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Étude d'une oeuvre littéraire

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Par   •  11 Octobre 2014  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 523 Mots (7 Pages)  •  807 Vues

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Entre les deux guerres mondiales, le récit de voyage occupe une place non négligeable au sein de la production littéraire française. On y cherche de moins en moins le pittoresque, l'exotisme, qu'un dépaysement moral ou politique. L'Italie fasciste, l'Europe de l'Est issue de Versailles, les Balkans, l'Espagne mais surtout la Russie des Soviets et le monde chinois en gestation, autant de problèmes, d'expériences et des destins qui sollicitent l'écrivain nomade ou l'essayiste.

La découverte de l'Allemagne nationale-socialiste s'opère sur un mode quelque peu différent. La qualité du regard est autre : plus chargé de réminiscences, plus inquiet aussi de découvrir les symptômes d'une menace mortelle ou une frêle promesse d'espoir.

" Je ne sais ce qu'était l'Allemagne de naguère ", note Brasillach dans les Sept Couleurs. " C'est aujourd'hui un grand pays étrange, plus loin de nous que l'Inde et que la Chine ".[1] Cette impression de distance abyssale est maintes fois soulignée à gauche comme à droite. L'Allemagne appartient à un autre univers mental. Sa psychologie n'a rien à voir avec la nôtre. " Rien de ce qui compose nos habitudes de penser, de sentir, de combattre n'y est plus admis ".[2] Allemands et Français sont tellement éloignés les uns des autres qu'on se demande s'ils ne constituent pas deux espèces différentes. " La plus grande stupidité qui ait jamais été proférée ", relève avec irritation Raymond Cartier dans son reportage En l'An III de la Croix Gammée, est celle qui consiste à dire qu'un Allemand et un Français, au fond, se ressemblent. Ils se ressemblent parce qu'ils ont l'un et l'autre deux bras, deux jambes et une tête sur une paire d'épaules. Mais entre les âmes et les cerveaux, il n'y a pour ainsi dire aucune parenté ".[3] Propos de journaliste ? Aucunement. Georges Blondel, professeur à l'Ecole Libre des Sciences Politiques, n'allègue-t-il pas en 1934, au retour de sa trente-cinquième visite Outre-Rhin depuis l'Armistice, que " la mentalité des Allemands n'a pas changé ", qu'elle est toujours la même, au point qu'il " faut se demander dans quelle mesure cette mentalité tient à une race. (...) Je me suis toujours défié des affirmations de ceux qui disaient : Les Allemands sont, après tout, des hommes comme nous ! Cela n'est pas vrai à tous égards ".[4] Le professeur Albert Rivaud, auteur d'études sur Platon, Leibnitz, Spinoza, n'écrit-il pas dans un livre se voulant équitable à l'égard du Troisième Reich : " Nous croyons par moments entrevoir une humanité différente de la nôtre et qui obéirait à des lois psychologiques et morales étrangères à notre esprit ".[5] L'abbé Lambert maire d'Oran, aux sympathies fascistes non déguisées, affirme carrément dans son journal de voyage : " L'Allemand est d'une autre race ".[6]

La douzaine d'authentiques enquêtes sur l'Allemagne hitlérienne diffusées par la librairie française de 1933 à 1939 forme un ensemble assez médiocre. Beaucoup de notes hâtives recueillies le long d'itinéraires paresseux. Rares sont les reporters aventurés en dehors des sentiers battus. La palme en revient à trois amateurs : le socialiste Daniel Guérin, l'aristocrate Xavier de Hauteclocque, le professeur romand Pierre Bise.

Pédalant à bicyclette à travers l'Allemagne tourmentée du printemps 1933, couchant dans les auberges de jeunesse, guidé par un militant du Front Rouge, Guérin a observé l'attitude des populations rurales et ouvrières et a eu, en outre, l'occasion de rencontrer à l'étape des membres de la Hitlerjugend. L'auteur prétend n'avoir été qu'un opérateur de cinéma, tournant la manivelle, prenant des vues. " Mon témoignage, explique-t-il, n'est rien de plus qu'un documentaire ". Contrairement aux dogmes de l'extrême-gauche, l'hitlérisme lui est apparu comme une puissante vague de fond, surgie des profondeurs du peuple germanique. Parce qu'elle était populaire, cette lame s'est révélée irrépressible, balayant tout sur son passage. Les partis ouvriers, divisés, n'ont pu lui barrer la route et la vieille Allemagne réactionnaire a dû, à contre-coeur, lui céder la place. L'armée brune n'a pas été uniquement recrutée dans la lie du peuple. L'ébranlement est venu de la masse paysanne en crise, de la classe moyenne en décomposition, de larges couches ouvrières affamées et surtout de la " belle et pauvre jeunesse allemande, sans pain, sans travail, sans avenir, se rongeant les ongles d'impatience et de fièvre".[7] Malheureusement, sur les perspectives d'avenir, l'ultra-pacifiste Guérin s'avouait totalement incapable de conclure dans un sens ou dans l'autre.

Le comte Xavier de Hauteclocque a publié coup sur coup deux reportages sur les débuts du régime national-socialiste. Sa première enquête, A l'Ombre de la Croix Gammée, a été menée d'avril à juin 1933. La seconde,

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