Lecture linéaire, Parfum Exotique, Baudelaire
Fiche : Lecture linéaire, Parfum Exotique, Baudelaire. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Camille Hermand • 5 Novembre 2023 • Fiche • 3 503 Mots (15 Pages) • 150 Vues
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- Ce poème est un sonnet
Issue d’Italie, cette forme poétique a été rapidement adoptée par les poète français, au point de devenir la forme poétique essentielle de la poésie française. C’est la forme la plus utilisée par Baudelaire dans Les Fleurs du Mal. Elle est marquée par sa brièveté et sa densité : ce qu’aime particulièrement Baudelaire dans cette forme est sa capacité à exprimer et faire surgir l’infini, dans le cadre resserré de 14 vers.
- Le thème de l’exotisme et l’adresse à la femme aimée : Jeanne Duval
Ce poème est inspiré par Jeanne Duval, une femme métisse, probablement originaire de l’île d’Haïti, qui a été la maîtresse et l’une des principales muses (inspiratrices) de Baudelaire. Elle inspire plusieurs poèmes de Fleurs du Mal, comme « Une chevelure » où l’on retrouve le thème de l’exotisme. Ce thème est aussi nourri par les souvenirs Baudelaire, qui a voyagé, étant jeune, à l’île Maurice et à l’île de la Réunion.
- La section « Spleen et Idéal » : Dans les deux pôles opposés que désigne le titre de la section, le poème se rattache clairement à l’ « Idéal ». Ainsi, ce sonnet offre une réponse à une question qui traverse l’œuvre de Baudelaire : comment échapper au réel et à la douleur qu’il nous inflige ?
Formulations de projets de lecture
x En quoi ce sonnet représente-t-il l’ « Idéal » ?
x Quelles formes prend l’ « Idéal » à travers ce sonnet ?
x Comment ce sonnet exprime-t-il et réalise-t-il l’ « Idéal » baudelairien ? x Comment le poète échappe-t-il au réel à traves ce sonnet ?
Progression du poème
Le poème est constitué de deux grandes unités dans un effet de concordance entre la composition poétique du sonnet (deux quatrains / deux tercets), la composition syntaxique (deux phrases) et la composition sonore (unité de rimes de chacun de ces deux mouvements).
Ainsi, on peut observer :
Mouvement 1 = les deux quatrains = 1 phrase = 1 même système de rimes, rimes embrassées en [eur]
et en [on]. Ce mouvement évoque la vision d’un paysage idéal.
Mouvement 2 = les deux tercers = 2ème phrase = une unité de rimes créée par leur entremêmelement ([ma] / [arine] / [marinié]). Construit en écho au premier mouvement, ce mouvement approfondit cette vision d’un monde idéale et la réalise grâce au pouvoirs du poème.
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1er quatrain : Le déclenchement de la vision d’un paysage idéal[pic 4]
Dans la poésie baudelairienne, le réel est marqué par le spleen, le vice, la laideur : tout ce que le titre du livre reprend sous le terme générique du « Mal ». Ainsi, la quête du poète est d’échapper à ce réel douloureux, et l’Idéal appartient au domaine de la rêverie, de l’imagination. C’est ce qu’exprime l’opposition de sens entre le C.C.de Manière « les deux yeux fermés » (v.1) et le verbe « Je vois » (v.3) : il s’agit d’une vision intérieure, rêvée, et non de la réalité dont le poète a pris soin de ce couper pour accéder à un paysage idéal.
Les deux premiers vers exposent le cadre favorisant le déclenchement de la rêverie heureuse – outre les « yeux fermés », coupure avec le monde réel. Ce cadre correspond à une atmosphère douce et apaisante, évoquée à travers plusieurs motifs :
- celui de la chaleur, mis en avant avec les deux adjectifs de la même famille « chaud » (v.1) + « chaleureux » (v.2). L’évocation de la saison et du moment de la journée, dans le C.C.de Temps « en un soir chaud d’automne » (v.1) renvoie à chaleur douce, modérée. C’est donc un climat agréable.
- celui de la présence féminine. Il faut noter ici que contrairement à d’autres poèmes de Baudelaire (par ex :
« Sed non satiata » ou « Le Vampire » ) l’évocation de la femme aimée, à laquelle s’adresse le poète en employant la deuxième personne (« ton sein chaleureux », v.2) est ici apaisante. Le « sein », s’il est sensuel dans la mesure où il éveille les sens (odorat, toucher) n’est pas ici un sein sexualisé mais plutôt maternel, protecteur, l’adjectif « chaleureux » a le sens d’ « accueillant » et suggère l’idée de bien-être. Le choix des rimes embrassées, que l’on retrouve sur les deux quatrains, illustre du point de vue de la rime cette idée de bien être protecteur.
- enfin l’ élément essentiel, « l’odeur » (v.2), est déjà mis en avant dans le titre « Parfum exotique ». Le sens de l’odorat est un sens important chez Baudelaire et revient dans plusieurs poèmes : sens aérien à la fois puissant et subtil, l’odorat est propice aux transports de l’imagination.
Ce cadre apaisant et la présence du parfum féminin et exotique (Jeanne Duval, rappelons-le, est une femme métisse originaire des îles), vont donc permettre le déclenchement d’une rêverie heureuse.
La PSC (proposition subordonnée circonstancielle) temporelle qui structure le quatrain souligne l’effet déclencheur, presque magique, de ces éléments : les mots « Quand », « Je respire », « Je vois », mis en valeur à l’ouverture de chaque vers, résument cet effet presque immédiat et automatique. L’utilisation du présent,
associé au mot subordonnant « quand », suggère que le déclenchement de la vision se réalise chaque fois que ces circonstances sont réunies.
Sous l’impulsion de la muse Jeanne Duval, maîtresse métisse de Baudelaire, originaire des îles, l’Idéal prend ici la forme d’un paysage exotique, marin et ensoleillé : « Je vois se dérouler des rivages heureux / Qu’éblouissent les feux d’un soleil monotone. » La dimension idéale de cette vision est demblée posée par la rime positive qui associe « heureux » (v.3) à « chaleureux » (v.2). La figure associant l’adjectif « heureux » aux « rivages » peut être interprétée de deux façons – dont les deux sens coexistent et concourent à souligner la dimension idéale du paysage :
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