Géographie des chemins de Saint-Jacques de Compostelle
Commentaires Composés : Géographie des chemins de Saint-Jacques de Compostelle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar sharette • 2 Janvier 2013 • 3 122 Mots (13 Pages) • 1 698 Vues
Géographie des chemins de Saint-Jacques de Compostelle
L'article ci-dessous a été écrit par Madeleine Griselin, géographe, directeur de recherche au CNRS, Laboratoire ThéMa, Besançon qui a fait au cours de l'année 2000 une étude approfondie de la via Podiensis.
Cet article présente sa méthodologie et rend compte des principaux résultats de ses travaux. Les informations à caractère historique qu'il contient sont basées sur des lectures faites avant son départ. Elle n'a découvert qu'à son retour les résultats des recherches de la Fondation qui l'ont conduite à être co-auteur d'un commentaire de la carte de 1648 .
L'intérêt de sa présentation géographique compense largement le caractère caduc des informations historiques qu'elle contient.
Auteur : Madeleine Griselin, France
Géographe, Chargée de recherche au CNRS, Besançon, nov. 2000
Du 25 juillet au 18 novembre 1999, nous avons cheminé, à pied, de notre village (Bonboillon, Haute-Saône) à Santiago. Géographe au laboratoire CNRS ThéMA de Besançon (laboratoire spécialisé dans l'étude systématique des paysages), j'ai eu la chance de réaliser mon rêve de trente ans tout en effectuant une étude paysagère pendant mon périple. Mon amie Manola Salvador, directrice d'école en retraite, est également peintre. Elle a effectué des aquarelles tout au long du chemin
1. Des chemins chargés d'histoire mais identifiés par la géographie
Un nombre mal défini de pèlerins se sont lancés, à partir du XIIe siècle, sur les routes d'Europe pour aller, au bout du continent, adorer les reliques de l'apôtre Jacques le Majeur. On est en droit de penser que les pèlerins partaient de leur domicile et rejoignaient les grandes routes de pèlerinage sur lesquelles églises et hôpitaux leur assuraient l'accueil nécessaire. Nous ne prendrons pas le contre-pied des historiens leur laissant le soin de démêler le vrai du faux des légendes concernant d'hypothétiques voies historiques, mais en tant que géographe contemporain, nous nous intéresserons aux tracés actuellement en vogue, fondés ou non sur l'Histoire, mais véritable entité sociétale contemporaine, même s'ils sont probablement (en partie au moins) sortis de l'imaginaire du XXe siècle, véhiculés d'un ouvrage à l'autre en s'appuyant sur une vraie fausse carte de 1644, œuvre sortie en 1970 de l'atelier d'un sculpteur français tout ce qu'il y a de plus contemporain (voir à ce sujet les travaux de Denise Péricard-Méa).
1.1. Les tracés "historiques" des chemins de St Jacques :
A en croire les guides actuels, de nombreux itinéraires permettaient de se rendre à Santiago, situé à l'extrémité occidentale de l'Espagne. Les pèlerins arrivant de France et du reste de l'Europe empruntaient le " chemin français " (Camino francès) sur 750 kilomètres pour traverser la péninsule ibérique ou pouvaient préférer le chemin des Cantabriques (ou chemin primitif, Camino primitivo) longeant la côte atlantique au pied de la cordillère cantabrique.
Pour atteindre l'Espagne, quatre grands itinéraires sillonnaient la France, si on se réfère au très vague texte qu'Aimery Picaud écrivait dans son guide du pèlerin, vers 1140 :
- le plus historique étant celui qui partait du Puy-en-Velay, et qui fut emprunté en 950 par Gotescalc, évèque du Puy, premier pèlerin " officiel "
- le chemin de Vézelay est incontestablement le plus riche en édifices romans.
- le chemin de Tours était rejoint par les pèlerins de Chartres, de Paris et d'une manière générale du nord de l'Europe
- le chemin d'Arles drainait les pèlerins du sud de la France et de l'Europe.
Les chemins du Puy, de Vézelay et de Paris se rejoignent à Ostabat et traversent les Pyrénées au col de Roncevaux, tandis que le chemin d'Arles passe la montagne au col du Somport, pour rejoindre, par le chemin aragonais, le Camino francès à Puente-la-Reina, où les quatre chemins ne font plus qu'un.
De nombreux autres chemins permettaient de rallier ces itinéraires majeurs, notamment des chemins côtiers (dont celui du Mont-Saint-Michel) qui évitaient les Pyrénées en rattrapant le Camino primitivo par la côte basque. Les pèlerins arrivant des chemins principaux pouvaient, du reste, rejoindre ce Camino primitivo, entre St-Jean-Pied-de-Port et St-Jean-de Luz, s'ils voulaient éviter la montagne. Tout porte à croire que les grandes routes commerciales, plus facile, plus sûres ont dû drainer les pèlerins (par flot ou non) : pour l'étude géographique qui suit, nous considérons le potentiel actuel offert au candidat au pèlerinage en 2001.
1.2. La géographie des chemins :
Ces chemins chargés ou non d'histoire, incontestables voies d'épanouissement de l'art roman, sont avant tout dictés par la géographie. La carte des reliefs de la France et de l'Espagne (Fig. 1) permet de caractériser les différents chemins et d'en comprendre les tracés et les spécificités.
Figure 1 - Les chemins de Saint-Jacques et la géographie
Le chemin de Paris est définitivement un chemin de plaine ; un peu plus accidenté, celui de Vézelay évite le Massif Central, alors que le chemin du Puy le traverse de part en part, quand celui d'Arles l'effleure juste par les Cévennes. Le Camino francès est un chemin exclusivement montagneux, tandis que le chemin primitif, pour côtier qu'il soit, évite les hauts reliefs mais n'en est pas moins extrêmement accidenté.
1.3. Des chemins de terre devenus routes, des villages devenus villes :
Ces chemins anciens sont devenus des voies commerciales, des routes et des autoroutes. En Espagne, le chemin actuel longe les routes sous forme d'une piste plus ou moins aménagée pour les piétons. Seule la Navarre (versant espagnol des Pyrénées) et la Galice (région de Santiago) présentent des chemins "
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