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L'enfermement des pauvres mendiants de Paris (1657)

Dissertation : L'enfermement des pauvres mendiants de Paris (1657). Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  7 Avril 2018  •  Dissertation  •  4 021 Mots (17 Pages)  •  1 719 Vues

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L’enfermement des pauvres et des mendiants de Paris (1657)

        « La mendicité estoit devenuë si commode & si fructueuse, que non seulement les vagabonds de l'un & de l'autre sexe en faisoient un métier; mais qu'une infinité de gens abandonnoient la culture des terres, & desertoient les villages. On ne trouvoit plus qu'à grands frais des gens de journée, beaucoup de terres demeuroient incultes, & le prix des grains augmentoit. Le Roy, pour arrester ce desordre, donna un Edit, qui sous de griéves peines défend de mendier dans les ruës, ni dans les chemins. Il y joignit des reglements très sages & très salutaires, pour employer les pauvres qui seroient en estat de travailler; & à l'égard des véritables pauvres, que la vieillesse ou les infirmitez empeschent de gagner leur vie, il pourveût à leur subsistance ». Cette citation est extraite de l’édit contre les fainéants datant de 1700 et écrit non par le roi mais par Nicolas Godonnesche. Il fait allusion au grand renfermement pratiqué près de 50 ans plus tôt par Louis XIV, et que le texte que nous allons étudier décrit.

L’édit du roi de France est daté du mois d’avril 1657 et porte sur l’établissement de l’Hôpital général pour le renfermement des pauvres mendiants de la ville et Faubourg de Paris. Un édit royal est un acte législatif du souverain, qui ne porte que sur un seul sujet et qui est à la portée et à la connaissance de tous.  Il peut ne concerner qu'un groupe de personnes ou qu'une province. Celui-ci est dit perpétuel et irrévocable, ce qui veut dire que seul un autre édit peut modifier ou supprimer ses clauses. Il y a dans cet acte royal plusieurs éléments : La suscription, dans laquelle le roi se présente lui et ses titres ;  le destinataire du texte, en l’occurrence le peuple de son royaume ; le préambule dans lequel le roi explique les grandes motivations qui le poussent à donner cette nouvelle législation ; puis enfin le dispositif qui énonce les règles de la loi décomposées en chapitres.

L’auteur officiel est Louis XIV, dit « le roi soleil », fils de Louis XIII et d'Anne d'Autriche, né le 5 septembre 1638, le troisième roi Bourbon monte sur le trône en 1643 et y demeure pendant soixante-treize années. Il meurt le 1er septembre 1715, âgé de soixante-dix-sept ans. Il monte sur le trône à 5 ans mais son règne personnel ne commence qu’en 1661 lorsqu’il décide enfin de « gouverner par lui-même » après la mort du cardinal Mazarin. Son règne marque l’apogée de l’absolutisme royal de droit divin. Il agrandit le royaume de France, plongeant le royaume dans de nombreuses années de guerres couteuses, mais fructueuse du point de vue territorial. Il laisse a jamais le souvenir d’une France rayonnante. Mais bien que l’auteur officiel de cet édit, il n’en est probablement pas l’auteur officieux. Le roi se devait de signer les édits avant leurs parutions, mais ils n’étaient pas pour autant de son fait, mais plus de celui de leurs ministres ou subordonnés.

D’un point de vue social, si le XVIème siècle n’avait pas été une grande période pour le développement hospitalier, il en va différemment au siècle suivant. A partir des années 1600 et jusque vers 1740 se met en place un réseau hospitalier qui, jusqu’à une date proche, fut celui de nos républiques. Ce développement s’explique par des raisons variées. Au milieu du XVII le système de l’aumône générale pour des questions de financements va rentrer en crise. Souffrant d’un manque de moyen les villes vont avoir tendance à augmenter les taxes pour financer le système. Les élites urbaines vont de plus en plus rechigner à financer l’aumône générale qui devient de plus en plus impopulaire. Dans les années 1650-1660 la peur du pauvre tend à se généraliser, on perçoit de plus en plus le pauvre comme un asocial qui menace la stabilité de la société. L’état va donc se préoccuper de la lutte contre ces derniers par l’édit de 1657 par lequel l’hôpital, qui depuis certains temps s’éloignait de l’accueil des pauvres et mendiants, redevient au contraire l’asile privilégié pour ces catégories de malheureux.

Mais nous pouvons nous demander en quoi cet édit nous renseigne sur les préoccupations de l’époque, sur les mesures qui ont été prises pour y remédier, mais aussi sur l’autorité du roi ?

Nous verrons tout d’abord que dans son édit, le roi s’auto accorde des parrainages justifiant et légalisant ses propos ; puis la nécessité de la mise en place de cet hôpital pour sortir de la l’inactivité un peuple devenu inutile à l’état ; pour enfin aborder l’hôpital comme solution viable.

Dès le début du préambule, le roi afin d’expliquer les raisons qui l’ont poussé à faire promouvoir cet édit, énonce la volonté des « rois nos prédécesseurs » ligne 2, qui comme lui tentèrent « depuis le dernier siècle … (d’) empêcher la mendicité et l’oisiveté » (Ligne 4) des pauvres de Paris. En effet, dès 1350 une ordonnance royale ordonne déjà « que les pauvres valides fuient la ville et faubourgs de Paris, avec défenses de mendier, à peine du fouet et d’être mis au pilori ; et à la troisième fois signés d’un fer chaud au front, et bannis des dits lieux». Dans la première moitié du XVIIe siècle toutefois, l’augmentation croissante des pauvres, mendiants et vagabonds de Paris engendre de nombreux vols et agressions dans la capitale. Louis XIII fit aussi plusieurs tentatives pour enfermer mendiants et vagabonds. En 1611, trois hôpitaux sont chargés d’enfermer les pauvres : les hôpitaux Saint-Victor, Saint-Marcel et Saint-Germain. Mendiants et vagabonds furent invités à se présenter volontairement à ces établissements pour y être internés. Moins d’une centaine le firent. Ces personnes enfermées partageaient leurs journées entre messes, confessions, catéchisme et travail. Femmes et enfants filaient, fabriquaient bas et boutons. Les hommes étaient employés à brasser de la bière, moudre de la farine, scier du bois, battre du ciment. Le 27 août 1612, Marie de Médicis fonde le « bureau et hôpital des pauvres enfermés », hôpital de la Pitié, pour aider les pauvres. Le texte fait référence à cette dernière tentative de régler le problème des mendiants, à la ligne 13 « Sur ce fondement fut projeté et exécuté le louable dessein de les renfermer dans la Maison de la Pitié et lieux qui en dépendent ». Quelques années plus tard une véritable chasse aux mendiants fit rage dans paris et de nombreux hères furent internés dans ces établissements de force. Mais ces derniers renoncèrent rapidement à leurs pensionnaires. La volonté d’internement renouvelée en 1632 par l’arrêt du 16 juillet 1632 qui prévoit un véritable enfermement des pauvres à Paris, n’aboutit pas plus que les précédents. Il interdisait aux pauvres de mendier sous peine d’être arrêtés et conduits dans les prisons du royaume. De 1640 à 1649, des assemblées de magistrats se réunissent pour étudier les moyens de combattre la mendicité. Ils prévoyaient un même système d’enfermement mais dans des établissements destinés uniquement à cette population marginale. Mais comme il est précisé dans l’édit ligne 6 « bien que nos compagnies souveraines aient appuyé par leurs soins l’exécution de ces ordonnances, elles se sont trouvées néanmoins par la suite des temps infructueuses ». Louis XIV veut donc réitérer ces tentatives, et réussir. Mais ce n’est pas le seul patronage qu’il invoque. De manière plus spirituelle, il en appelle aussi à la volonté divine.

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