"L'âge des low tech " Bihouix Philippe

" Comment la technique a-t-elle toujours répondu à la pénurie des ressources " - Philippe Bihouix, " L'âge des low tech ", Acte 1 " Grandeur et décadence des "ingénieurs thaumaturges "

L’histoire de l’humanité est une longue lutte contre la pénurie de ressources. Voilà bien un lieu commun du darwinisme, puisque toute espèce est contrainte dans son développement par la disponibilité du milieu en ressources, la sélection naturelle qui en résulte étant, avec la mutation, le moteur de l’évolution.

Pas totalement sûr, car on a pu montrer que des silex, par exemple, ont voyagé sur plusieurs centaines de kilomètres, quelques « mines » approvisionnant des régions éloignées. Certaines qualités étaient déjà recherchées, certains objets n’étaient déjà disponibles qu’en quantité limitée.

Il est impossible de dater précisément les premières pénuries de matières premières non alimentaires. Les soucis ont dû apparaître dès que l’on a commencé à se tourner vers des matériaux moins abondants que la pierre, le bois ou l’argile, c’est-à-dire vers 6000 avant notre ère, avec l’utilisation des premiers outils métalliques en cuivre, et dans une moindre mesure en fer météoritique, un alliage naturel de ferronickel résistant à la corrosion. Assez rapidement, les premiers développements de la métallurgie, du cuivre puis du bronze (cuivre et étain) ont permis d’exploiter des minerais, oxydes et carbonates, et pas seulement du métal à l’état natif, et ainsi de faire face à la demande.

Avec le développement de la concentration humaine et des grandes civilisations, comme au Moyen-Orient et autour de la Méditerranée, les premières pénuries, essentiellement locales ou régionales, ont dû apparaître, et pas seulement de ressources non renouvelables comme les métaux. Il y eut également surexploitation de ressources a priori renouvelables (les forêts, les sols, les animaux) : le pourpre, le coquillage « phénicien » qui était utilisé pour teindre la bande purpurine sur les toges des sénateurs romains (et la toge entière pour les généraux triomphants, les imperatores), a quasiment disparu de Méditerranée orientale aujourd’hui et la technique correspondante s’est perdue.

Nature du document : chapitre d'un essai sur la question des ressources et des innovations technologiques

Résumé : Depuis que l'Homme est Homme, la question des ressources s'est posée. Elle se pose universellement aux espèces vivantes, à la différence prête que l'Homme est capable de remuer mondes et merveilles pour quelques grammes d'or là où des troupeaux émigreront pour des questions de ressources alimentaires (eaux, changement de saison et donc de paradigme...).

Ces premiers échanges commerciaux autour de ressources ne peuvent être décemment datés ; cela étant dit, on sait que déjà à la préhistoire, des "mines" fournissaient les régions éloignées en silex" et par conséquent que l'Homme a commencé à manquer de certaines ressources aussi vite que ses besoins ont changé.

Certaines pertes sont à déplorer sur le plan de la technique entraînant là une perte animale à déplorer : le coquillage phénicien et la technique d'extraction de la couleur violette lui étant attachée ont disparu (pratiquement disparu pour le coquillage). C'est un exemple, avec les techniques de fondation et de ciment romaines qui sont, encore aujourd'hui, redécouvertes. On peut également penser au feu grégeois.

Dès lors, on se rend compte qu'en plus d'épuiser les ressources, l'Homme est capable d'oublier, lorsque ces ressources viennent à manquer ; ce qui peut amener à la réflexion que rien ne change malgré la disparition d'un "simple petite coquillage" de l'écosystème là où la véritable question est : qu'est ce qui nous importe ?

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