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Présentation de St Simon

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Par   •  11 Novembre 2022  •  Cours  •  3 376 Mots (14 Pages)  •  381 Vues

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Saint-Simon      Cours 1         Présentation de l’auteur Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon (1675-1755)

Homme de 35 ans au moment de « L’intrigue du mariage du duc de Berry » ; a 20 ans au moment de la mort de La Fontaine, de Sévigné, de La Bruyère. Meurt quelques semaines après Montesquieu, écrit en même temps que Voltaire : il est donc un écrivain du XVIIIième siècle essentiellement. Alors qu’il se prétend étranger à la littérature, (voir la préface) il est considéré actuellement comme l’un des plus grands écrivains français, pour la valeur d’une œuvre monumentale (8 volumes dans la  Pléiade) et pour son style. La destinée de son œuvre est particulière : les Mémoires de SS dont est extrait « L’intrigue » ne connaissent leur publication qu’en 1830, non que, comme Stendhal, SS pensât n’être compris que bien après sa mort, mais selon une volonté concertée de son auteur en même temps que par décision politique. Le sujet même d’une œuvre dont la genèse est tardive explique cette publication posthume.

N.B : mémoires est un nom masculin pluriel.

  1. La genèse complexe des Mémoires  
  1. Les déclarations de l’auteur : les Mémoires auraient-ils été commencés en 1694 ? SS affirme au début des M ((I, Pléiade, p. 20) les avoir commencés à la date de 1694, âgé de 19 ans, quand il était maître de camp d’un régiment de cavalerie (voir citation  1). D’autre part, il aurait écrit en 1699 une lettre à Rancé, abbé réformateur de La Trappe,  à propos de la charité : SS se fait scrupule en effet, en écrivant les Mémoires, de dire du mal de son prochain (et de fait, il en dit beaucoup.) Nous n’avons pas trace de la réponse de Rancé.  
  2. Le « lit de justice » (= séance solennelle du Parlement, en présence du roi) de 1718 écrit en 1720 : nous savons aussi qu’en 1720 SS écrit texte sur le lit de justice du 26 août 1718 :  c’est une  séance parlementaire qui met au pas le Parlement, qui sous la Régence a retrouvé son droit de remontrance, et qui ôte aux bâtards de Louis XIV, essentiellement au duc du Maine, leurs prérogatives ; SS fait partie d’un comité officieux, et obtient ces mesures  qu’il souhaite depuis longtemps. L’idéal de SS est en effet que les ducs et le roi fassent table ronde, sans que d’autres instances participent au pouvoir, ni le Parlement, ni les « bâtards ». Ce morceau, remanié, sera ensuite inséré ds les Mémoires.
  3. La découverte du Journal du marquis de Dangeau : ce dernier avait tenu de 1684 à 1720, le compte rendu quotidien des grands évènements et de la Cour, écrit dans un style neutre, où tout est sur le même plan, bal et opérations militaires. SS fait faire une copie du journal de Dangeau, en laissant une page vierge à droite, pour annoter le journal, ce qu’il fait de 1730 à 1739 sans doute, avant de rédiger définitivement les Mémoires. Le journal de Dangeau est une mine de renseignements précieux, une base documentaire, que Voltaire  utilisera aussi pour écrire Le Siècle  de Louis XIV. SS a une attitude réactive face à Dangeau, qui est sec, énumère des faits, sans montrer le dessous des cartes, les ressorts, et écrit en courtisan, c’est-à-dire que SS développe, explique, hiérarchise. Néanmoins certains passages sont recopiés mot pour mot de Dangeau, comme la disgrâce de la Princesse des Ursins. Il rédige donc des Additions au journal de Dangeau, qu’il fera passer, pour certaines, dans les Mémoires[1]. La dimension collective n’est donc pas absente de l’œuvre. SS utilisera aussi pour les affaires étrangères les textes de Torcy, secrétaire d’état aux affaires étrangères, neveu de Colbert. La préoccupation de citer ses sources n’est pas aussi importante qu’aujourd’hui. On notera l’aspect « réécriture », « palimpseste » de l’œuvre de SS.  
  4. En 1730, SS commence à écrire les Notes sur  les duchés-pairies… : il accomplit un travail de recherche historique, d’érudition, pour fixer l’histoire des duchés, commentant des arbres généalogiques. Comme il est duc et pair, il écrit l’histoire de son propre duché, à la 3ième personne (ce que l’on appelle La note Saint-Simon)  : il est un duc lui aussi, qui lutte pied à pied pour le maintien des prérogatives ducales, contre les usurpateurs (roturiers, « bâtards »…)  Puis il abandonne ce travail pour passer à l’écriture de la version définitive des Mémoires, de 1740 à 1750.  Il en interrompt 6 mois l’écriture, après la mort de sa femme en 1743 : il dessine une ligne de larmes et de croix en plein milieu du texte : les sentiments intimes ne se disent, semble-t-il, que par le dessin, et non par la parole. Il écrit à ce moment-là aussi la préface de l’œuvre, sous forme d’une question sur la légitimité de son entreprise : Savoir s’il est permis d’écrire et de lire l’histoire, singulièrement celle de son temps,  se posant principalement la question de la légitimation chrétienne de l’entreprise : Rancé lui aurait-il déconseillé ce travail ? La préface serait-elle, comme le hasarde M. Hersant, une sorte de désobéissance posthume à Rancé, qui lui aurait déconseillé de poursuivre son projet ?  

En 10 ans, et s’arrêtant 5 ans avant sa mort, SS écrit 3000 pages manuscrites, océan textuel, œuvre monde (comme celle de Balzac) pas encore complètement traduit en langue étrangère, retraçant l’histoire de France de 1691 à 1723. Autrement dit, quelques années de latence, de vide, séparent son retrait de la cour en 1723 de la rédaction définitive des Mémoires. Il ajoute à la fin des manchettes, qui sont titres ou sous-titres, guidant la lecture. Il laisse un seul exemplaire manuscrit (qui aurait pu être perdu.)

Nous disposons d’un texte intéressant sur la genèse des Mémoires, datant des années 1730 : SS y explique, même s’il ne parle pas apparemment en son nom, mais s’exprime à la 3ième personne, en généralisant, l’état d’esprit ds lequel il était après avoir quitté la cour, et le projet qu’il forma d’écrire ses Mémoires (cit 2)

e) L’aventure du manuscrit : SS meurt en 1755, juste après Montesquieu et la parution du Discours sur l’origine de l’inégalité de Rousseau. Il institue exécuteur testamentaire un cousin, évêque de Metz, chargé de l’avenir du manuscrit des Mémoires. Par ordre royal, le manuscrit est confisqué ; son cousin obtient la levée de l’interdiction et procède à l’inventaire. Les manuscrits passent ensuite par ordre du roi, en 1760, aux Affaires Etrangères (ils sont entreposés dans le donjon du Louvre) : la justification est que ces papiers  concerneraient le service du roi et de l’état. Une personne est chargée de les lire (on a peur du voyeux, de l’espion de Cour qu’était SS.)  Puis diverses personnes en font des copies. Enfin en 1819 un parent de SS demande à Louis XVIII que les manuscrits prisonniers d’état soient restitués. On peut donc enfin faire imprimer les Mémoires en 1829-30, soit plus de 50 ans après la mort de leur auteur. L’œuvre est nécessairement posthume : l’auteur avait tout à fait conscience qu’elle ne pouvait être publiée de son vivant, mais qu’il fallait laisser passer deux générations, puisqu’il parle de ses contemporains et dit la vérité, parfois dérangeante(cit 2). L’ouvrage est écrit ds le secret, nécessairement, car écrire l’histoire de son temps, c’est risquer de déplaire à ceux dont on parle : voir la préface, intitulée « Savoir s’il est permis d’écrire et de lire l’histoire, singulièrement celle de son temps. » (citation 3) En effet  SS ne se situe pas dans une perspective encomiastique du règne de Louis XIV : pour lui, la monarchie idéale fut celle de Louis XIII, où les ducs et pairs formaient table ronde avec le souverain ; Louis XIV au contraire a selon lui affaibli la noblesse et mis au sommet ceux qui n’étaient rien (ses « bâtards », ou la « veuve Scarron »,  devenue épouse du monarque, et toute-puissante.) C’est le contraire dans le Siècle de Louis XIV, où Voltaire célèbre un règne qui constitue pour lui le point culminant de la monarchie portée à sa perfection, et un souverain protecteur des arts et des lettres. SS dit aussi beaucoup de mal de ses contemporains (et du bien, parfois aussi : ses sympathies et antipathies sont fortement marquées, et pas toujours là où on les attendrait : voir le portrait cité par E. Auerbach dans Mimésis, chapitre intitulé « Le souper interrompu. » )

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