranationales

En effet, avant de créer une institution européenne complexe, nécessitant de nombreuses négociations ayant peu de chances de conduire à un accord, il s’agit de créer une solidarité de fait entre quelques Etats, cette solidarité ayant vocation à s’ouvrir à d’autres pays et à d’autres domaines de compétences, pour arriver peu à peu à une unification politique.

Cette unification doit inclure la RFA. Comme le dit si bien Franck Bushman « Où sont les Allemands ? Nous ne pouvons pas reconstruire l’Europe sans l’Allemagne ». Pour le rassemblement de l’Europe, il est nécessaire de dépasser l’opposition séculaire entre France et Allemagne. Le continent européen doit se reconstruire, en prenant en compte le sort de la nouvelle Allemagne.

Cette méthode fonctionnaliste est en retrait par rapport au fédéralisme mais elle est plus réaliste et poursuit le même but à long terme que le fédéralisme. Mais ce projet ne pouvait pas être relié par un simple fonctionnaire et c’est Robert Schuman qui va mettre en œuvre ce projet.

B) La mise en forme politique du projet : la déclaration Schuman de 1950.

Robert Schuman, ministre des affaires étrangères, ne pouvait être que sensible au projet de Jean Monnet qui permettait de réaliser sa propre ambition : la réconciliation franco-allemande.

En effet, Robert Schuman est un « européen de naissance ».En tant que ministre des affaires étrangères, il cherche à « éliminer l’opposition séculaire entre la France et l’Allemagne » et il pense que le moment est bien choisi depuis que l’Allemagne s’est repliée vers l’Ouest. Le continent européen doit se reconstruire, en prenant en compte le sort de la nouvelle Allemagne. Les Etats-Unis usent alors de leur position de supériorité, acquise notamment au travers du plan Marshall, pour convaincre les Etats européens, accélérer leur intégration et faire accepter l’Allemagne occidentale, enjeu central, dans cette construction.

Il veut donc faire accepter à la RFA sa mise en état de nuire sans lui refuser l’égalité des droits avec les autres états européens en l’intégrant à vie à la structure européenne. Pressé par les américains, Schuman décide de prendre la responsabilité politique du projet de Jean Monnet.

Le 20 juin 1950, Robert Schuman ministre français des Affaires étrangères, ouvre alors dans le salon de l'Horloge du Quai d'Orsay à Paris, les négociations intergouvernementales pour la mise en œuvre du plan Schuman. Inspirer par Jean Monnet, le plan Schuman aspire à la création d’une organisation européenne chargée de mettre en commun les productions françaises et allemandes de charbon et d’acier. Pour faire accepter le projet, alors que les réticences étaient très fortes en France, Schuman va agir avec une remarquable habilité. Il décide de garder secret sa décision de reprendre le projet de Jean Monet car il veut éviter les discutions qui risquent de dénaturer le projet et veut créer un choc psychologique dans l'opinion publique et chez les dirigeants européens.

Ainsi, il informe tout d’abord de sa volonté que le président du Conseil, George Bidault. Il fait ensuite rédiger sa proposition par René Pleven, ministre de la défense. Ce n'est qu'au dernier moment, le 7 mai, qu'il va consulter les américains puis le Chancelier allemand Konrad Adenauer qui approuve tout de suite le projet.

Le conseil des ministres français n'est averti de la proposition française que le 9 mai et finit par donner son accord, le jour même où la déclaration de Schuman faite au Quai d'Orsay dans le salon de l’Horloge expose, devant toute la presse, dans ses grandes lignes le projet d'intégration économique.

II. La réussite du plan Schuman : texte fondateur de la construction européenne

A) La réussite du plan Schuman

Le plan Schuman doit probablement son succès à la rupture qu’il marque dans la méthode de construction européenne. En effet, l’idée de marché commun n’a pas été l’objet de négociations préalables entre Etats ; elle a été le seul fait d’un gouvernement, la France, qui a élaboré l’idée de manière indépendante pour ensuite la soumettre aux autres pays européens. Cette manière de procéder a de toute évidence permise de sortir des impasses dans lesquelles se trouvaient des institutions telles que le Conseil de l’Europe

Donc, le 9 mai 1950, Schuman provoque la surprise générale avec sa déclaration. L’effet de surprise joua et les opinions publiques réagirent favorablement avant même que les gouvernements, parfois offusqués d’avoir été exclus de la préparation, ne prennent position. La Déclaration répond à une conjoncture particulière, mais avec une forte portée politique et idéologique. D’un projet économique à un projet politique, l’établissement d’une communauté économique et introduit. Le processus enclenché dans le plan Schuman rend compte de la méthode Monnet ou fonctionnaliste : l’accord économique donnera lieu à une des institutions politiques, qui couronneront une solidarité de fait déjà établie. Cela s’oppose à la volonté utopiste de construire a priori et artificiellement une union politique européenne. La création d’une instance supranationale est le premier pas vers une Europe fédérale Et pour l’Europe économique, puis politique, la grande nouveauté de la Déclaration tient à l’établissement d’une Haute-Autorité commune, supranationale et non inter-gouvernementale, comme pour le Conseil européen ou OECE. Schuman ira jusqu’à utiliser le mot de Fédération européenne, comme destinée explicite du projet.

B) Signature du traité de Paris et les débuts de la CECA

Ce traité est considéré comme l'un des actes fondateurs de l'Union européenne. La Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier naît de l’idée d’un «marché commun» qui était au cœur des débats politiques et économiques.

Après des négociations assez longues dirigées presque totalement par Jean Monnet, le traité instituant la CECA est signé à Paris le 18 avril 1951 malgré des négociations compliquées. Il est signé pour une durée de 50 ans et il est prévu qu'il entre en vigueur après ratification par les parlements nationaux, ce qui sera chose faite le 25 juillet 1952. Depuis la guerre, les mouvements européens avaient insisté sur la nécessité de créer en Europe un grand espace économique capable de rivaliser avec ceux d’URSS et des Etats unis. Seuls six Etats européens sont intéressés par ce projet : l’Allemagne fédérale (RFA), la France, l’Italie, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas. Au point de vue technique, la CECA implique la mise en œuvre d'un marché commun pour le charbon et l'acier avec la suppression des droits de douanes et des restrictions, la libre circulation des produits, l'interdiction des mesures discriminatoires et des subventions concédées par les Etats membres. La communauté doit réguler l'approvisionnement à ces industries et en fixer le prix. L'organisation de la CECA suit assez fidèlement les principes de la déclaration Schuman, notamment elle crée un organe supranational qui est la Haute Autorité, mais elle ajoute aussi d'autres organes chargés de contrôler cette institution indépendante et de respecter les intérêts des petits pays par rapport aux grands. (Demande expresse du Benelux).

La ratification du traité de Paris par les parlements nationaux fut partout aisée sauf en France où les opposants restèrent nombreux lors du vote. Enfin la CECA fut un incontestable succès par rapport à ses objectifs initiaux. L'accroissement de la production d'acier fut énorme. Le commerce entre les 6 Etats-membres de la CECA s'intensifia, tout en s'accompagnant d'une baisse des prix à la production et d'une baisse des prix du charbon.

La CECA a permis l'intégration étroite en matière de charbon et d'acier et on peut estimer de la sorte que le marché commun de la CEE en est l'aboutissement logique conformément à l'espoir de Jean Monnet.

Cependant, l’absence de l’Angleterre dans la CECA peut nous amener à limiter la portée et le succès de l’unification européenne. Malgré cela, l’objectif principal est atteint : la RFA est ralliée à l’Occident de manière effective, et devient un allié potentiel. L’unité de l’Europe de l’Ouest est bel et bien renforcée, et contribuera à consolider économiquement et politiquement la région Analyse d’un succès

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