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Commentaire arrêt du 28 mars 2002 n° 00-10.628

Commentaire d'arrêt : Commentaire arrêt du 28 mars 2002 n° 00-10.628. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  10 Mars 2023  •  Commentaire d'arrêt  •  1 937 Mots (8 Pages)  •  397 Vues

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TD 5: Commentaire arrêt du 28 mars 2002 n° 00-10.628

La Cour de cassation prononce un arrêt important en matière de garde commune de la chose en précisant, dans quelles mesures, cette dernière doit être exclue.

En l’espèce, une mineure participe à un jeu collectif improvisé inspiré du baseball. Elle est blessée à l'œil droit par une balle de tennis relancée en sa direction par un autre mineur au moyen d’une raquette de tennis tenant lieu de batte de baseball.

Le père de la victime, en qualité d’administrateur légal des biens de sa fille, intente une action en réparation sur le fondement de l’article 1384 alinéa 1er. La Cour d'appel le déboute de sa demande. Pour rejeter l'action en réparation du père de la jeune fille, elle retient, d'une part, que l'usage commun de la balle de tennis, instrument du dommage, n'autorise pas la joueuse blessée à réclamer réparation sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil et, d'autre part, qu'en participant à ce jeu la mineure avait accepté les risques qu'il comportait, circonstance qui exclut également l'application à son profit du texte susvisé. Un pourvoi est formé par le père de la victime.

La question qui se pose à la Haute juridiction est de savoir si la victime mineure subissant un dommage au cours d’un jeu improvisé peut en demander la réparation ?

La Cour de cassation répond par l’affirmative et casse l’arrêt au visa de l’article 1384 alinéa 1er du Code civil. Elle rappelle, d’une part, que l’instrument du dommage est ici la raquette de tennis et non la salle dont le mineur était gardien. Et d’autre part, elle affirme que les victimes de jeux improvisés ne peuvent se voir opposer l’acceptation des risques afin d’exclure leur droit à réparation.

Dès lors, la Cour de cassation met à l’écart le principe de la garde commune de la chose (I) et retourne, par la même occasion, vers un encadrement plus strict du champ d’application de la théorie de l’acceptation des risques (II).

I- Mise à l’écart du principe de la garde commune de la chose

Pour ce faire, elle va exclure le régime qui est normalement appliqué aux jeux utilisant une balle (A) et va proposer une individualisation de la garde plutôt qu’une garde commune (B)

  1. Exclusion du régime normalement appliqué aux jeux utilisant une balle

"La balle de tennis avait été projetée vers la victime au moyen d’une raquette de tennis (...) dont il résultait que la raquette avait été l’instrument du dommage". En affirmant cela, la Cour de cassation exclut le principe de la garde commune de la chose impliquant les jeux de balles. En principe, la garde est alternative ou unitaire. Dans un arrêt du 20 novembre 1968, comprenant quasiment les mêmes faits, elle avait affirmé que des joueurs de tennis étaient co-gardiens de la balle. Elle l'a justifié par le fait que les deux joueurs exerçaient les mêmes pouvoirs de direction et de contrôle, symboles de la garde depuis l'arrêt Franck. Comme ils jouaient l'un avec l'autre au tennis, ils avaient le même pouvoir sur la chose. Dès lors et à partir de cet arrêt, il pouvait y avoir une garde commune d'une ou d'un ballon utilisé au cours d'un sport.

Ce qui est surprenant dans cet arrêt, c'est que, la situation étant quasiment la même, on pourrait penser qu'elle aurait eu le même raisonnement, rendant les deux enfants co-gardiens de la balle. Mais ici, elle exclut directement le rôle de la balle et son dommage direct et se focalise sur la raquette de tennis. Ce qui lui permet de mettre à l’écart la garde commune de la chose car une seule personne a le pouvoir d'usage, de direction et de contrôle de la raquette. Elle choisit donc une solution complètement différente.

Cette solution paraît assez raisonnable et peut s'expliquer par le fait que, comme nous le savons, pour qu’il y ait une garde commune de la chose, il faut avoir les trois pouvoirs dessus. Cependant, en l'espèce, les deux enfants n'exercent pas les mêmes pouvoirs sur la chose. Au tennis, les joueurs ont leur propre raquette donc ils ont un contrôle équivalent sur la chose. Ici, l'un utilisait la balle à main nue tandis que l'autre disposait d'une raquette de tennis. On ne peut donc vraiment qualifier cet arrêt de revirement de jurisprudence.

 

  1. L'exclusion de la garde commune au profit d’une individualisation de cette dernière

Comme nous l’avons dit, le principe reste la garde alternative et non cumulative de la chose, la jurisprudence concernant la garde commune d’une chose reste très exceptionnelle. Dès que la Cour de cassation peut identifier un gardien de la chose, elle rejette la garde commune. C’est ce qu’elle a fait en l’espèce en rendant la raquette l’instrument du dommage, dès lors, le responsable est sans aucune doute celui qui tenait la raquette. Elle individualise la garde.

Elle l’avait déjà fait plusieurs fois. Notamment dans un arrêt du 11 juillet 2002, oû plusieurs enfants jouaient avec un briquet et l’un d’entre eux a déclenché un incendie. Elle décide dès lors qu’il n’y a pas de garde commune s’il est possible de déterminer quel enfant avait les pouvoirs d’usage, de contrôle et de direction du briquet au moment où l'incident a eu lieu.

Dans un autre arrêt du 9 mai 1990, lors d’un régate, un voilier avait fait naufrage. La garde commune a été exclue et le propriétaire/skipper du voilier a été identifié comme gardien de la chose. On voit que la Cour de cassation veut à tout prix ne pas s'écarter du principe de la garde alternative de la chose.

Cependant, l’essence même de la responsabilité du fait de la chose suppose plusieurs critères, il faut un préjudice, une chose, le rôle actif de la chose dans la réalisation du dommage et un gardien. Trois de ces critères sont remplis en l’espèce mais la Cour ne s’est pas attardée sur le rôle actif de la chose. En identifiant l’instrument de la chose actionnée par l’homme (la raquette de tennis) et non la chose entrée en contact direct avec la victime (la balle), elle s’écarte de l’essence même de la responsabilité du fait des choses. A l'origine, la doctrine discerne si la chose est en mouvement ou inerte, dès lors si la chose ayant heurté le siège du dommage était en mouvement au moment de l’accident; il y a présomption irréfragable. Si ces deux conditions sont réunies, le gardien doit démontrer l’état, la position ou le comportement anormal de la chose. En l’espèce, la gardien aurait alors pu essayer de démontrer un caractère anormal, vu que les enfants jouaient, la raquette était en mouvement lors du dommage. Mais la cour ne s’est pas du tout attardée sur le fait qu’en individualisant la raquette de tennis comme instrument du dommage, il n’y avait plus le critère de contact avec le siège du dommage. La solution en l’espèce peut alors toujours être critiquée.

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