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Dissertation les femmes et mai 68

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Par   •  17 Février 2019  •  Dissertation  •  3 419 Mots (14 Pages)  •  665 Vues

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« Il faut se replacer dans le contexte d’une société française fermée où les rôles sexuels étaient stéréotypés. C’était l’époque du “quart d’heure américain” : dans les boums, les filles n’avaient que quinze minutes pour inviter les garçons à danser ». C’est ainsi que Marie-Jo Bonnet, spécialiste de l’histoire des femmes et auteure de l’ouvrage Mon MLF, décrit la société française telle qu’elle existait au moment des événements de mai-juin 1968.
Pourtant, quelques progrès, notamment juridiques concernant l’égalité hommes-femmes sont à noter depuis le début du XXème siècle, pendant ce qu’on appelle la « première vague du féminisme », dont l’objectif était de promouvoir des droits égaux avec les hommes. Ainsi, grâce à une loi de 1938, les femmes ont le droit d’obtenir une carte d’identité et un passeport, ainsi que d’ouvrir un compte en banque sans l’autorisation de leur mari. Le droit de vote leur est enfin accordé en 1944, et elles ont l’occasion de l’exercer pour la première fois véritablement en 1965. Cette même année, elles sont libres de travailler sans l’accord de leur mari. Le combat ne porte alors pas encore sur le droit des femmes à disposer de leur corps, mais de leur droit de choisir à quel moment et dans quelle condition elles veulent devenir mères : le Mouvement français pour le Planning familial est institué en 1960 ; la contraception est enfin autorisée – avec quelques conditions – en 1967 grâce à la loi Neuwirth, abrogeant en partie la loi de 1920. Mais malgré la dénonciation de Simone de Beauvoir de l’aliénation des femmes dès 1949 dans
Le deuxième sexe, l’inégalité entre les sexes perdure.
Parallèlement à ces progrès juridiques, « la France s’ennuie », selon la formule de Pierre Viansson-Ponté à la veille de l’explosion de 1968. La croissance des Trente Glorieuses et l’avènement de la société de consommation uniformise vies et cadres de vie. Pour la jeunesse, issue du baby-boom et dont le poids quantitatif est conséquent – 1/3 de la population française a moins de 20 ans en 1968 –, un désir de liberté se fait de plus en plus grand. Ce désir était favorisé par un contexte international poussant à l’émancipation : le mouvement afro-américain des droits civiques aux Etats-Unis ; les débuts du mouvement hippie notamment à l’université de Berkeley, en Californie ; les affrontements entre étudiants socialistes allemands et autorités est-allemandes en avril 1968. Un grand mouvement de contestation – des valeurs mises à mal par les Trente Glorieuses comme de celles nées de la croissance – va alors naître, et se concrétiser pendant les mois de mai et juin 1968. Plus d’un mois d’occupations d’universités et de grèves générales se solderont par une augmentation du SMIG, ancêtre du SMIC, de 35%, ainsi qu’une augmentation du reste des salaires d’environ 10%.
Si les précédentes tentatives de révolution sexuelle avaient sévèrement échoué – Arria Ly et Madeleine Pelletier, la première se suicide en 1934, la deuxième est internée de force dans un asile où elle meurt en 1939 –, on aurait pu s’attendre, au vu de tous ces « indices » – pour reprendre les termes de Florence Prudhomme – à une « libération » des femmes pendant ces événements, dans la mesure où les mouvements de mai 68 remettent en cause la quasi-totalité des rapports de domination. Néanmoins, « mai 68 » n’aborde pas – sinon très peu – la question du rapport de domination homme-femme.
Il semble donc pertinent de se demander dans quelle mesure mai 68 a-t-il mis en évidence chez les femmes un système patriarcal jusque-là incontesté qu’il leur faudra contourner pour amorcer leur « libération » ?
Dans un premier temps, nous verrons que malgré la participation active des femmes au mouvement de mai 68, la question de l’égalité femme-homme ne sera quasiment pas à l’ordre du jour. Cependant, mai 68 a été le terreau de la seconde vague du féminisme et de la libération des femmes dans les années 70.

Tout d’abord, si l’on pouvait penser que mai 68 serait un mois de libération des femmes de par notamment leur participation active, il n’a qu’un rôle de révélateur des inégalités de genre.

En effet, les femmes ont participé activement au mouvement de contestation, et c’est par ce biais du nombre qu’elles vont affirmer une forme d’égalité (A). En effet, les jeunes femmes vont se politiser avec la crise de mai 68. Des crises personnelles, vécues jusque-là comme individuelles – crises contre l’ordre moral, familial, conjugal –, parfois même sous le prisme de la culpabilité vont rentrer en résonnance avec la crise politique. On assiste donc à une prise de conscience politique assez rapide, et un certain nombre de femmes vont rentrer dans des organisations d’extrême gauche, au centre du mouvement de contestation. On trouve souvent, dans les rapports de police, une description des manifestations où la femme est à la tête du mouvement, notamment parce que c’était une image qui sortait de l’habituel. Michelle Zancarini-Fournel compare ces femmes au symbole de la Pasionaria, surnom donné à Dolores Ibarruri, figure emblématique de la guerre d’Espagne.
Les femmes étaient donc présentes dans les manifestations, mais également dans certaines grèves qui touchaient le pays. Ainsi, les femmes occupèrent l’usine CSF en Isère, même si cela représentait une rupture dans l’ordre des choses. M. Zancarini-Fournel cite plusieurs autres exemples, qui montrent la diversité des revendications féminines. Les ouvrières de Jaeger, à Caen, se révoltent à l’aide d’un slogan : « les compteurs défilent, les femmes tombent ». Pour les ouvrières de l’usine Wonder, à Saint-Ouen, c’est le droit à la douche qu’elles réclament, mettant en évidence les terribles conditions de travail qu’elles subissent. Les revendications sont également salariales : à la CIBA dans le Rhône, un protocole est signé en juin à la suite des réclamations pour une égalité salariale entre femmes et hommes.
Autre que la participation physique des femmes aux mobilisations, la question du rapport homme-femme est posée lors de quelques-unes des nombreuses conférences à la Sorbonne ou à Nanterre, universités occupées par les étudiants. C’est le FMA,
Féminin, Masculin, Avenir qui met ces questions à l’ordre du jour. Promu par le Mouvement démocratique féminin (MDF), membre de la Convention des institutions républicaines – parti politique créé par Mitterrand –, le FMA aborde en amphithéâtre la question de la sexualité, de la différence des sexes, des rapports inégalitaires hommes-femmes. Il assure sa visibilité par un stand qu’il tient à la Sorbonne, et joue un rôle d’éveilleur des consciences par sa présence permanente au quartier latin. Cependant, il faut bien se rendre compte que le FMA est l’unique mouvement de mai 68 et abordant ces questions à avoir bénéficié d’autant de visibilité, alors même que sa visibilité est restée moindre.

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