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La guerre sous l'ancien régime

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Par   •  28 Mai 2017  •  Dissertation  •  3 705 Mots (15 Pages)  •  1 190 Vues

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Histoire moderne
L’Ancien Régime et la guerre, XVIe-XVIIIe siècle

        « La guerre, quand elle est nécessaire, est une activité non seulement permise, mais commandée aux rois ». Cette citation de Louis XIV résume une vision de la guerre telle qu’elle était pensée durant le « siècle de fer » [Cornette, J. 1993]. Néanmoins pour Furetière la guerre se devait simplement d’être l’instrument de dernier recours en cas de litige entre plusieurs Etats irréconciliables. Ces différentes visions de la guerre établies durant l’Ancien Régime tirent leurs sources d’un système monarchique de droit divin, et dont le roi de France a la particularité d’en être également le roi Très Chrétien. Cette dernière dimension du roi de France, qui se doit d’être le premier roi à défendre la doctrine de l’Eglise romaine, ancre déjà le pouvoir monarchique dans une logique guerrière. Qui plus est, alors qu’au début du XVIe siècle, le royaume de France sort du Moyen-Age, la logique du système féodal encore très ancrée dans les mœurs, fait de la guerre un outil indissociable de l’affirmation du pouvoir royal auprès de ses sujets tout comme de ses voisins européens. C’est dans cette logique que François 1er (1515-1547) et son fils Henri II (1547-1559) déclarèrent à de multiples reprises la guerre aux Habsbourg, non seulement dans le but de se libérer de l’étau dans lequel ils se sentent enfermé, mais aussi pour démontrer leur pouvoir protecteur envers leur peuple. Par la suite, lors du renforcement du pouvoir sous Louis XIII (1610-1643), la guerre se devait d’affirmer une nouvelle vision de la monarchie française : sa puissance face à ses voisins européens. Le règne personnel de Louis XIV (1661-1715), qui en marqua l’apogée (33 ans de conflits sur 54 ans de règne), se caractérisa ainsi par un bouleversement de l’administration de l’Etat, de par la politique offensive menée par le monarque. En effet, si le roi devient absent sur le champ de bataille, il n’en reste pas moins un excellent stratège (Cénat, J.P), qui va chercher à administrer l’ensemble de son royaume par lui-même. Le roi « administrateur » ne peut donc se permettre de mener ses propres armées, car cela aurait une incidence sur sa connaissance omnisciente des affaires de son royaume. Mais qui dit guerres incessantes, dit également hausse des taxes prélevées dans le but de soutenir l’effort de guerre. Or, force est de rappeler que sous l’Ancien Régime, le royaume est encore enclin à de nombreuses périodes de disettes ; disettes de la guerre et le déplacement des troupes pouvaient transformer en famines puis en potentielles périodes d’épidémies. Ainsi, la guerre n’apporte pas que distinction du roi auprès de son peuple, car celui-ci est de plus en plus éprouvé autant par les charges fiscales que par les infortunes thermométriques.
        Ainsi, de par tous ces éléments, nous pouvons nous demander en quoi la guerre a eu un rôle nécessaire dans l’affirmation du pouvoir monarchique dans le royaume de France sous l’Ancien Régime, et qu’elles en ont été ses limites ?
Pour répondre à cette question nous nous expliquerons comment la guerre et ses conséquences permirent aux rois de France, au début du XVIe siècle de se délester du poids de l’héritage féodal qui les contraignait à un pouvoir limité, puis nous explorerons comment la guerre est un outils crucial quant à l’affirmation du pouvoir royal, pour enfin évoquer les limites du bellicisme des monarques de l’Ancien Régime.

On qualifie souvent le règne de François 1er et de son fils Henri II de premier absolutisme. Or cette notion peut sembler discutable, dans le sens où à l’orée du XVIe siècle, la monarchie aurait pu évoluer vers un modèle bien différent, comme une monarchie constitutionnelle par exemple. Après le désastre de la Guerre de Cent Ans, on constate un renforcement de l’Etat monarchique, même si le roi a beaucoup de mal à se faire écouter des seigneurs. En effet, bien que tirant sa légitimité du système féodal, et se situant au sommet de la pyramide vassalique (il est « Primus inter pares »), sa puissance reste néanmoins encore très limitée. Rappelons que le découpage du royaume de France au début de l’Ancien Régime remonte à la base de la féodalité, durant le morcèlement de l’Empire de Charlemagne. Effectivement, divisé en trois grandes catégories de territoires (apanages, domaine royal et grands fiefs), les grands seigneurs restent très puissants et durs à contrôler. Ils battent parfois même leur propre monnaie et font leur propre justice. En exemple, nous pouvons citer la famille des Bourbons, qui au début de l’époque moderne, contrôlait le Bourbonnais, le duché d’Auvergne, la principauté de Dombes et le Forez. De fait, ces grands seigneurs restaient une menace redoutable pour le roi de France. Ainsi, la guerre pouvait permettre au roi, de manière indirecte, de rattacher les domaines des seigneurs au domaine royal, et de fait, de lui faire gagner en pouvoir. Ce fut le cas pour les terres du Connétable de Bourbon, qui commit une erreur fatale durant les guerres d’Italie : accepter une alliance avec Charles Quint contre François 1er. Face à cette trahison de premier ordre, François 1er fut en droit d’annexer la seigneurie de Bourbon en 1531. Ainsi, la guerre permettait de récupérer certains grands fiefs, grande obsession des rois de l’époque moderne. Mais la guerre ne permettait pas uniquement de récupérer certaines terres cédées aux seigneurs, elle avait aussi pour fonction d’étendre les frontières du domaine royal. Louis XIV fut le roi de l’Ancien Régime qui repoussa le plus ces frontières naturelles, notamment avec le Traité d’Utrecht 1713, qui, en plus de mettre fin à la guerre de succession d’Espagne, permit au royaume de France de s’étirer jusqu’au Rhin. De fait, la guerre était non seulement un moyen d’agrandir le royaume de France, mais également un levier indispensable au roi pour fédérer et asseoir sa domination sur la noblesse. En effet, le deuxième ordre du royaume étant considéré comme un ordre guerrier, il fallait que le roi soit combattant pour se faire respecter par cette noblesse.  Néanmoins, quelles étaient les fonctions du roi guerrier sous l’Ancien Régime ?
        Si l’on s’en réfère à Charles Loyseau, apologiste d’Henri IV, et de sa notion des devoirs du roi qu’il met en évidence dans son « Traité des seigneuries », la fonction première du roi est son droit d’«arbitrer la paix et la guerre ». Ainsi pour lui, le roi est entièrement souverain dans son droit de mener la guerre. Héritage de l’image du roi durant le Moyen-Age, les rois se doivent de mener les troupes à la guerre afin de se faire respecter en premier lieu par la noblesse. Ils montrent ainsi l’exemple en tant que rois guerriers. Mais la guerre, et surtout les victoires militaires, renforcent l’image sacrée du roi, puisqu’on peut y voir un parallèle avec « le dieu terrible de l’Ancien Testament » [SAUPIN Guy, 2016, p.115], qui n’hésite pas à punir les pêcheurs. Ainsi, et ce jusqu’à Louis XIII, tous les rois de l’époque moderne vont sur le champ de bataille. On pensera à François 1
er, qui sera fait prisonnier après la défaite de Pavie, où encore à Henri IV, qui sera aux premières lignes pour récupérer le trône qui lui revient de droit. Louis XIII prendra des risques lui aussi lors de la bataille de l’Ile de Ré en 1622, ou à celle de la Rochelle en 1627. Néanmoins, ce sera sous Louis XIV que la vision du roi guerrier évoluera de manière radicale. Mais de cette question, nous en parlerons plus loin. Toutefois, il semble important de rappeler que le roi de France était roi d’un royaume dit « Très Chrétien ». En effet, lors de son sacre à Reims, le roi se voyait incomber pour mission de défendre la chrétienté dans le monde et de lutter contre les infidèles. Ainsi devenu le bras armé du Pape, le roi de France garde encore une dimension guerrière très importante.
        Mais la guerre est également rattachée au roi de par la vision morale que le peuple se fait de lui : il est le père de ses sujets, et de ce fait il se doit d’en assurer leur sécurité. Ainsi, la guerre est également la base du système monarchique, et sans guerre le peuple peut perdre foi en son roi. En effet, la guerre et ses attributs ont toujours fait partie de l’éducation du futur monarque. Son éducation politique en est donc très influencée, et le maniement des armes lui est inculqué très tôt. Qui plus est, au-delà de ce maniement des armes, il deviendra au fil du temps de plus en plus important de d’apprendre au jeune monarque une connaissance plus géographique et technique de son royaume, par l’analyse des cartes ou bien les rapports des ingénieurs militaires. Cela devait lui permettre de répondre au mieux à ce devoir de protecteur du royaume. Et si la guerre était le ciment de la monarchie française, les exemples de Louis XV avec son attitude plus pacifique que son prédécesseur, et de Louis XVI ne firent qu’appuyer cette constatation. En effet, leurs attitudes créèrent l’incompréhension et déstabilisèrent leurs sujets. Pour eux, un roi assure leur sécurité en s’engageant dans certains conflits. Ce fut par exemple le cas face à la menace mortelle du Saint Empire Romain Germanique et du Royaume d’Espagne qui enfermaient la France dans un étau (en 1519 Charles Quint devint le roi unique du St Empire et de l’Espagne, soit un territoire qui va de Vienne à l’Andalousie). Cette situation inacceptable amena à de longs affrontements entre le royaume de France et les Habsbourg durant l’Ancien Régime. En effet, cette hantise de l’encerclement déclenchée par la rivalité entre François 1
er et Charles Quint, entraine un syndrome de la forteresse assiégée, qui dicte la logique de la diplomatie royale pendant presque deux siècles.

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